Le Figaro Magazine

L’affiche/Les passe-temps d’Eric Neuhoff

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Tout compte fait, le bonheur est simple comme bonjour. Il se décide, se porte en bandoulièr­e. Il faut donc se lever du pied droit. Il est bien évident qu’on n’a pas passé la nuit debout. Laissons ces manies aux esprits brouillons. La meilleure des choses consiste à être amoureux. Oups, on n’a plus le droit de dire ça. Verboten, harcèlemen­t ! La vieille formule chère aux marins, « une femme dans chaque port », a été remplacée par « un porc dans chaque homme ». Il n’est pas certain qu’il s’agisse d’un progrès. Cela ne nous empêchera pas de continuer à nous émerveille­r sur les jambes des Parisienne­s quand elles descendent d’un taxi : la droite tâtonne à l’aveugle vers le trottoir, la gauche suit, le buste apparaît – c’est mieux qu’une séance de film. Les sujets de contenteme­nt ne manquent pas. Sempé réédite un de ses albums sur les musiciens. Qu’il dessine des orchestres ou de petits bonshommes dans des pardessus trop grands pour eux, il vise juste. La vulgarité est totalement étrangère à ce génie en veste de tweed. Il sera permis de pousser la porte d’une librairie pour acheter les derniers Modiano. Joie de penser que nous aurons découvert à leur sortie Villa Triste ou Un pedigree. Les prix Nobel lisibles ne courent pas les rues. La façon idéale d’occuper sa soirée est d’aller applaudir Gaspard Proust sur les planches : une heure et demie de rire ininterrom­pu. Même dans la vraie vie, cela n’arrive jamais. Ce qui nous laisse à peine le temps de réserver des places pour la nouvelle pièce de Yasmina Reza, seul auteur dramatique digne de ce nom. Il y a de quoi faire. En plus, les Editons des Saints-Pères publient le manuscrit de Gatsby le Magnifique en fac-similé. Rien n’est plus beau que ces ratures au crayon, ces paragraphe­s barrés d’un trait noir, cette écriture qui change, cette lumière verte qui clignote en noir et blanc. C’est déjà Noël.

Les prix Nobel lisibles ne courent pas les rues

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