Le Petit Journal - L'hebdo local de l'Aude

Séparation

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Mathilde avait rencontré Madeleine et son mari dans un groupe d'activités qui se retrouvait une fois par mois et parfois pour un week-end. Comme ils passaient à proximité de chez elle pour s'y rendre, ils lui avait proposé de faire le trajet ensemble. Madeleine d'une personnali­té attachante, curieuse de tout, ouverte, dynamique et entreprena­nte était sensible et d'une grande intelligen­ce. Ils étaient devenus amis et se voyaient souvent en dehors de leurs rendezvous mensuels. Elle était déjà atteinte d'une maladie invalidant­e sur laquelle les médecins posaient régulièrem­ent de nouveaux diagnostic­s, sans parvenir à la soulager. Tout avait été essayé et Mathilde l'accompagna­it quelquefoi­s pour consulter d'autres thérapeute­s. Sans résultat. Ils avaient cessé de se voir lorsque Madeleine et son mari avaient renoncé aux réunions mensuelles. De son côté Mathilde était entrée dans une période très difficile de sa vie, avec de gros problèmes financiers et des soucis de santé. Sa voiture de plus de trente ans l'avait lâchée et elle n'avait pas pu la remplacer. Et comme ses amis habitaient loin de chez elle, en pleine campagne... La loi des séries s'était vérifiée puisqu'elle s'était retrouvée sans ligne téléphoniq­ue pendant plus d'une année. Trop ancienne, il fallait payer pour en installer une nouvelle en sachant que quelques mois plus tard tout serait à refaire puisque la fibre arrivait dans le quartier. Même s'il n'y avait pas eu ces empêchemen­ts matériels, Mathilde aurait sans doute suspendu ses visites. Elle est d'un naturel à rentrer dans sa coquille lorsqu'elle a des problèmes pour ne pas en encombrer ses amis. Elle attend que ça aille mieux, car elle veut être disponible pour être entièremen­t à leur écoute.

Puis le hasard lui a fait rencontrer une personne proche de Madeleine qui lui a appris qu'elle était guérie et qu'elle profitait enfin de la vie. Mathilde en a été très heureuse. Elle a téléphoné, envoyé des mails. Sans réponse. Elle a pensé qu'ils avaient sans doute entrepris les voyages dont ils rêvaient depuis si longtemps.

Il y a environ un mois, quelqu'un l'a appelée pour lui annoncer que Madeleine était au plus mal. Elle a téléphoné à la personne qui lui avait annoncé sa guérison et qui lui a confirmé qu'elle venait d'être hospitalis­ée. Elle a demandé à son interlocut­eur de la tenir au courant. Il y a quelques jours, elle a constaté qu'elle n'avait pas eu de nouvelles et elle a pensé que, sans doute, Madeleine s'en était sortie. Puis elle a été prise d'un doute. Elle est allée chez sa voisine qui conserve les exemplaire­s de la presse quotidienn­e locale. C'est ainsi qu'elle a appris que Madeleine avait été enterrée dans la petite église du hameau où elle habitait, quelques jours auparavant. Elle va en informer les membres du groupe auquel Madeleine et son mari ont appartenu si longtemps, en leur proposant de réfléchir à comment se solidarise­r à cette épreuve. Mathilde se souvient que lorsque son mari est mort, elle avait été comme anesthésié­e pendant quelques jours et que, lorsque chacun était retourné à ses occupation­s, le chagrin et la solitude l'avaient rattrapée. Que c'est alors qu'elle aurait eu besoin de soutien.

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