De Christian Lacroix
Le couturier met en scène magnifiquement « l’Empire des roses, chefs-d’oeuvre de l’art persan du XIXe siècle » au Louvre-Lens.
enchantés, version orientale. Ces folies ont tapé dans l’oeil de Christian Lacroix, qui signe, plus que la scénographie, une vraie mise en scène de ces palais iraniens d’antan. « J’aime bien ce qui est flamboyant, justifie le couturier reconverti dans les costumes de théâtre et les décors d’expositions. Je suis attiré par le va-etvient des périodes composites entre Orient et Occident, si manifeste chez les Qadjar. Ce n’est pas si loin de nous : certains portraits me font penser aux Arlésiennes, aux vieilles figures de ma région, la Camargue. Ma devise a toujours été :
Avec cet Iran-là, je suis servi. Je n’y suis jamais allé, mais je l’ai rêvé. Déjà comme couturier, je m’inspirais de ces broderies et ornements. »
Car un tableau qadjar ne se réduit pas à une peinture, les broderies apparaissent en effet sur la toile. Cestapis incandescents dissimulent des portraits très modernes. « Les liens avec l’Europe sont extrêmement forts tout au long du XIXe siècle », rappelle Gwenaëlle Fellinger, commissaire de l’exposition et l’une des rares spécialistes du sujet. Elle a choisi des robes et tenues masculines d’apparat, des coffres ou tabatières, des épées, des statuettes d’animaux déifiés comme le lion, des tapis qui semblent volants, des instruments de musique pour nous faire voyager dans cet art qui a fait entrer l’Iran dans la modernité. « Il y a un préjugé très fort selon lequel l’art islamique se serait arrêté au Moyen Age. Et selon un autre préjugé, l’esthétique compliquée des Qadjar, c’est moche et trop kitsch… », sourit l’experte. C’est beau et baroque, voire bien barré, comme ces femmes qui se maquillent d’une moustache avec du noir comme on soulignerait des sourcils, ces décors surchargés…
Une civilisation proche d’un bazar féerique, mais avec une gravité dans ces portraits de shahs qui nous feraient presque sourire avec leurs interminables barbes ou moustaches si l’on n’y distinguait une volonté absolue d’entrer dans l’histoire, celle de l’art surtout. « Il n’y avait jamais eu de synthèse sur eux », ajoute Gwenaëlle Fellinger. Cet Iran contemporain de Baudelaire et Rimbaud, aussi poétique, nous fascine. Et cette exposition a été rendue possible par un rapprochement entre le Louvre et l’Iran. Le musée français a prêté des oeuvres à Téhéran pour y montrer ses collections, et les Iraniens ont prêté à Lens leurs trésors qadjars. « L’art décoratif a autant de valeur que le grand art », justifie Christian Lacroix. L’opulence des salles de son palais rêvé, auquel il a donné les couleurs les plus vives, lui donne raison. « L’Empire des roses, chefs-d’oeuvre de l’art persan du XIXe siècle »,