« Les Français ont une envie de bonheur »
Jean Viard,
SOCIOLOGUE et directeur de recherches CNRS au Cevipof (centre de recherches politiques de Sciences-po), Jean Viard est l’auteur du « Triomphe d’une utopie. Vacances, loisirs, voyages : la Révolution des temps libres » (Ed. de l’Aube, 24 €). Il nous explique pourquoi, malgré le contexte, les Français partiront cet été. Etes-vous étonnés par les résultats du sondage Odoxa ? JEAN VIARD. Non, pas du tout. Nous l’avons déjà observé en 2008, lors de la crise économique. Les choses négatives donnent envie de débrancher, de s’aérer et de se reposer. Elles poussent plutôt les gens à être festifs. Cette réaction de vitalité est propre aux Français. Ils partiront en vacances plutôt que de rester dans leur cave. Pourquoi un tel attachement aux vacances d’été ? Les Français ont une envie de bonheur, de solidarité, de sortir de leurs problèmes ordinaires. Les vacances d’été sont le coeur de la vie affective. C’est le moment des premières fois pour les ados et le temps de rapports très forts, entre la mère et les enfants par exemple. Ce sont 60 % des gens qui partent également en tribu avec leurs proches. C’est une transhumance, le moment d’ouvrir une parenthèse affective que l’on partage avec les mêmes personnes, mais ailleurs. C’est une autre façon d’être ensemble. Y aura-t-il des changements de comportements ? Les vacanciers seront peut-être un peu plus prudents, favorisant les petites stations balnéaires et se tour- nant vers des endroits paisibles. La Bretagne, par exemple, qui, par son aspect simple, non clinquant, symbolise la protection. Leur conseillez-vous de décrocher de l’actualité ? Absolument ! D’abord parce que le terrorisme ne fonctionne que si les médias le relaient. Quel intérêt de tuer 9 personnes à Munich si toute la planète ne le sait pas ? Mais aussi parce que débrancher la télé pendant dix à quinze jours permet de s’apaiser. De se concentrer sur son couple, ses enfants et ses amis. C’est la meilleure solution pour pouvoir affronter l’année qui arrive. Elle sera probablement difficile, génératrice d’angoisse collective. Alors partons en vacances, nous n’en reviendrons que plus forts !
« Débrancher, c’est la meilleure solution pour pouvoir affronter l’année qui arrive »