Bardet, et maintenant le podium
Désormais 5e du général, l’Auvergnat épate dans la montagne. Il a tout pour terminer dans le trio de tête à Paris.
CASQUETTE enfoncée sur les oreilles, serviette autour du cou, Romain Bardet, coincé entre deux bus, se plie au rituel du home trainer après l’étape, sur fond de mont Blanc radieux. Nul autre arrièreplan ne siérait mieux au jeune Auvergnat qui foule des sommets inexplorés sur le Tour de France pour sa 4e tentative. Le leadeur d’AG2R-la Mondiale, encore 6e hier matin, est monté d’une marche au général. Au sommet de FinhautEmosson, premier des quatre volets alpestres, il a joué les premiers rôles hier, en plaçant une accélération aux 400 m, en réponse à l’attaque de Porte aux 2 km. Accélération fatale à Quintana lui-même (voir par ailleurs)…
Certes un peu distancé par Froome (Sky) et Porte (BMC), Bardet n’a pu se défaire d’Adam Yates (Orica), 23 ans, mais a creusé des écarts sur l’ensemble des autres favoris : 8’’ sur Aru (Astana), 17’’ sur Quintana (Movistar), 29’’ sur Mollema (Trek), 1’51’’ sur Valverde (Movistar).
Pour le frêle coureur de Brioude (Haute-Loire), un podium prend forme, après sa 6e place de 2014, dans le sillage de son coéquipier Jean-Christophe Péraud, 2e. « Au briefing, ce matin, le mot (NDLR : podium) a été lâché, confie Julien Jurdie, directeur sportif. Je leur ai dit que je ne voulais pas qu’ils aient de regrets lundi matin dans leur canapé. On ne dit pas que ça va être simple, mais on a tous dans l’idée de remonter sur la boîte à Paris. » L’intéressé ne s’enflamme pas : « Je ne fais pas de plan sur la comète. On verra au jour le jour. On voit qu’il y a pas mal de mouvements avec Movistar et Astana qui veulent décanter les choses. Je serai là pour essayer de tirer les marrons du feu… »
Bardet ne sera jamais surpris à fanfaronner. Il n’en reste pas moins que son parcours sans-faute jus- qu’ici, la sérénité et la confiance qu’il dégage inspirent confiance. « J’ai 25 ans, je commence à avoir de la bouteille, reprend-il. Je ne m’affole plus, j’en garde un peu. L’essentiel, c’est de se replacer quand ça démarre dans les derniers kilomètres. »
Il juge chacun de ses adversaires et leur performance avec honnêteté mais sans complexe : « Ritchie (Porte, 6e au général) reste juste derrière moi, mais demeure un adversaire très, très dangereux. Adam Yates (3e) est impressionnant. C’est vraiment un candidat sérieux pour l e podi um. Derr i è r e , ç a r e s t e ouvert. Mollema (2e) perd un peu de terrain, mais c’est un battant, il faudra aller chercher seconde par seconde. » Bardet ne se fait pas une montagne de croquer Quintana (4e), qui le précède désormais de 45’’. « J’ai eu une révélation une année où j’ai fait le Tour de l’Avenir avec lui (NDLR : 2011). Le petit Colombien d’Orica (NDLR : Esteban Chaves) avait gagné mais moi, je m’étais focalisé sur Quintana et j’avais réussi à le suivre dans les ascensions. J’attends de pouvoir refaire ça chez les pros, même s’il est beaucoup plus précoce que moi. » Pas si fou, ce Romain…
« Je commence à avoir de la bouteille. Je ne m’affole plus »
Finhaut-Emosson (Suisse), hier. Romain Bardet a été au contact des meilleurs et a même pris ses responsabilités en plaçant une attaque dans le final. Il lui reste encore trois étapes de montagne pour viser le podium au général.