Bob Wilson nous ennuie
LETTER TO A MAN, D’APRÈS LE JOURNAL DE VASLAV NIJINSKI, JUSQU’AU 21 JANVIER, 20H30, THÉÂTRE DE LA VILLE À L’ESPACE CARDIN, PARIS-8e, 01-42-74-22-77.
Découvert en 1971 au Festival de Nancy puis au Théâtre de la Musique à Paris, « le Regard du sourd », du jeune Bob Wilson (30 ans à l’époque), eut un retentissement incroyable. On se souvient de la boutade lancée par Roger Blin à Roger Planchon : « Je vois que “le Regard du sourd” n’est pas tombé dans l’oreille d’un aveugle ! » Le fait est que ce plasticien nord-américain a fortement et durablement influencé, non seulement Planchon, mais tous les metteurs en scène de l’époque. En restituant son caractère cérémoniel au théâtre occidental, il lui a redonné ses vertus sacrales. Par la suite il s’est avéré que le théâtre d’images était une impasse, et Bob Wilson a fini par appeler les mots à la rescousse. Mais on sent bien qu’il ne leur accorde encore qu’une importance très secondaire. Le Journal que le grand danseur russe Vaslav Nijinski a tenu en 1919, au moment où la folie commençait à le gagner, est pour lui un matériau idéal puisque décousu. Il sert de prétexte à de superbes tableaux tout à fait non signifiants. « Letter to a Man » séduira deux sortes de spectateurs : ceux qui n’avaient pas encore vu de spectacles de Bob Wilson ; et les fans de Mikhaïl Barychnikov (photo) qui, à bientôt 69 ans, témoigne toujours de l’élégance et de la formidable présence qui firent de lui l’un des plus grands danseurs du siècle. Les autres, malgré la brièveté de la représentation (1h10), s’embêteront poliment.