Un sédatif pour éléphants, la nouvelle « drogue du jour »
Le carfentanil est 10 000 fois plus puissant que la morphine
Les autorités craignent qu’un sédatif pour éléphants, 10 000 fois plus puissant que la morphine et ayant déjà fait des victimes aux États-unis, ne fasse son apparition dans nos rues.
«C’est très inquiétant, parce qu’on voit déjà une vague de surdoses avec de nouvelles drogues, comme le fentanyl. Donc, le fait que le carfentanil puisse s’ajouter à ça... On risque d’avoir davantage de surdoses», a averti Jessica Martel, du Groupe de recherche et d’intervention psychosociale (GRIP) de Montréal.
Le carfentanil, un tranquillisant utilisé depuis longtemps pour endormir certains gros animaux comme les éléphants, semble depuis peu être devenu l’ingrédient secret des chimistes clandestins. Ce sont surtout les consommateurs d’héroïne qui sont à risque, puisque du carfentanil y est mélangé pour «couper la drogue». La plupart en consom- ment à leur insu.
«C’est dangereux, parce qu’il suffit d’une erreur de dosage pour que ça entraîne une mort par surdose», craint Jean-françois Mary, directeur général de l’association québécoise pour la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues (AQPSUD).
« DROGUE DU JOUR »
En effet, selon la GRC, 20 microgrammes de carfentanil (un poids moindre que celui de quelques grains de sel), peuvent être mortels. Selon Santé Canada, le carfentanil n’aurait fait son entrée au pays sur le marché clandestin que cette année. Les autorités ont effectué en juin dernier une première saisie à Vancouver.
En Ohio, plus de 300 personnes ont fait une surdose depuis août. Mais rien n’indique que cette drogue ait fait son entrée au Québec. Aucune saisie n’a été effectuée aux frontières et aucune intoxication n’a été notée.
Malgré tout, la situation est prise suffisamment au sérieux pour que l’institut national de la santé publique du Québec (INSPQ) effectue une veille afin d’en surveiller la progression.
«C’est la drogue du jour, alors je porte un intérêt. De ce qu’on voit, ça ne serait pas présent chez nous. On croise les doigts pour que ça reste ainsi», a dit Éric Langlois, conseiller scientifique à L’INSPQ, qui suit l’évolution de plusieurs autres drogues.
PROTOCOLE STRICT
Si le carfentanil se retrouvait dans la rue, cela serait dévastateur, croit un spécialiste des éléphants.
«C’est dangereux, parce que ça affecte le système respiratoire. Chez les animaux, ça le ralentit. Le système cardiaque et respiratoire d’un humain n’est pas conçu pour éliminer une telle drogue», a dit le directeur des herbivores au Parc Safari, Francis Lavigne.
Le produit est si fort qu’un antidote doit ensuite être administré à l’animal pour aider son système à éliminer la substance.
«Un protocole est même prévu si le produit entre en contact avec la peau d’un humain. On doit lui donner un antidote et l’amener à l’hôpital», a-t-il dit.
D’ailleurs, la réserve de carfentanil des vétérinaires n’est pas un bar ouvert: un registre d’utilisation est obligatoire afin de prouver que le produit est utilisé pour de bonnes raisons, a confirmé M. Lavigne.