Le Petit Journal - L'hebdo local de l'Aude

Le temps presse

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Son amie Jocelyne a essayé de joindre Mathilde car elle était désemparée. Mathilde n'a pris connaissan­ce de son message que beaucoup plus tard. Elle l'a aussitôt appelée. Jocelyne s'était violemment disputée avec son compagnon. Elle reconnaît que, fragilisée par un deuil douloureux, elle n'a pas supporté des remarques auxquelles elle n'attache aucune importance en temps normal. Elle a pris la fuite en laissant un mot, avec l'intention de rompre. Mathilde l'a écoutée, et lui a conseillé de prendre le temps de la réflexion. La communicat­ion a duré tard avant que revienne un semblant d'apaisement.

Au réveil, Mathilde a toujours les idées plus claires.

Voilà ce qu'elle a écrit à son amie.

«Ton compagnon t'a soutenue et accompagné­e pendant ton deuil et auparavant, lorsque tu as assisté cette personne proche tout au long de sa maladie. Puis il a explosé et ses paroles ont dépassé sa pensée. Ce qu'il dit n'est pas ce qu'il est. Dans l'émotion nous ne faisons pas toujours la différence. Peut-être avait-il besoin, lui aussi, de prendre du recul.

J'ai quitté l'homme de ma vie, trois fois alors qu' il avait été particuliè­rement odieux. Et je suis revenue. Sans demander ni donner d'explicatio­n. J'ai repris ma place auprès de lui et il a semblé en tirer la leçon... pendant un certain temps. Puis, les années passant, nos sujets de conflit sont devenus de plus en plus rares et lorsqu'il est mort notre entente était parfaite. Et à ce moment-là j'ai réalisé que j'aurais beaucoup perdu en le quittant.

Tu aimes cet homme. Alors retourne vers lui et dis-le lui. Ne demande pas, ne donne pas d'explicatio­n. Profite de ce temps de paix et de silence. Vous êtes idéalement complément­aires. Donc potentiell­ement en opposition. Votre associatio­n fonctionne bien. Il faut juste y rajouter un peu d'huile. Les mots ne sont que des mots. Personne ne doit se résumer à ce qu'il dit. On ne peut changer l'autre qu'en faisant évoluer le rapport qu'on a avec lui. C'est-à-dire en changeant soi-même. Avec plus d'ouverture, plus d'écoute. Avec du silence. Non pas celui du non-dit mais celui de la sérénité. Le nonagir.

Envisager la séparation pour se faire peur, pourquoi pas. Pour mesurer tout ce qu'on a à perdre. La séparation viendra sans qu'on n'y puisse rien. Mon amour est mort. Il m'a abandonnée et je lui en ai voulu longtemps. Mais, parce que j'étais revenue à chaque fois sur ma décision de tout casser, j'ai vécu dans nos dernières années le meilleur de ma vie qui m'anime encore aujourd'hui.

Il ne s'agit pas de te dire ce que tu dois faire. Mais de mettre en lumière ce qu'il serait dommage que tu n'aperçoives pas.»

Maintenant, tout de suite allez vers celui ou celle qui partage votre vie et dites-lui «je t'aime». Peut-être pas aussi brutalemen­t... Selon vos pratiques vous ne le formulerez pas aussi clairement mais vous aurez une attention, une parole. Ne manquez aucune occasion de le faire. Le temps presse.

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