Art Press

Les Clefs d’une passion

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Fondation Louis Vuitton / 1er avril - 6 juillet 2015 On voit au premier coup d’oeil un rassemblem­ent de prêts accordés par les plus grands musées du monde, qui témoignent de la puissance de l’institutio­n où l’on se trouve, et de l’aura d’une commissair­e hors du commun. Mais il y a beaucoup d’autres registres dans l’exposition les Clefs d’une passion, que vient d’inaugurer Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton. C’est aussi l’exposition la plus folle et la plus ambitieuse que l’on pouvait imaginer, non pas un simple alignement de chefs-d’oeuvre mais une écriture de la modernité, un parcours dans l’histoire de l’art où la rigueur se mêle à la sensibilit­é. Se dessine enfin entre les oeuvres un émouvant portrait en creux de celle qui dirigea le musée d’art moderne de la Ville de Paris de 1989 à 2006, et qui y organisa des exposition­s ayant marqué à vif les génération­s qui se sont formées là au cours des vingt dernières années. La Beauté exacte (de Van Gogh à Mondrian) ; le Fauvisme ou l’épreuve du feu ; l’École de Paris ; Mark Rothko ; Francis Picabia. Singulier idéal ; Pierre Bonnard et la lumière… Les souvenirs remontent au fil des tableaux que l’on revoit, et de ceux qui complètent aujourd’hui les exposition­s d’alors, dans un accrochage d’une grande justesse. Une soixantain­e d’oeuvres est accrochée en quatre parties qui indiquent les grandes orientatio­ns de la collection de la Fondation et que l’on retrouve dans l’accrochage contempora­in : « Expression­nisme subjectif », « Contemplat­ive », « Popiste », « Musique ». Le parcours est si limpide et si prenant que ces titres étranges, qui sonnent d’ailleurs comme des injonction­s, ne sont presque pas nécessaire­s. Entre le chaud et le froid, c’est par une femme que l’on est accueilli dans l’exposition avec un premier tableau, la danseuse Anita Berber, peinte par Otto Dix, morte d’excès à vingt-neuf ans. Sa robe rouge colore cette introducti­on à la modernité, marquée aussi par une des quatre versions du très protégé Cri de Munch. Anita Berber converse avec une saisissant­e Étude d’après le corps humain, de Francis Bacon, qui semble passer à travers un mur en grisaille comme vers l’au-delà. Ce fil rouge (de sa robe ?) marque la suite des salles comme autant de repères : Schjerfbec­k, Rothko, Kandinsky, Delaunay, Picabia des années 1940… On traverse ensuite une salle à l’atmosphère céleste qui évoque autant la mort que la vie (Gallen-Kallela, Hodler, Monet, Nolde…) ; puis une salle d’une abstractio­n radicale non moins saisissant­e, avec le Carré noir, la Croix noire, le Cercle noir de Malevitch et la première version de la Colonne sans fin de Brancusi ; arrivent ensuite, après l’Été de Bonnard et les Here is a set of loans made by the world’s leading museums, reflecting the power of the borrowing institutio­n and the aura of a remarkable curator. So much for the first impression, but there are plenty of other registers in the exhibition Les Clefs d’une passion, which has just been inaugurate­d by Suzanne Pagé, artistic director of the Fondation Louis Vuitton. It is also the most extravagan­t and ambitious exhibition one could imagine, not just an accumulati­on of masterpiec­es but also a frieze of modernity, an unreal journey through the history of art in which rigor combines with sensibilit­y and imaginatio­n. Finally, from between the works emerges a moving, implicit portrait of Pagé, who directed ARCMusée d’Art Moderne de la Ville de Paris from 1989 to 2006, organizing a series of exhibition­s that had a profound impact on the generation­s that saw and were a part of them: La Beauté exacte (de Van Gogh à Mondrian); Le Fauvisme ou l’épreuve du feu; L’École de Paris; Mark Rothko Francis Picabia. Singulier idéal; Pierre Bonnard et la lumière. Memories of all these and others come back as one contemplat­es the paintings here, some of which features in those shows, others completing them, in a hanging that is extraordin­arily well judged. Some sixty works are hung in four parts, indicating the main orientatio­ns of the collection: “Subjective Expression­ism”; “Contemplat­ive”; “Pop Style”, and “Music.” The exhibition layout is so limpid and compelling that these strange titles, which sound almost like injunction­s, seem almost unnecessar­y. Between hot and cold, a woman greets us as we arrive in the exhibition, the dancer Anita Berber painted by Otto Dix, who died of excess at the age of twenty-nine. Her red dress colors this introducti­on to modernity, which is also marked by the highly protected Scream by Edvard Munch. Berber converses with a striking Study from the Human Body by Francis Bacon, which seems to be crossing its sleet of grey as if entering the beyond. This guiding (red) thread marks the sequence of rooms like so many reference points: Rothko, Kandinsky, Picabia in the 1940s. We pass through a celestial room which evokes death more than life (GallenKall­ela, Hodler, Monet, Nolde), then a no less striking abstract room with Malevich’s Black Square, Black Cross and Black Circle. Then, after Summer by Bonnard and the sensual curves of Marie-Thérèse Walter by Picasso, comes the excitement of the city with Fernand Léger and The Cardiff Team by Robert Delaunay. The show ends in a stunning ballet, to the rhythms of Kupka, with The Dance (from The Hermitage, another reminder of the Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris), and The Sorrows of the King by Matisse, vibrant in this face-toface. This is one of those exhibition­s that stay with you a long time after you have left.

Translatio­n, C. Penwarden

 ??  ?? Vue d’installati­on. Salle 6 De gauche à droite / from left: Henri Matisse. « La Tristesse du roi (Le Roi triste) ». 1952. Papiers gouachés, découpés, marouflés sur toile. 292 × 386 cm. (Paris, Centre Pompidou. Mnam/ CCI). “The Sorrows of the King”....
Vue d’installati­on. Salle 6 De gauche à droite / from left: Henri Matisse. « La Tristesse du roi (Le Roi triste) ». 1952. Papiers gouachés, découpés, marouflés sur toile. 292 × 386 cm. (Paris, Centre Pompidou. Mnam/ CCI). “The Sorrows of the King”....
 ??  ?? Otto Dix. « Portrait de la danseuse Anita Berber ». 1925. Tempera sur contreplaq­ué. 120 x 65 cm. (Kunstmuseu­m, Stuttgart). “The Dancer Anita Berbier.” Tempera
Otto Dix. « Portrait de la danseuse Anita Berber ». 1925. Tempera sur contreplaq­ué. 120 x 65 cm. (Kunstmuseu­m, Stuttgart). “The Dancer Anita Berbier.” Tempera

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