Livre : Peter Beard, On the wild side
Entre Afrique et Occident, photographies, écriture et collages, paraît aujourd’hui une belle somme du travail hautement esthétique du photographe américain Peter Beard, aussi dandy que nomade.
770 pages de couleurs, de noir et de blanc, de paysages arides ou de jungle luxuriante, d’animaux sauvages et de guerriers massaïs, de rockeurs et de jolies femmes, le tout accompagné de coupures de presse, de notes et d’images de mode. À la fois livre de photos, oeuvre d’art et carnet de bord, cette superbe monographie était devenue introuvable après un premier tirage en 2006, très vite épuisé. Le mal est aujourd’hui réparé avec cette réédition en grand format d’un ouvrage fort en caractère, où l’on découvre le quotidien de Peter Beard, des États-unis au Kenya. Dans les années 60, le photographe américain a pu acquérir une ferme en face des monts Ngong, sur les bons conseils de Karen Blixen, célèbre auteure d’out of Africa. De son Hog Ranch, il observe les changements subis par le pays, tant du point de vue politique que démographique : la population passe de 5,5 à 30 millions d’habitants. “On goudronne le Pléistocène et c’est la fin de la faune. Le mercantilisme engloutit le cannibalisme; les lances et les flèches ont cédé la place aux mitraillettes AK-47”, écrit Peter Beard dans sa préface. Mais la splendeur de la nature règne, malgré tout. Dans ces pages, on admire non seulement les beautés locales ou les top modèles que le photographe fait venir des États-unis, mais aussi des singes, des girafes, des lions et, bien sûr, des éléphants, qu’il adore. Ce sens de l’esthétisme, Peter Beard le cultive depuis toujours. Enfant, il rêvait d’aventures et collait sur les pages de son journal intime des morceaux d’écorces, des papillons, des plumes d’oiseaux, du crin de cheval… Durant ses études en histoire de l’art à Yale, il fait ses débuts de photographe dans la mode, et côtoie la bourgeoisie comme le gratin arty. Parmi ses amis, Andy Warhol, qui dit de lui qu’il est un “Tarzan moderne”, Salvador Dali, Truman Capote ou les Rolling Stones – qu’il suivra même en tournée. À son actif, trois épouses et, parmi ses maîtresses, la soeur de Jackie Kennedy, la troublante Lee Radziwill. Mais l’afrique reste l’une de ses plus grandes passions. Si ses pérégrinations des sixties sont désormais bien loin pour lui qui coule des jours tranquilles à Montauk, sa vision du Kenya brille toujours par son avant-gardisme écologique, sa justesse et sa poésie. En témoigne ce livre-objet, racontant une nature dont la beauté est d’autant plus poignante qu’elle n’a jamais été aussi fragile.