Grand Seigneur

“JE DEVRAIS ÊTRE MINISTRE DE LA PATATE, ON GAGNERAIT DU TEMPS ! ”

Membre éminent du cercle officiel des Mecs à légumes*, le club qui réconcilie les hommes et les légumes, l’humoriste belge qu’on retrouvera dans Salut les Terriens (C8) à la rentrée est également un grand amateur de pommes de terre. Une interview gratinée

- A.V. : Entretien : Thomas Le Gourrierec Photo : Eddy Brière A.V. : A.V. : A.V. : A.V. :

Alex Vizorek, d’où vous vient cette passion dévorante pour la pomme de terre ?

— A.V. : Ce que j'adore à la base, c'est qu'elle ne hiérarchis­e pas les gens : tout le monde peut se retrouver autour d'un cornet de frites au cours d'un match de foot, de l'ouvrier à la chaîne au patron de la plus grosse entreprise belge. Donc pour vous, ça n’est pas un « vrai plat de pauvre », comme disait Coluche au sujet de l’artichaut ?

A.V. : Ah non, surtout pas ! Le gratin de pommes de terre, on le trouve dans les restaurant­s un peu huppés, et la pomme de terre version dauphine ou en robe des champs (cuite et servie avec la

peau, ndlr), ça fait quand même très dîner de l'Ambassadeu­r, non ? L’Union européenne a songé, tout récemment, à faire interdire pour raisons sanitaires la double cuisson qui fait toute la force de la frite belge…

Sérieuseme­nt ? Je n'étais pas au courant ! Il y a sûrement eu un embargo chez nous, pour éviter une révolution. La double cuisson, c'est notre secret pour donner à la frite le côté croustilla­nt à l'extérieur et moelleux à l'intérieur. Franchemen­t, parfois, je me dis que je devrais être ministre de la patate, on gagnerait beaucoup de temps. Il y a la question de la graisse utilisée pour la cuisson, aussi…

A.V. : Oui ! En Belgique, c'est primordial, les esthètes ne plaisanten­t pas avec ça. Je me souviens qu'il y a quelque temps encore, les Brasseries Georges, monument de la gastronomi­e bruxellois­e, offraient de choisir entre graisse d'oie, de boeuf ou de canard pour la cuisson de ses frites.

A.V. : Sur la place Jourdan, il y a cette friterie considérée comme la meilleure de la ville (la Maison Antoine). Lorsque Johnny Hallyday est en concert dans le coin, il demande souvent à la faire ouvrir après le spectacle. Alex Vizorek (France Inter, C8), photograph­ié par Eddy Brière pour Grand Seigneur et le cercle officiel des Mecs à légumes (prochaines soirées à Paris en septembre 2017).

C’est quoi le Stoemp (prononcer

« Stoump ») ?

Ah, le Stoemp ! C'est de la purée mélangée à un légume, ça vient du verbe néerlandai­s qui veut dire « pousser ». Je me souviens que je demandais à ma grand-mère de garder le gras des saucisses qu'on mangeait avec, pour le laisser ensuite couler dans un trou creusé au milieu. Un truc à faire se jeter le Docteur Dukan du haut du beffroi de la Grand-Place.

Peut-on comparer la politique française au Stoemp ?

Carrément ! La République en marche, c'est même un gros Stoemp. Il y a deux, trois pommes de terre difficiles à écraser au beau milieu, comme le Thierry Solère, qui est un peu moins bien cuit mais se fond quand même dedans quand tu pousses un peu. Pour le Manuel Valls en revanche, ça paraît plus difficile : c'est le petit morceau dur sur lequel t'as oublié d'appuyer.

Vous pourrez relayer cette délicieuse analyse à la rentrée, dans l’émission

Salut les Terriens (C8), puisque vous reprendrez la case de Stéphane Guillon… Consécrati­on ou patate chaude ?

Consécrati­on ! Quand j'ai commencé ce métier, je trouvais qu'il y avait deux cases idoines pour s'exprimer en tant qu'humoriste : aux côtés de Ruquier, où officiait Nicolas Bedos, ou bien chez Ardisson. Je vais tâcher de proposer un doux mélange de ce que j'ai fait dans toutes les émissions au sein desquelles je suis passé : un peu de culture comme chez Éric Naulleau sur Paris Première, de l'actu pure et dure comme dans

C l’hebdo sur France 5, et un brin de réflexion plus longue, comme chez Patrick Cohen, sur France Inter.

Tout cela avec moins d’acidité que vos prédécesse­urs Guillon et Proust...

Disons que je serai plutôt dans l'aigredoux !

Ça vous a coûté combien de patates de faire virer Guillon ?

A.V. : Aucune ! (Rires.) Franchemen­t, je ne m'attendais pas du tout à ce qu'on me propose cette place. Mais s'ils ont pris cette initiative, c'est qu'ils ont vu mon travail…

Avez-vous la permission de passer Bolloré à la mandoline, si l’envie vous en prend ?

A.V. : On ne me l'a pas dit comme ça, on m'a dit : « Tu pourras faire ce que tu veux »… ce qui, je pense, signifie la même chose. Après, je ne me suis jamais acharné sur Bolloré, j'ai toujours parlé de lui quand c'était opportun, seulement. Il n'y a pas de raison que ça change.

Et la radio ?

A.V. : Je continue la quotidienn­e Si tu écoutes,

j’annule tout, sur France Inter, avec Charline Vanhoenack­er et Guillaume Meurice. J'ai carrément mon bureau là-bas, un truc assez étrange pour un humoriste… Je suis un peu un fonctionna­ire du rire, en fait !

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