L'Obs

Marcelo Joulia

Cet architecte franco-argentin interpelle par ses multiples casquettes et ses projets à travers le monde : bureaux, stades, hôtels, boutiques de luxe… Et dompte aussi nos papilles en ouvrant des restos

- Par DORANE VIGNANDO

QUI EST-IL ?

Sa famille et ses amis le surnomment « El Loco », le fou. Voilà qui définit le bonhomme, stature imposante de Tarass Boulba et esprit affûté. Dans son agence parisienne et multidisci­plinaire baptisée Naço, il planche sur des projets aux quatre coins du monde : bureaux, villas privées, objets design, hôtels, restaurant­s… « Architecte DPLG, urbaniste, designer, graphiste, restaurate­ur… Les gens s’interrogen­t sur mon éclectisme, mais moi, j’essaie juste d’être au bon endroit, au bon moment », se justifie-t-il. Une philosophi­e qui lui réussit. Au-delà des chantiers pour ses clients, il est luimême entreprene­ur, propriétai­re d’une épicerie (El Galpon), d’une librairie latino-américaine (Cien Fuegos) et de néo-bistrots à la cuisine d’auteur (Unico, Virtus, Tondo) situés dans le triangle bobo-popu des 11e et 12e arrondisse­ments (près du marché d’Aligre), quartier chéri où il vit et travaille depuis trente ans.

D’OÙ VIENT-IL ?

Né en Argentine, Marcelo Joulia grandit à Cordoba avec ses quatre frères, puis migre vers le nord, dans la province du Chaco, sur les bords du rio Paraná, au sein d’une nature sauvage qui fixera à jamais son imaginaire. A 12 ans, les choses se gâtent. Ses parents divorcent et la junte militaire prend le pouvoir. Sa mère, militante engagée, prend ses enfants sous le bras et fuit vers la France. Années d’exil et de vaches maigres qui ne l’empêcheron­t pas, à 17 ans, de s’inscrire à Sciences-Po. Mais il préfère flirter avec le mouvement punk qu’arpenter la rue Saint-Guillaume. Au final, ce sera une licence de géo doublée d’une maîtrise d’architectu­re et d’urbanisme. Un rapide passage chez Philippe Starck, puis la création de son agence dans un ancien squat du 11e où il travaille à ses projets sur des tables à roulettes. Depuis, du béton a coulé : des prix d’architectu­re et de prospectiv­e, une seconde agence à Shanghai, et même la récompense de chevalier des arts et des lettres sous les ors de la République qui l’a accueilli.

QUE FAIT-IL ?

Impossible d’énumérer tous les projets signés Marcelo Joulia : des cinémas, des sièges sociaux, une cité numérique à Villeneuve-d’Ascq, un stade de foot en Argentine, des hôtels en Chine, en Mongolie, en Inde mais aussi à Nantes, Strasbourg ou Toulouse. L’architecte gastronome a également ouvert ses propres restaurant­s, s’entourant d’une belle brochette de jeunes chefs qui assurent aux fourneaux : Chiho Kanzaki et Marcelo di Giacomo pour Virtus, Teddy Merienne à la Ferme Saint-Simon (une institutio­n française) ou encore Simone Tondo, l’ex-chef star du Roseval qui officie chez Tondo depuis juin dernier, rue de Cotte. Avant d’ouvrir de nouvelles adresses gourmandes (une boulangeri­e notamment), Joulia soigne sa dernière lubie : dessiner des vélos vintage ou high-tech, bientôt commercial­isés dans une boutique rue de Cîteaux. « La mémoire, la pérennité, la durée de ce que je produis m’importent peu. Je suis un nomade. Je ne suis pas là pour marquer, je suis là pour tracer », dit-il. Et Marcelo Joulia trace vite.

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