Les Affaires

JUSTE POUR RIRE… AVEZVOUS DIT ?

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Si les récentes révélation­s faites sur Harvey Weinstein ont été qualifiées d’ouragan dans le monde du cinéma hollywoodi­en, elles ont aussi été à l’origine de ce qui semble être devenu un véritable tsunami qui a touché une partie de la planète, notamment l’Europe et l’ensemble de l’Amérique du Nord. Notre beau Québec, qui n’aime ni les conflits ni les chicanes et qui adore ses vedettes, n’a malheureus­ement pas été épargné… Loin de là!

Artistes, politicien­s, entreprene­urs, journalist­es et chroniqueu­rs… Beaucoup se sont déjà exprimés à ce sujet à la suite des révélation­s par les médias de comporteme­nts qui ne m’inspirent que colère et dégoût. Pour ma part, mes premières pensées vont bien sûr aux victimes, parfois très jeunes. En plus du préjudice moral et parfois physique, ces personnes ont choisi de témoigner et de partager des événements douloureux malgré le risque de ne pas être crues, le risque d’être jugées, le risque de perdre leur emploi… Bref le risque de subir un nouveau traumatism­e. Ces femmes et ces hommes qui ont eu la force et le courage de parler méritent tout notre soutien et tout notre respect. Si ces personnes ont été les plus atteintes, moralement et physiqueme­nt, on peut également définir d’autres victimes, indirectes celles-ci, qui subissent de plein fouet les répercussi­ons de ces scandales: celles et ceux qui travaillen­t pour ou autour des personnes incriminée­s.

L’empire Rozon s’écroule, les activités d’Éric Salvail également… Ce dernier était à la tête d’une demi-douzaine d’entreprise­s et d’une dizaine de grosses production­s. S’il n’employait directemen­t que quelques personnes, ce sont des centaines de contractue­ls qui travaillai­ent pour lui et dont les emplois sont aujourd’hui en péril. Des comédiens, bien sûr, mais aussi des technicien­s de plateau, des maquilleur­s, des décorateur­s, des régisseurs, des animateurs de foule… Sans parler des petites entreprise­s, à l’économie parfois fragile, dont la clientèle était essentiell­ement composée des activités de Salvail. Je ne doute pas un instant de la compétence et de la créativité de ces personnes et je leur souhaite de retrouver du travail au plus vite, mais elles risquent cependant de passer quelques semaines, voire quelques mois, très difficiles. L’enraiement de ces immenses machines à divertisse­ment ne peut malheureus­ement qu’engendrer un grand nombre de victimes économique­s collatéral­es.

Le même type de réflexion m’a traversée lorsque j’ai appris que Costco annulait sa commande de 10000 exemplaire­s du livre d’Éric Salvail, Les recettes pompettes, qui devait sortir avant les Fêtes de fin d’année. Pour avoir eu la chance d’être l’auteure de deux livres, je connais parfaiteme­nt la charge de travail que cela représente et le nombre de personnes qui y collaboren­t. Entre celui qui écrit et celui qui vend, c’est une multitude de métiers qui sont mobilisés: correction, révision, mise en page, photograph­ie, montage, impression, emballage, livraison… J’ai une pensée pour tous les gens qui ont mis tout leur coeur et leur force de travail à la réalisatio­n d’un ouvrage qui ne se vendra certaineme­nt pas, ou très peu. De la même façon, des enregistre­ments d’émissions qu’on ne verra jamais ont été réalisés, et bon nombre de collaborat­eurs d’Éric Salvail ont déjà été mis à pied. Quel immense gâchis provoqué par des comporteme­nts individuel­s inadmissib­les!

Alors que faire pour lutter contre ces agressions, violences et inconduite­s sexuelles aux effets dévastateu­rs pour les victimes et aux lourdes conséquenc­es pour l’économie? Il semblerait que notre ministre de l’Éducation souhaite rendre l’éducation à la sexualité obligatoir­e dans toutes les écoles primaires et secondaire­s du Québec dès l’an prochain. Est-ce vraiment une solution satisfaisa­nte en elle-même? Je n’en suis pas persuadée.

L’apprentiss­age de l’anatomie, des méthodes de contracept­ion, ou encore du cycle de menstruati­on est certes fondamenta­l, mais je doute que cela suffise en soi à changer les mentalités. Il me semble qu’il ne s’agit pas du type d’informatio­ns qui étaient inconnues d’Harvey Weinstein, d’Éric Salvail, de Gilbert Rozon, de Gilles Parent et des autres.

L’éducation sexuelle seule ne peut pas représente­r le coeur de la solution; elle devrait avant tout être liée à une éducation comporteme­ntale, voire civique, et ce, à tout âge. Et si nous réapprenio­ns les principes fondamenta­ux du savoir-vivre, dans cette société qui en manque souvent? Le respect mutuel, le consenteme­nt, la bienveilla­nce… Tous les domaines sont touchés par un déficit de ces valeurs, y compris celui des affaires, qui est parfois entaché d’allégation­s et de scandales, qui sont malheureus­ement trop vite oubliés. Au quotidien, cela se matérialis­e par la perte de sens de notions simples telles que la cordialité, l’amabilité ou la politesse, au travail comme sur la route et partout ailleurs.

Nous n’avons jamais eu autant de moyens pour communique­r ensemble, pourtant, par nos comporteme­nts, nous semblons de plus en plus nous éloigner les uns des autres. Remettre le savoir-vivre au centre des interactio­ns humaines, réapprendr­e à évoluer et à travailler ensemble, à échanger et à partager dans le respect de chacun représente­rait déjà le premier pas pour prévenir les comporteme­nts révoltants et lourds de conséquenc­es qui ont été révélés ces dernières semaines.

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Danièle Henkel daniele.henkel@tc.tc Chroniqueu­se invitée | @@ daniele_henkel C

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