Le Journal de Montreal

Erreur historique

- josée legault

Face à la résilience des libéraux et la montée de la CAQ, le rejet par Québec solidaire de tout pacte électoral avec le Parti québécois est une erreur historique. Ceux qui parmi les militants de QS en ont même profité pour traiter le PQ de «raciste» en ont aussi fait une erreur hystérique.

Pour Philippe Couillard et François Legault, c’est un cadeau du ciel. En chemin vers les élections du 1er octobre 2018, péquistes et solidaires reprennent chacun leurs billes. Déjà dysfonctio­nnelle, la «famille» souveraini­ste en sort plus fracturée que jamais. Les révélation­s entourant le reniement par QS de sa propre signature au bas d’une entente de principe sur le mode d’accession à la souveraine­té ajoutent à l’amertume ambiante.

Signée le 10 avril par les représenta­nts mandatés du PQ, de QS, d’Option nationale et du Bloc, cette entente sans précédent suivait des mois d’intenses négociatio­ns autour de la table du Oui-Québec (Organisati­ons unies pour l’indépendan­ce). Une telle entente tenait du miracle.

Pourquoi la direction de QS a-t-elle reculé aussi vite sur une entente que ses propres représenta­nts avaient ratifiée ?

UN MIRACLE

Les partis conviennen­t alors de la soumettre à leurs congrès respectifs. Le même 10 avril, le Oui-Québec est prêt à diffuser l’entente, mais QS exige qu’elle soit gardée secrète. Le 18 avril, QS décide qu’il «séquencera» ses débats. En mai, ses membres voteront sur le pacte électoral avec le PQ. Le vote sur l’entente souveraini­ste ne suivrait qu’en novembre. Bref, ça sent les grandes manoeuvres pour s’éloigner du pacte et de l’entente. Ce mercredi, Radio-Canada fait d’ailleurs état d’un étrange courriel. Reçu par le Oui-Québec quelques jours après le 10 avril, un des deux représenta­nts de QS l’informe que, même signée, l’entente n’aurait pas encore l’aval de la direction de QS.

Résultat: réunis la fin de semaine dernière, les militants de QS ont été gardés dans l’ignorance de cette entente historique alors qu’ils allaient voter sur un pacte électoral avec le PQ, lequel fut rejeté à la majorité.

MAUVAIS ROMAN

Cette histoire digne d’un très mauvais roman policier soulève une question troublante. Pourquoi la direction de QS a-t-elle reculé aussi vite sur une entente que ses propres représenta­nts avaient ratifiée? La députée Manon Massé le justifie par sa déception face au report du référendum à 2022 par le PQ. Cette donnée était pourtant connue pendant les discussion­s au Oui-Québec.

L’impression est plutôt que ce coup de Jarnac était volontaire. Québec solidaire courtisant maintenant les électeurs libéraux progressis­tes, toute entente avec les méchants péquistes sur une démarche souveraini­ste aurait fait fuir cette nouvelle clientèle plus vite qu’une souris devant un chat affamé.

Claudette Carbonneau, présidente du Oui-Québec, dévoilait hier le contenu de l’entente du 10 avril. Audacieuse, elle proposait un plan inédit de mobilisati­on populaire et transparti­san. Reposant sur la société civile, l’approche se voulait démocratiq­ue et franchemen­t républicai­ne.

Devant l’agonie de l’entente, Mme Carbonneau, de son habituel calme olympien, appelle les formations souveraini­stes à une «période de refroidiss­ement». L’ampleur du sentiment de trahison chez les péquistes est tel, qu’il soit dit ou non, que son appel risque fort de tomber à plat.

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