Les combines de Didier Raoult
En publiant en masse des études dans des revues contrôlées par ses amis, le spécialiste des maladies infectieuses décroche 10 millions d’euros de financement public par an.
Plus de 2 000 articles cosignés, plus de 72 000 citations… Avec sa productivité stratosphérique, le Pr Didier Raoult surclasse, de loin, Albert Einstein et ses 147 articles. De quoi flatter son ego, mais aussi gonfler les finances de son organisme de tutelle. Car, selon l’enquête menée par L’Express, l’institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection que dirige le « Mbappé de la médecine », décroche 10 millions d’euros de financement par an via le système d’interrogation, de gestion et d’analyse des publications scientifiques (Sigaps). Conçu au CHRU de Lille (Nord) en 2002, il octroie un certain nombre de points en fonction de l’activité des chercheurs. Ces scores permettent ensuite au ministère de la Santé d’attribuer des fonds. « Le dispositif s’appuie sur trois critères, détaille Patrick Devos, statisticien au CHRU de Lille et responsable du projet Sigaps. Les essais
cliniques à hauteur de 15 %, l’enseignement, à 25 %, et les publications, à 60 %. »
Ainsi, le Sigaps attribue de 1 à 8 points pour tout article publié dans une revue scientifique, en fonction de son prestige, et les multiplie par de 1 à 4 en fonction de l’importance de l’auteur dans la rédaction de l’étude. « Pour chaque point Sigaps, le ministère de la Santé donne 650 euros par an pendant quatre ans à l’établissement de tutelle du chercheur, indique Francis Berenbaum, chef du service de rhumatologie à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), à Paris. Un article rapporte donc entre 1 et 32 points, soit entre 650 euros et 20 800 euros ! Si un auteur obtient 20 points dans l’année, l’établissement reçoit 13 000 euros annuellement pendant quatre ans. » Forcément, plus une équipe publie, plus elle rapporte de l’argent. « Vous imaginez bien les dérives », poursuit le médecin.