Varm’up, L’atelier des Vieilles japs à Hyères
À 35 ans, Fabrice Popot a tourné le dos au travail en concession, après avoir été longtemps chef d’atelier à Paris puis à toulon, pour ouvrir en 2010 son petit atelier de mécanique générale sur 180 m2 à Hyères, dans le Var (83). L’objectif : le plaisir de choisir son boulot ! « Moins je fais de scooter, mieux je me porte… », déclare ce féru d’anciennes qui a longtemps roulé en compétition sur une Yam FZR 750 OW01 toujours exposée en vitrine pour façonner l’image de marque du magasin. de fait, Varm’up réalise 70 % de son activité (140 000 € de chiffre d’affaires) avec des machines japonaises des années 1970 et 1980, créneau sur lequel l’enseigne s’est spécialisée depuis le début avec une main-d’oeuvre facturée 54 € de l’heure « Avec ce type de motos, on a affaire à des passionnés qui connaissent leur moto et sont indulgents sur les délais, c’est appréciable. » La pénurie grandissante de savoir-faire sur ce type de machine lui assure une activité récurrente… et des horaires à rallonge, surtout en pleine saison. « L’été, je travaille de 7 h à 19 h et je cours chercher les pièces le midi. J’hésite à embaucher un second mécano car je sais qu’il faudra alors que je parte en chasse du boulot… » au risque d’exaspérer les concessionnaires locaux. « Ils font mine de m’ignorer, mais je sais qu’ils ne me voient pas d’un bon oeil. Quand je passe chercher des pièces, ils ne sont pas arrangeants. C’est dommage, car je ne joue pas dans la même cour qu’eux, j’opère sur un créneau de marché complémentaire. »
Clément Lecomte de Méca Lecomte. Agents ou pas, les petits bouclards doivent s’approvisionner en pièces comme en motos chez les concessionnaires locaux… ou d’ailleurs. Car les relations sont parfois tendues, surtout en province. « J’ai d’excellentes relations avec les concessionnaires Harley… sauf avec celui de ma région qui voudrait avoir le monopole sur tout ! », rigole François Leconte (Leuk Motorcycle), qui se fournit chez les concessionnaires d’autres régions et ailleurs en Europe. « C’est dommage car il y a du travail pour tout le monde : eux vendent les motos et nous on les répare. »
Clients des grosses enseignes
« J’ai de très mauvaises relations avec le Ducati Store de Bordeaux qui me considère comme un concurrent, donc je me fournis chez celui de Clermont-ferrand », abonde Emmanuel Ripault, de RP Moto à Pessac, dans la banlieue de Bordeaux, autodidacte spécialisé dans les machines de la marque de Bologne. « À une époque, un concessionnaire du coin mettait beaucoup de temps à me fournir alors que c’était toujours en stock lorsque que j’envoyais les clients chercher les mêmes pièces… »,
se rappelle Oswald Del Signore, de Oswald Moto, en région lyonnaise. Cette défiance n’est évidemment pas justifiée à leurs yeux.
« Ils nous voient trop comme des concurrents alors qu’ils gagnent de l’argent avec nous. On leur facilite le travail en remplissant parfaitement les commandes de pièces, avec toutes les références nécessaires, donc ça ne leur prend pas trop de temps alors qu’ils ne rétrocèdent très peu de leur marge »,
dénonce Sébastien Bezier, de Freebike, près de Nantes. Les tensions se cristallisent évidemment surtout sur de la vente de VN.
« Ce n’est pas justifié car on reste pour les concessionnaires un véritable support de vente qui leur permet d’atteindre leurs objectifs commerciaux et d’obtenir leurs marges arrière », insiste Bruno Sparza (MMS Racing). Malgré la perte récente du panneau Honda après 35 ans, Chinon Moto a vendu 15 machines de la marque ailée cette année. « Les politiques commerciales des grandes marques, et les investissements financiers qu’elles impliquent, ne correspondent pas aux petites structures comme la nôtre », rapporte Bernard Delobreck pour expliquer pourquoi il a quitté le giron de Honda.
Les relations sont parfois tendues entre ces petites enseignes et les gros concessionnaires du même secteur.
Comme les interventions mécaniques constituent l’essentiel de l’activité des petits bouclards, l’atelier est leur pièce maîtresse. Ils possèdent également aussi souvent un stock conséquent de pièces d’occasion.
Le dirigeant de l’enseigne (4 salariés, 900 000 € de CA) se contente ainsi d’être simple agent d’autres collègues. « On a notre notoriété et la confiance de nos clients qui, de toute façon, n’iront pas acheter ailleurs », complète-t-il. À Paris, la taille du marché comme la densité des réseaux de distribution font que la notion de concurrence semble mieux entrée dans les moeurs et la cohabitation plus facile entre concessionnaires et garages indépendants. Anthony Migonney de King’s Bike (3 salariés, 500 000 € de CA), enseigne fondée en 2013 à Clamart, en banlieue parisienne, confirme que pour sa part, cela se passe en général bien entre petits et grands sur la région parisienne. « J’ai de bonnes relations avec les concessionnaires des alentours, comme Espace Murit, avec lesquels je travaille. Je dois même dire qu’ils m’envoient pas mal de clients pour des travaux qu’ils n’ont pas le temps ou qu’ils ne veulent pas faire ».