Le tourisme frappé de plein fouet
PARMI LES VICTIMES du carnage de jeudi soir, des Américains, des Tunisiens, des Suisses, des Allemands… Nice, haut lieu touristique de la Côte d’Azur, prisé par les vacanciers français, mais aussi étrangers, est sous le choc. La promenade des Anglais, qui longe sur plus de 7 km le bord de mer et qui abrite de nombreux commerces (palaces, hôtels, restaurants, etc.), a d’ailleurs été fermée, hier, pour une durée indéterminée. « En frappant la Promenade, on frappe un symbole international du rayonnement de Nice », a déclaré son anc i e n mai r e Chr i s t i a n Es t r o s i , aujourd’hui premier adjoint et président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Pas une rue, pas un hôtel, pas un café de la ville, pourtant réputée pour être la plus sécurisée de France, où le choc de cette nuit de cauchemar n’est venu hanter les conversations. « Dans le secteur du tourisme, l’heure n’est pas à faire les comptes, mais à apporter des soutiens », déclare, avec une certaine émotion, Julien Riera, le directeur général de l’Union pour l’entreprise qui regroupe, dans les Alpes-Maritimes, le Medef et la CGPME. Mais, « bien évidemment, les craintes de lendemains difficiles, et de commerces tournant au ralenti, sont très fortes ».
Avec près de 5 millions de personnes accueillies en 2015 (c’est, après Paris, la ville de France qui reçoit le plus de visiteurs chaque année), Nice représente à elle seule 40 % des flux touristiques de la Côte d’Azur, selon l’office de tourisme de la ville, et capte 1,5 Md€ de retombées économiques chaque année. Et l’impact négatif d’une telle attaque sur une clientèle composée pour plus de la moitié de Français aisés en vacances, mais aussi par nombre d’Américains, de Russes, de Britanniques (voir carte ci-contre) à « fort pouvoir d’achat » attirés par la mythique « French Riviera », risque d’être immédiat pour l’activité locale (150 000 emplois, di- rects ou indirects, liés au tourisme sur la Côte d’Azur). Surtout quand on sait qu’en moyenne un touriste français dépense 63 € par jour alors qu’un étranger, lui, dépense 97 €.
Perdre cette cl i entèle s erait donc particulièrement dommageable. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé avec celle venant de l’autre côté de l’Atlantique : depuis les attentats parisiens de 2015, la Riviera a perdu une partie de sa clientèle américaine, très soucieuse de ses conditions de sécurité (lire ci-dessous).
Tôt hier matin, ce VRP des patrons de la Côte d’Azur a fait le tour des syndicats professionnels du tourisme et des transports pour tenter « de collecter des informations sur le ressenti des uns et des autres ». Beaucoup de cafetiers niçois redoutent que les touristes désertent les lieux où l’on se rassemble. D’autres, les restaurateurs notamment, se demandent si certains ne vont pas rester calfeutrés chez eux, écourter leur séjour ou faire leurs valises après un tel événement. Sans compter des annulations en masse faites dès hier dans les hôtels de la ville (200 établissements, 10 000 chambres), rapporte un syndicat hôtelier niçois. « C’est la même réalité dans tous les pays frappés par les attentats : cela dissuade les touristes de venir pour un certain temps », constate gravement Julien Riera, pourtant persuadé que « Nice comme Paris après les attentats se relèvera et repartira vite de l’avant ».
« C’est la même réalité dans tous les pays frappés par les attentats »