Grand Seigneur

“40 000 EUROS POUR UNE BOUTEILLE À L’ÉCRAN ”—

Malgré les interdits de la Loi Evin, beaucoup de producteur­s aimeraient boucler le budget de leur film en plaçant un flacon ici ou là.

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Une pratique qui peut rapporter des fortunes aux Etats-Unis.

« En France, le ticket d’entrée pour faire apparaître son domaine sur grand écran, que ce soit avec une bouteille présentée à l’image ou l’évocation du nom au cours d’un dialogue, oscille entre 15 000 et 40 000 euros », confie

Eric Touchat, directeur d’Ozco, agence de conseil en communicat­ion qui représente bon nombre de prestigieu­ses

maisons viticoles. « Nous recevons, chaque année, trois ou quatre propositio­ns d’agences de placement produit mais ne donnons pas suite, les montants étant trop importants au regard du rendu incertain ». Et tant mieux, car l’opération, censée permettre au réalisateu­r de diminuer ou optimiser son budget, est passible de sanctions administra­tives ! « Dans notre pays, le placement de boissons alcoolisée­s au cinéma est strictemen­t interdit par le Conseil Supérieur de l’Audiovisue­l »,

indique Olivier Poulet, avocat spécialisé. « Par ailleurs, la loi Evin peut amener à considérer que l’apparition d’une bouteille de vin constitue une publicité indirecte, ce qui relève alors de l’infraction. » Olivier Bouthillie­r, qui dirige Marques & Films, agence destinée à placer des produits ou enseignes à l’écran, reconnaît malgré cela qu’il lui arrive de « faire des propositio­ns », sans préciser les contrepart­ies.

Outre-Atlantique, la grosse machine américaine ne s’embarrasse pas avec toutes ces considérat­ions. « Là-bas, le placement produit rémunéré représente même 3 à 5% des 50 à 200 millions de dollars nécessaire­s aux grosses production­s », décrypte Jean-Patrick Flandé, à la tête d’une autre agence nommée Film Media. « Nombre de contrats sont passés avec des domaines américains, australien­s et parfois français ». Le légendaire Château Angelus, implanté à Saint-Emilion (Gironde), s’est ainsi invité dans la saga James Bond, avec Casino Royale en 2006 et 007 Spectre en 2015. « On nous

sollicite aussi pour d’autres tournages », explique Stéphanie de Boüard-Rivoal, directrice générale de l’illustre maison. « Nous procédons alors, la plupart du temps, à un échange marchandis­e. » Ce qui s’appelle… un bon placement.

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