Comme une bête
Le récit de survie est un genre emblématique de la littérature forestière. A l’image de l’étonnant document de Michael Finkel.
Qui n’a jamais, un jour de profond désespoir ou de grande lassitude, rêvé de prendre le large, de quitter la civilisation, une fois pour toutes? En 1986, un jeune américain originaire du Massachusetts décide d’aller jusqu’au bout de cette folie. Un matin, il prend sa voiture, roule pendant des heures et part s’installer dans les bois. Pendant près de trente ans, il va vivre seul, au milieu de la nature. Régulièrement, Christopher Knight quitte néanmoins sa cache pour s’introduire dans les maisons environnantes et y voler nourriture, livres et vêtements. Les habitants comprennent qu’il ne s’agit pas d’un voleur ordinaire mais plutôt d’un inoffensif ermite des temps modernes. Certains se prennent d’affection pour lui, d’autres veulent le capturer. Une légende prend alors forme autour de cet homme énigmatique. Lui qui avait souhaité passer sa vie dans l’anonymat devient bientôt le citoyen le plus célèbre de l’Etat du Maine. « Il y avait le monstre du Loch Ness, le yéti de l’Himalaya et l’ermite de l’Etang du Nord » , raconte Michael Finkel dans son récit. Auteur d’un autre livre remarqué ( Le Journaliste et l’Assassin), le journaliste américain a rencontré Christopher Knight après son arrestation qui mit fin à sa retraite. D’abord sous forme épistolaire puis au cours d’entretiens menés en prison et après sa remise en liberté, il revient avec lui sur cette expérience de vie : pourquoi et comment un homme s’affranchit-il des règles de la société pour devenir le « monarque de sa jungle personnelle » ? Mêlant l’enquête au récit de survie, Le Dernier Ermite interroge notre rapport à la solitude et va au coeur de ce qui fait de nous des humains. E. L.