Cheval Magazine

L’intoxicati­on aux glands

Les chevaux vivant à l’extérieur risquent d’être confrontés à des éléments toxiques. Parmi eux, les glands qui peuvent être à l’origine d’une intoxicati­on digestive grave. À quoi est - elle due ? Comment se traduit-elle chez le cheval ? Explicatio­ns.

- PAR VINCENT CHASSAING. PHOTOS : THIERRY SÉGARD (SAUF MENTION).

L’intoxicati­on par les glands est un phénomène rare. En fait il s’agit là d’une intoxicati­on à l’une des substances que l’on trouve dans certaines plantes : les tanins. Dans la nature les tanins sont sécrétés par des plantes pour se protéger contre les agressions. Les agresseurs peuvent être des parasites, des plantes mais aussi des animaux herbivores. Il existe des tanins toxiques et des tanins non toxiques. Ce qui veut dire que toutes les plantes qui contiennen­t des tanins ne sont pas forcément toxiques. Mais on trouve des tanins avec un effet toxique dans des plantes comme le chêne, le noyer, le châtaignie­r ou bien même la vigne. Cette substance est présente dans la racine, dans l’écorce, dans les bourgeons et dans les fruits. Dans la mesure où le gland est le fruit du chêne, il est riche en tanin et donc présente des risques en terme d’intoxicati­on.

Attention à l’automne

Les périodes les plus à risques à ce sujet sont principale­ment l’automne et secondaire­ment le printemps. L’automne est la saison la plus “difficile” car c’est à cette époque que les glands tombent au sol. Cela correspond aussi à la sortie de l’été et à une diminution des ressources alimentair­es pour le cheval. L’herbe se fait plus rare et certains chevaux peuvent “se rabattre” sur les glands. Il faut savoir aussi que les conditions climatique­s peuvent influer. Il existe des années où il y a une plus grande quantité de glands que d’autres. Les périodes de fortes pluies et de forts vents favorisent la chute des glands en grande quantité. Or, les fruits peu matures sont plus riches en tanins que les glands qui tombent à maturité. Au printemps, le danger ne provient pas des glands mais de la croissance des jeunes pousses de chênes sous forme de bourgeons. Les chevaux peuvent manger ces bourgeons directemen­t sur l’arbre, sur des jeunes plantes ou sur des branches tombées au sol. Tous les animaux ne sont pas égaux devant les tanins. Certaines espèces y sont plus sensibles que d’autres. Les espèces sauvages comme le cerf et le sanglier ont des enzymes qui leur permettent de digérer les tanins. Chez les chevaux, ces enzymes sont en moindre

quantité ce qui entraine une digestion insuffisan­te et provoque l’intoxicati­on.

Les symptômes de l’intoxicati­on

L’expression d’une intoxicati­on par les glands chez le cheval peut être variable : signes digestifs, signes urinaires et signes généraux. Le plus souvent, il y a des signes de colique associés à des diarrhées. La diarrhée est souvent noirâtre et nauséabond­e, elle peut alterner avec des signes de constipati­on. Dans les signes urinaires on retrouve une augmentati­on de la fréquence d’éliminatio­n des urines, elle peut être associée à la présence de sang dans les urines. Le cheval peut refuser de s’alimenter et présenter une diminution de la températur­e corporelle. Dans la phase de choc systémique, la fréquence cardiaque et la fréquence respiratoi­re augmentent de façon importante associées à des muqueuses congestion­nées (couleur rouge foncé). L’évolution peut se dérouler sur plusieurs jours mais aussi de façon plus subite en fonction de la quantité de glands ingérée. Comment savoir si un cheval est victime d’une intoxicati­on par les glands ? Outre les signes de colique avec plus ou moins de diarrhée, le cheval est abattu et présente des douleurs abdominale­s. Le meilleur moyen de poser un diagnostic est de rechercher et trouver des chênes avec d’importante­s quantités de glands sur le sol de la pâture. Les glands peuvent aussi être trouvés dans les crottins du cheval touché. L’interventi­on d’un vétérinair­e permet de compléter le diagnostic avec la présence de glands dans l’estomac lors de la vidange de ce dernier. Une analyse de sang permet de suivre le niveau d’intoxicati­on mais ne permet pas, avec les paramètres sanguins classiques, d’en connaître la cause.

La prise en charge

Il n’existe pas d’antidote spécifique pour contrer l’intoxicati­on. Le but est de limiter l’absorption de toxines

issues des glands non encore digérés et de limiter le développem­ent de l’intoxicati­on. La prise en charge ressemble à celle d’une colique classique. Une sonde est introduite dans l’estomac pour vidanger ce dernier et éviter que les glands récemment avalés ne passent dans le reste du tube digestif et viennent augmenter l’intoxicati­on. On profite de cette sonde pour hydrater le cheval avec de l’eau. Si le cheval ne présente pas de diarrhée, on peut ajouter un laxatif pour éliminer plus rapidement les glands ingérés. Pour neutralise­r une partie des toxines dans le tube digestif, on peut faire avaler au cheval, via la sonde, du charbon activé. Pour soulager les douleurs digestives des anti inflammato­ires peuvent être administré­s. Afin de limiter la concentrat­ion des toxines dans le sang, le cheval est perfusé en grande quantité. Ce qui permet, non seulement de le réhydrater, mais de diluer les toxines présentes dans le sang et de favoriser la sécrétion d’urine pour les éliminer. Au vu de l’état fébrile dans lequel le cheval se trouve avec ce type d’intoxicati­on, des antibiotiq­ues peuvent être prescrits pour limiter les risques d’infections secondaire­s. Le pronostic dépend du niveau d’intoxicati­on. Il est souvent difficile d’évaluer la quantité exacte de glands ingérés. Si le cheval survit après trois jours de traitement post intoxicati­on, le pronostic est bon. Certains éléments sont plus à risques que d’autres. Les chevaux présentant une diarrhée hémorragiq­ue ont un taux de survie plus faible que ceux avec une diarrhée simple. Le fait que des marqueurs sanguins comme les lactates soient très élevés diminuent le taux de survie. De même les chevaux âgés ont moins de chance de survivre que les autres génération­s d’âges. Passés ces premiers jours critiques, la guérison prendra plusieurs semaines et nécessiter­a un suivi du tube digestif pour surveiller les risques infectieux qui pourraient toucher la paroi digestive lésée à la suite de l’intoxicati­on. La prévention nécessite d’empêcher les chevaux d’accéder aux éléments toxiques du chêne lorsqu’ils vont au pré. Il peut être nécessaire de baliser, pour les délimiter, les zones où les glands sont tombés en abondance. Pour éviter que les chevaux soient tentés par les glands, il ne faut pas hésiter à apporter du foin dans les périodes où l’herbe se fait rare.

Les chevaux ne sont généraleme­nt pas friands de glands, mais quand les ressources alimentair­es sont plus faibles, ils peuvent être tentés par les fruits du chêne. Le taux de survie dépend de la quantité ingérée : lorsque le cheval en a absorbé de grandes quantités, le pronostic est souvent sombre.

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L’automne est la période la plus à risque, car c’est à cette époque que les glands sont accessible­s au sol par les chevaux. Vérifiez régulièrem­ent les pâtures.
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