Les sols contaminés dans la ligne de mire de Québec
Les camions seront suivis par géolocalisation pour faire échec à l’enfouissement illégal des sols souillés
Québec veut suivre à la trace les sols contaminés provenant des chantiers et testera dans les prochains mois une nouvelle application baptisée Traces Québec dans le cadre d’un projet-pilote à Outremont. Le gouvernement cherche ainsi à mettre un terme à l’enfouissement illégal de ces sols souillés dans la nature.
Le projet-pilote sur la traçabilité des sols sera mené sur le site de l’ancienne cour de triage d’Outremont où la Ville aménagera un parc de 1,7 hectare à compter du mois de mai, ont fait savoir lundi la ministre du Développement durable et de l’Environnement, Isabelle Melançon, et la mairesse de Montréal, Valérie Plante.
L’entreprise chargée de disposer des sols contaminés sera tenue d’utiliser un logiciel spécifique, Traces Québec, qui permettra de suivre en temps réel les différentes étapes entre l’excavation des sols contaminés jusqu’à leur transport par camion vers un site accrédité.
Les informations relatives aux sols contaminés seront cryptées et archivées de manière confidentielle. Le transport des matières sera suivi par géolocalisation.
Selon Jean Lacroix, p.-d.g. de Réseau Québec, qui a développé le système de traçabilité avec WikiNet, il deviendra très difficile pour les entreprises de trouver des failles pour, par exemple, transvider le contenu du camion en catimini sur un site non accrédité. « Le système est extrêmement robuste, a-t-il dit. On a mis l’armada.»
Un premier pas
Au cours des dernières années, plusieurs cas d’enfouissement
«
Comme ministre de l’Environnement, et surtout comme citoyenne du Québec, » j’ai trouvé ces histoires-là très préoccupantes et choquantes
Isabelle Melançon, ministre du Développement durable et de l’Environnement
illégal de sols contaminés ont été mis au jour.
La Presse rapportait lundi que la Sûreté du Québec et le ministère de l’Environnement mènent depuis 2015 une enquête sur une organisation criminelle qui aurait infiltré l’industrie et entreposé sans autorisation des sols contaminés sur différents sites, dont des terres agricoles dans la région des Laurentides.
La ministre Melançon a évoqué le cas de deux endroits, l’un près de la rivière de l’Achigan et l’autre en Ontario, où des sols contaminés auraient été laissés sans traitement sur des sites non autorisés.
« Comme ministre de l’Environnement, et surtout comme citoyenne du Québec, j’ai trouvé ces histoires-là très préoccupantes et choquantes», a-t-elle commenté. «Mais là, on est en train de fermer la brèche et on a vraiment bon espoir de mettre fin à cette façon de faire.»
La ministre a assuré que les victimes du crime organisé ne seraient «pas laissées dans le pétrin». À terme, Isabelle Melançon souhaite que ce système s’applique à tous les chantiers, mais n’a pu donner d’échéancier à cet égard. «C’est un premier pas que nous faisons aujourd’hui, mais je veux aller plus loin », a-t-elle dit.
La mairesse Valérie Plante envisage aussi d’étendre le système de traçabilité à tous les chantiers du territoire montréalais. Traces Québec pourrait même être utilisé dans d’autres domaines, a-t-elle signalé: «On a une grande flotte [de véhicules] à la Ville de Montréal.»
De son côté, Réseau Environnement précise que son application pourrait être utile pour la gestion des matières dangereuses et des matières résiduelles.
Le dévoilement du projet-pilote a été salué par le Conseil des entreprises en technologies environnementales (CETEQ) qui espère cependant que le système de traçabilité sera rendu obligatoire sur l’ensemble du territoire québécois.
Reste que pour le CETEQ, l’annonce de lundi est prometteuse. «Les prochaines étapes seront la réforme de la règle du plus bas soumissionnaire», a signalé Richard Mimeau, directeur général du CETEQ.
«À plus long terme, il nous faudra une entente avec le gouvernement ontarien afin que nos sols contaminés, lorsqu’ils s’y retrouvent, soient traités adéquatement et sur un site autorisé par le gouvernement de l’Ontario. »