L'Obs

Monsieur Moins

Faire de meilleurs produits en dépensant moins : c’est le credo de ce conférenci­er qui enseigne à l’université de Cambridge. Et s’il portait le capitalism­e de demain ?

- ARNAUD GONZAGUE QUENTIN HOUDAS

Aun moment, l’attention de Navi Radjou vous échappe. Son regard est dirigé vers les stands du marché qui se monte sur la place de la Bourse, à deux pas du café parisien où l’on s’est donné rendez-vous. « Vous avez vu ? demande-t-il, désignant un commerçant qui bricole une vieille planche pour empêcher son éventaire de tomber. Ça, c’est de l’innovation frugale ! » « Frugal » est l’adjectif dont ce conseiller en innovation de 44 ans s’est fait un mantra. Il l’invoque à l’université anglaise de Cambridge, où il enseigne, dans la multitude de conférence­s qu’il donne (notamment au TED, cette prestigieu­se tribune où s’expriment toutes les « nouvelles idées ») ainsi que dans les grands groupes qui l’invitent à parler (SNCF, Air liquide, IBM…). Il le résume ainsi : « Une entreprise peut faire mieux en dépensant moins de ressources matérielle­s, moins d’énergie, donc moins d’argent. Il s’agit d’être économe et économique. »

Par quel miracle ? En prenant à rebours les réflexes pavloviens des services de R&D (recherche et développem­ent), qui ont tendance à penser en termes de « toujours plus » – plus d’options, plus de technologi­es… – alors qu’ils pourraient imiter la vertu du forain parisien affairé sur sa planche en bois : l’ingéniosit­é. Un système D qui, Navi Radjou en est convaincu, pourrait ouvrir un nouvel âge du capitalism­e. « Ce n’est pas du low cost, prévient-il, mais une nouvelle manière d’envisager l’innovation. Nous sommes entrés dans une ère de rareté des matières pre-

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