La Serbie et les Balkans ont toujours été au milieu du jeu des grandes puissances. Est-ce fini ?
Ce n’est pas fini car nous avons toujours été la porte entre l’Est et l’Ouest et nous le sommes toujours. C’est une situation géographique qui devient, bien sûr, politique. Aujourd’hui encore en Serbie, on lit et on écrit en alphabets cyrillique et latin sans même s’en apercevoir. Notre privilège est de pouvoir comprendre la culture et l’esprit occidentaux aussi bien qu’orientaux. Voilà la face positive de l’histoire. Ce qui l’est moins, c’est que nous sommes coincés entre Est et Ouest. Mais il semble que la Serbie se dirige clairement vers l’Ouest, vers l’Union européenne ? Il est vrai que les hommes politiques au pouvoir en Serbie ont choisi l’option européenne, mais les partisans sont divisés presque à parts égales. Alors les choses peuvent basculer car la tradition d’amitié avec la Russie est profonde. Elle remonte au siècle, quand les Serbes se sont battus contre les Turcs. Beaucoup d’o ciers russes sont venus aider l’armée serbe. C’est pourquoi je ne sais pas si notre orientation européenne sera un jour très claire. On veut avoir de bonnes relations avec la Russie, ce qui équivaut à être assis sur deux chaises à la fois. Et nous avons un proverbe : « Qui s’assoit sur deux chaises tombe sur le sol. » Reste que l’influence de la Russie en Serbie n’est pas si importante. Elle est avant tout culturelle. Votre Premier ministre proeuropéen Aleksandar Vucic est un ancien ultranationaliste qui fut même ministre de l’Information de Slobodan Milosevic. Comment expliquez-vous cela ? Les politiciens sont des gens qui peuvent changer d’avis parce qu’ils ne sont pas sincères. Je suppose que Vucic n’était pas sincère comme nationaliste et qu’il ne l’est pas non plus comme démocrate. Je n’attends pas grand-chose de lui, juste de jouer son nouveau rôle d’acteur en faisant entrer la Serbie dans l’UE. Comment expliquez-vous l’e ondrement du camp démocratique en Serbie ?