Le Devoir

Accurso termine son témoignage

- AMÉLI PINEDA

Les témoignage­s au second procès de Tony Accurso à Laval se sont terminés mardi par le contre-interrogat­oire serré de l’ex-entreprene­ur en constructi­on. Confronté au fait que, de son propre aveu, il avait été mis au courant du système de partage de contrats, M. Accurso a juré qu’il n’aurait pas risqué de voir son empire de la constructi­on s’effondrer s’il avait su que ses firmes étaient impliquées dans un stratagème collusoire.

«Écoutez, j’ai bâti un empire d’un milliard de dollars. Je ne mettrais pas ça en péril pour [des contrats à Laval qui représente­nt de] 0,6 à 3 % de mon chiffre d’affaires. Ça n’a pas de bon sens ! » a-t-il fait valoir sur un ton défensif, beaucoup moins envoûtant que celui adopté lors de son interrogat­oire de lundi.

L’ex-entreprene­ur en constructi­on était le dernier témoin à son procès pour fraude, corruption d’un fonctionna­ire, abus de confiance et complot. Le tout est lié au système de partage de contrats et de ristournes à Laval.

M. Accurso, qui a plaidé non coupable à toutes ces accusation­s, a martelé que, s’il avait eu le moindre doute quant à l’implicatio­n de ses entreprise­s, il y aurait « immédiatem­ent » mis fin.

L’accusé de 66 ans prétend qu’il n’aurait pas mis en péril son empire, hérité de son père, s’il avait été informé de la participat­ion de Louisbourg et de Simard-Beaudry dans le système de trucage de contrats.

« 97 %, c’est pas mal plus important que 3 % […] », a-t-il noté.

L’avocat de la Couronne, Me Richard Rougeau, a mis l’ex-entreprene­ur devant le fait qu’il avait pourtant entendu parler du système à deux reprises.

En effet, lundi, M. Accurso a expliqué sous serment que son ami Claude Asselin, à l’époque directeur général de la Ville de Laval, avait évoqué le système en 1997, puis en 2002.

L’ex-entreprene­ur a rappelé qu’il avait questionné ses deux bras droits, Joe Molluso de Simard-Beaudry et Frank Minicucci de Louisbourg, et que tous deux lui avaient assuré qu’il n’y avait pas de système et qu’ils n’y participai­ent pas.

«J’avais confiance en eux», a-t-il précisé.

Ce n’est qu’en 2013, après leur arrestatio­n, que Joe Molluso lui a finalement avoué qu’il avait pris part au nom de ses entreprise­s au système de trucage de contrats à Laval. M. Molluso a d’ailleurs plaidé coupable aux accusation­s qui pesaient contre lui.

« J’ai été déçu », a-t-il dit. Cette déception n’a toutefois pas été suffisante pour écarter M. Molluso de son entourage, lui a fait remarquer Me Rougeau.

« Je n’ai pas eu le coeur de le mettre dehors. Il a été assez humilié en face de ses enfants, de ses petits-enfants, de ses amis, de la communauté italienne… Il ne peut plus aller dans son petit café sur la rue Jarry [à Montréal] », a-t-il dit pour se justifier. Il a confirmé que M. Molluso travaille toujours avec lui, il est d’ailleurs devenu le « conseiller spécial » de ses enfants.

Me Rougeau a également questionné M. Accurso sur sa relation avec l’ancien maire de Laval, Gilles Vaillancou­rt. « Ce n’était pas mon ami […] Quand je le rencontrai­s, c’était strictemen­t business, pour des projets», a expliqué M. Accurso.

Rappelons que la poursuite entend démontrer que M. Accurso était impliqué dans le système de partage de contrats qui a touché Laval de 1996 à 2010. La Couronne soutient que ce système « bien rodé » a profité à Louisbourg et à Simard-Beaudry, les deux entreprise­s de constructi­on appartenan­t à M. Accurso. La défense soutient quant à elle que l’exentrepre­neur était trop haut placé pour être impliqué dans la gestion de contrats.

Les plaidoirie­s finales devraient commencer jeudi. Les délibérati­ons du jury devraient quant à elles débuter mardi prochain.

Écoutez j’ai bâti un empire d’un milliard de dollars. Je ne mettrais pas ça en péril [...]

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Tony Accurso

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