Finances
La retraite du chef d’entreprise mode d’emploi
+ Cabinet Charles-Edouard,
Gecors. NUMERICOMPTA, Magnin-
Les mythes et les idées toutes faites ont un peu trop souvent encore la vie dure. Preuve en est notamment avec les chefs d'entreprise que le vulgus pecum assimile à classe de nantis, salaires exorbitants et parachutes dorés. Pourtant, il suffit de regarder les chiffres et les statistiques pour réaliser que, bien loin des élites du CAC 40, les patrons de PME et TPE perçoivent des rémunérations majoritairement inférieures aux cadres des grandes entreprises. Et pour ce qui concerne certains secteurs comme l'hôtellerie, ces mêmes chefs d'entreprise gagnent autant, voire moins, que certains de leurs collaborateurs. D'où la nécessité pour eux de penser à l'heure où sonnera leur retraite non seulement pour se préserver et anticiper d'éventuels coups durs, mais également afin de préparer la transmission de son entreprise. Décryptage des différentes étapes à suivre afin de vous permettre de prendre la pleine mesure de ce qui constituera votre futur train de vie et votre niveau de protection familiale.
Rien que sur l'Île-de-France, 223.000 entreprises (soit une entreprise francilienne sur trois) comptent à leur tête un dirigeant qui atteindra l'âge de la retraite au cours des dix années à venir. Et sur cet ensemble, 88.000 de ces entreprises emploient au moins un salarié. Tels se révèlent les chiffres dans une étude publiée par la CCIP sur la question « cessions-reprises d'entreprises en Îlede-France ». Lesquels chiffres, reportés sur l'ensemble de notre territoire, multiplient d'autant la problématique de la disparition d'un nombre alarmant d'entreprises faute de repreneurs avec, pour immédiates conséquences, une réelle menace pour l'emploi ainsi que la perte de savoir-faire liée aux départs de dirigeants expérimentés. Mais ce que cette situation révèle aussi concerne les modalités mêmes de ces départs à la retraite de plus en plus souvent vécus avec une sorte d'appréhension par rapport aux questions financières qui en résultent. D'où la nécessité pour le chef d'entreprise de préparer en amont ce changement de situation via un bilan retraite afin de connaître son niveau de pension probable et anticiper une date idéale pour quitter les commandes de sa société. Il faut en effet bien prendre conscience que le choix d'un départ anticipé ou retardé pèse sur le montant des pensions et sur la protection du conjoint dont, rappelons-le, les droits s'avèrent différents d'une situation à l'autre. D'où l'intérêt aussi pour les dirigeants d'entreprise d'adhérer aux dispositifs d'épargne salariale et aux contrats de retraite afin de compenser la chute prévisible de leurs revenus. Or, et c'est là où le bât blesse, de nombreuses études s'accordent à dire que plus la taille des entreprises est modeste, moins celles-ci mettent en
place des systèmes de retraite supplémentaire. Il en va quasiment de même pour l'épargne salariale le plus souvent ignorée ou mal appréhendée dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Une carence d'autant plus regrettable que le dirigeant salarié verra sur les seuls régimes obligatoires sa retraite chuter jusqu'à 60, voire 70% par rapport à ses revenus d'activité. Quant aux non-salariés, le constat peut se révéler encore plus pénalisant ! Il existe pourtant tout un ensemble de dispositifs spécifiquement voués aux PME et TPE qui profitent directement à leurs dirigeants. Assortis de déductions fiscales et d'exonérations de cotisations sociales, ces dispositifs permettent les meilleurs leviers à coûts minorés. En l'occurrence, la combinaison des dispositifs PEE/PERCO accessibles à tous les dirigeants ayant au moins un salarié avec ceux des articles 83/39 du Code Général des Impôts pour le statut salarié ou du contrat de retraite loi Madelin pour les non-salariés. L'idée étant d'adapter entre elles les solutions collectives afin que leur mise en place contribue à la performance de l'entreprise ou module les effets entre les adhérents en fonction de critères pertinents. Nous ne saurions trop recommander de recourir à l'expertise d'un conseiller en gestion du patrimoine afin de pouvoir faire les choix les plus judicieux en utilisant de manière optimale les enveloppes d'exonérations pour l'entreprise et les bé
néficiaires. Mais en tout état de cause, quel que soit l'effectif salarié, le statut du chef d'entreprise, la forme de l'entreprise et le secteur d'activité, la solution à mettre au coeur du dispositif retraite pour le chef d'entreprise est sans conteste celle de l'épargne salariale.
LES SOLUTIONS D'EPARGNE SALARIALE
1 – Le PEE et le PERCO
L'un et l'autre autorisent un abondement de l'entreprise pouvant atteindre 300% de l'épargne volontaire du bénéficiaire. Lequel abondement est déductible, exonéré de charges sociales et d'impôts sur le revenu. Eu égard aux limites imposées, il s'agit-là de la rémunération différée la plus performante et la plus économe en terme de coût. Pour ce qui touche à la différence entre ces deux dispositifs, elle tient surtout dans la durée de conservation de l'épargne : cinq ans au moins dans le PEE et jusqu'à la retraite pour le PERCO qui s'avère la seule solution d'épargne retraite autorisant une sortie en capital sans limite ni condition. En outre, ces plans peuvent recevoir les primes de participation et d'intéressement.
2 – Le dispositif Article 83 du CGI
Il s'agit-là d'un régime de retraite supplémentaire à cotisations définies déductibles et exonérées de cotisations sociales, là encore dans certaines limites. Les droits acquis le sont définitivement, même si le chef d'entreprise qui en était bénéficiaire continue une carrière non salariée.
3 – Le dispositif Article 39 du CGI
Ces retraites collectives à prestations définies sont souvent perçues comme une solution idéale. Seuls les salariés présents dans l'entreprise au moment de la retraite pourront y prétendre. Ce sont le plus souvent les cadres dirigeants qui en bénéficient. Pour prétendre à cette alternative, un régime collectif profitant à tous les salariés doit être mis en place. Le PERCO apparaît en ce cas la meilleure solution. Mais il ne faut cependant pas perdre de vue qu'une telle option se voit fortement imposée !
4 – Le contrat de retraite loi Madelin
C'est sans nul doute la solution la mieux adaptée au chef d'entreprise doté d'un statut de travailleur non salarié et se conjugue parfaitement à un PERCO. Constitué à titre individuel, le capital est versé uniquement
sous forme de rente viagère. Si les sommes sont déductibles des bénéfices imposables, elles ne se voient pas pour autant exonérées des cotisations sociales. Attractif sur le plan fiscal, ce dispositif se doit d'être apprécié en complément de l'épargne salariale et de l'existence éventuelle d'un PERP à titre personnel. Mais au-delà de ce dispositif, afin d'apporter une amélioration aux revenus retraite générés demeure bien évidemment :
LES SOLUTIONS D'EPARGNE INDIVIDUELLE
1 – L'assurance-vie
La voie certes la plus classique mais qui s'avère une forme de placement plus souple que les autres solutions retraite. Le capital doit cependant être bloqué au minimum huit ans pour bénéficier d'une exonération d'impôts sur les plus-values (hors charges sociales). Ce type de contrat permet une sortie en capital ou en rente au choix à échéance et la possibilité d'effectuer des rachats en cours de contrat. L'intérêt réside dans le fait que l'épargnant choisit luimême sa politique d'investissement. Laquelle peut se voir sécurisée sur les fonds en euros ou plus risquée sur les unités de comptes.
2 – Le Plan d'épargne retraite populaire (PERP)
Celui-ci donne la possibilité d'obtenir, à partir de l'âge de la retraite, un revenu régulier supplémentaire sous forme de rente viagère. Il peut également être reversé sous forme de capital à hauteur de 20%. Les versements sont déductibles du revenu imposable, dans la limite d'un certain plafond. En revanche, après le départ à la retraite, la rente viagère est soumise à l'impôt sur le revenu. Les cas de déblocage anticipé sont peu nombreux tels que l'expiration des droits à l'assurancechômage, l'invalidité et le décès.
NOTRE RECOMMANDATION
Il apparaît cependant plus sûr de ne surtout pas mettre « tous ses oeufs dans le même panier » ! Les différentes solutions d'épargne qui s'offrent aux chefs d'entreprise ayant toutes des avantages et des inconvénients distincts, le choix devra s'effectuer, nous insistons sur ce point, en fonction du profil personnel du chef d'entreprise. La vente de son fonds de commerce ou d'un bien immobilier peut parfaitement suffire à combler au moins en partie les besoins au moment de la retraite. D'où le très grand intérêt à bien les évaluer avant de souscrire à un produit retraite. Par exemple, si le contrat Madelin peut être très rentable, il faut toutefois éviter d'y engager la totalité de son épargne. En effet, s'il arrive que l'on ne puisse pas assurer une cotisation, on perd alors tous les avantages fiscaux qui s'y rattachent.