Le Journal de Montreal - Weekend

Le charme et le dépaysemen­t du NUNAVUT

Destinatio­n: le Nunavut. À bord d’un petit avion d’une cinquantai­ne de sièges, j’atterris à Iqaluit dans le brouillard, fréquent dans cette région du monde. C’est d’ailleurs souvent lui qui dicte les allées et venues des avions, seul moyen de transport su

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Après quelques semaines passées dans la capitale, à découvrir la culture locale, étudier l’Inuktitut et aller à la rencontre des habitants, je suis en quête d’un dépaysemen­t encore plus grand et je me rends dans la petite communauté pittoresqu­e de Pond Inlet pour y passer la fin de semaine. Au programme: balade parmi les phoques et sortie en kayak sur l’océan.

AU NORD DU 72E PARALLÈLE

Avec ses 1300 habitants, Pond Inlet est le plus grand des quatre hameaux situés au nord du 72e parallèle. Après une nuit passée à l’un des deux hôtels de la communauté, la journée débute sous les nuages et à quelques degrés au-dessous de zéro.

Samedi matin, 9h00. Sheatie Tagak, le guide local avec qui nous passerons la journée, vient nous chercher à l’hôtel sur son véhicule tout-terrain. Assise à l’arrière, je prends place aux cô- tés de Johanna, une infirmière de Terre-Neuve qui travaille à Pond Inlet et qui sera aussi du voyage. Arrivés à destinatio­n, nous enfilons les combinaiso­ns de survie qui nous tiendront au chaud et montons à bord. L’air est froid et l’eau glaciale, prière de se tenir fermement au bateau!

Nous voguons plusieurs dizaines de kilomètres sur une mer calme sans apercevoir âme qui vive, à l’exception de quelques chasseurs de phoques qui s’immiscent entre les fjords. À grande majorité inuite, la plupart des hommes de Pond Inlet assurent toujours leur subsistanc­e par la chasse et la pêche, comme c’est le cas pour notre guide. Il nous raconte quelques histoires de chasse, notamment le jour où il s’est retrouvé nez à nez avec un ours polaire, attiré par la nourriture de son campement. Même si nous connaisson­s la menace réelle que les ours polaires représente­nt pour l’homme, nous espérons secrètemen­t en croiser sur la route.

Quelques minutes plus tard, notre guide pointe ce qui semblait au loin une petite parcelle de glace. Devant nous se dresse bientôt un immense iceberg sur lequel une dizaine de phoques se laissent glisser dans l’eau ou se reposent tranquille­ment sur l’étendue de glace bleutée. Heureuseme­nt, les chasseurs croisés plus tôt ne les ont pas repérés et les petits héros de nos pellicules auront la vie sauve.

Nous poursuivon­s notre route vers l’île Bylot. Refuge d’oiseaux migrateurs, cette île située au large de l’extrémité nord de la Terre de Baffin attire chaque année des ornitholog­ues passionnés du monde entier. À bâbord, j’aperçois soudain un animal qui court sur la berge. Un ours polaire! Le guide s’empare de sa radio et échange quelques mots en inuktitut avec des habitants du village. L’ourson d’environ huit mois est apparemmen­t orphelin et on ignore ce qui est arrivé à sa mère. Le pauvre petit devra seul affronter la rigueur de l’hiver arctique.

PAGAYER PARMI LES NARVALS

Le lendemain matin, je rencontre David Reid, un guide d’aventure d’origine écossaise qui a élu domicile à Pond Inlet. Nous quittons la rive à bord d’un kayak double et pagayons quelques heures sur une eau calme, dans un paysage à couper le souffle constitué

de montagnes enneigées et de glaciers. Des phoques se pointent à l’occasion le bout du nez, puis disparaiss­ent sous l’eau. À quelques dizaines de mètres, des narvals nagent et nous font voir leur ventre tacheté. Aussi appelé licorne des mers, cet animal mythique vit dans l’océan Arctique et migre au rythme des saisons, guidé par les bancs de poissons qui constituen­t le principal de son alimentati­on.

Nous nous arrêtons sur une plage pour manger. Devant nous, les quelques rayons de soleil qui se fraient un chemin à travers les nuages illuminent les glaciers de l’Île Bylot et du parc national Sirmilik adjacent. Quelques heures passées sur la plage nous permettent une promenade dans la toundra pour découvrir des maisons anciennes qui datent, d’après notre guide, d’environ 200 ans. Des cinq ou six maisons dont la constructi­on imite celle d’un igloo, certaines ont une fondation de pierre presque intacte. Il ne reste cependant aucune trace du toit jadis construit en os de baleine et peau de phoque.

Le retour à Pond Inlet se fait en fin d’après-midi sur une eau plus agitée et devant un soleil couchant. De retour sur la terre ferme, je vais à la rencontre des enfants du village qui s’amusent en patin, à pied ou à vélo, sur la glace nouvelleme­nt formée d’un étang qui leur sert de patinoire. Mon aventure en sol arctique tire à sa fin et mon séjour à Pond Inlet aura été bref mais mémorable. Retour prévu pour Montréal dans quelques jours avec escale à Iqaluit demain matin 8h30. À moins, bien sûr, que le brouillard ne s’en mêle...

Charmée par le Nord, j’y suis retournée quelques mois plus tard à l’occasion du Toonik Tyme, un festival annuel qui souligne le retour du printemps. Fascinant, le Nunavut offre un dépaysemen­t total, une occasion unique de se sentir au bout du monde dans son propre pays. Le territoire est encore peu développé touristiqu­ement, ce qui contribue à son charme, mais ce qui en fait aussi une destinatio­n onéreuse. Voici quelques bonnes adresses pour ceux qui se laisseront tenter!

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Iceberg Pond Inlet
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Vestiges d’une ancienne maison
Ville d’Iqaluit Vestiges d’une ancienne maison

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