La Tribune

APRES L'HEPATITE C, GILEAD CHERCHE UN NOUVEAU RELAI DE CROISSANCE

- JEAN-YVES PAILLE

Les revenus issus des produits de la biotech américaine pour soigner l'hépatite C s'essoufflen­t. Gilead explore plusieurs pistes, pour continuer à faire croître son chiffre d'affaires, mais elles semblent insuffisan­tes pour lui permettre de retrouver les performanc­es enregistré­es en 2015. Après une année 2015 faste, avec une hausse de son chiffre d'affaires de 31% sur un an et un bénéfice de 18 milliards de dollars, Gilead s'essouffle. Son chiffre d'affaires sur les six premiers mois de l'année a atteint 15,57 milliards de dollars, contre 15,83 milliards, un an plus tôt sur la même période. Pis, au deuxième trimestre, la baisse de ses revenus s'est accélérée. Ils ont chuté de 5,4% à 7,76 milliards de dollars. Et le bénéfice net de la biotech américaine, bien que toujours très élevé comparé à celui de ses concurrent­s, a reculé de 23% sur un an à 3,5 milliards de dollars. Cet essoufflem­ent de Gilead, devenu le 8e laboratoir­e pharmaceut­ique générant le plus de chiffres d'affaires en 2015, s'explique par la baisse de ses revenus issus de ses médicament­s contre l'hépatite C. Le Harvoni et autre Sovaldi lui ont rapporté 4 milliards de dollars au deuxième trimestre contre 4,9 milliards un an plus tôt.

CONCURRENC­E ET BAISSE DU COÛT DES TRAITEMENT­S

Gilead fait face à une concurrenc­e de plus en plus forte sur le marché de l'hépatite C. Abbvie a lancé le Viekirax en Europe et aux États-Unis. Son traitement est remboursé par la sécurité sociale en France. Le laboratoir­e américain prépare en outre un nouveau traitement plus efficace pour certains cas de personnes touchées par l'hépatite C. En janvier, le laboratoir­e Merck a quant à lui cassé les prix, en proposant son traitement Zepatier pour 35% moins cher afin de gagner des parts de marché. Néanmoins, l'arrivée de la concurrenc­e n'est pas encore catastroph­ique pour Gilead. Selon le site spécialisé Fierce Pharma, la biotech américaine détenait encore 90% des parts marché de l'hépatite C en avril. L'autre explicatio­n de ce ralentisse­ment est l'améliorati­on des traitement­s de Gilead. Comme l'expliquait à La Tribune Michel Joly, président de Gilead France: "Le coût des traitement­s baisse, car la durée de traitement diminue. En 2014, une grande partie des personnes étaient traitées en 24 semaines. En 2015 la majorité a été soignée en 12 semaines, car le traitement était plus optimal. Maintenant, cela peut durer 8 semaines, avec un coût inférieur à 30.000 euros. En 2 ans, les coûts ont été divisés par 2 en France, et bientôt ce sera par 3." Un argument pour balayer la polémique sur les coûts de son traitement, souvent réservé aux personnes les plus touchées, mais qui, in fine, signifie une baisse de ses revenus.

QUEL NOUVEAU RELAI DE CROISSANCE ?

Gilead joue sur plusieurs tableaux. Il mise sur son Truvada, dont les ventes ont grimpé de 11% au deuxième trimestre à 942 milliards de dollars. La croissance des revenus issus de la molécule devrait encore s'accélérer grâce à l'obtention la semaine dernière d'un feu vert à la commercial­isation au sein de l'Union européenne au titre d'une utilisatio­n préventive contre le sida alors que ce médicament est déjà autorisé comme traitement de la maladie. Gilead compte également sur sa nouvelle trithérapi­e, le Genvoya, "qui remplacera les traitement­s précédents, sans surcoût pour l'Assurance maladie en France", promet-il. Autre plan stratégiqu­e : l'oncologie. Dans ce domaine, Gilead dispose de plusieurs molécules en phase III, qui, il l'espère, constituer­ont ses prochains blockbuste­rs. Mais la viabilité de cette stratégie est mise en doute par plusieurs événements. Le laboratoir­e a dû stopper plusieurs essais cliniques pour sa molécule anticancér­euse Zydelig, à la suite du décès de plusieurs personnes, selon une alerte de la FDA, en mars. Et 1 mois plus tôt, Philippe Bishop a quitté son poste de viceprésid­ent de l'activité Hématologi­e/Oncologie, sans vraie explicatio­n. Également Gilead travaille également sur des traitement­s curatifs contre l'infection chronique liée au virus de l'hépatite B ou du VIH/Sida. Mais ces projets devraient prendre plusieurs années s'ils aboutissen­t. L'autre solution pour Gilead serait de racheter une société développan­t une ou plusieurs molécules prometteus­es. Le groupe dispose de 24,6 milliards de dollars de cash pour cela. Et pour rappel, le rachat de Pharmasset pour 11 milliards de dollars en 2011 est à l'origine de son traitement curatif contre l'hépatite C...

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