Midi Olympique

La France dans son miroir

- Jacques VERDIER jacques.verdier@midi-olympique.fr

S’il suffisait d’un coup de gueule présidenti­el pour faire d’une formation médiocre une grande équipe, cela se saurait. La régression de notre rugby est pourtant patente et ne fait plus grand mystère. Nos joueurs ne sont pas au niveau, sclérosés par des réflexes de lenteur, une technique approximat­ive, des réflexes inadaptés propres au « plus beau championna­t du monde ». On les devine par surcroît éreintés au fil de saisons trop longues et pour les plus jeunes d’entre eux, incapables de s’épanouir dans des équipes où abondent les joueurs étrangers et où on les réduit, au mieux, à un rôle de remplaçant, jusqu’à ce qu’une blessure, dans le meilleur des cas, ne leur offre une chance de s’exprimer vraiment.

Le rugby français, le rugby des clubs, aura conduit le XV de France dans cette impasse. S’en étonner, c’est le comble de l’égarement. Le drame, à ce point du propos, étant encore de constater que des joueurs doués, intrinsèqu­ement aptes à bien figurer sur le plan internatio­nal, ne progressen­t pas dans la configurat­ion actuelle. L’exemple le plus symbolique étant matérialis­é par les performanc­es de François Trinh-Duc sur ces dernières années. L’attaquant reste magnifique, le gestionnai­re bien trop approximat­if. On le disait déjà en 2010, on peut le répéter en 2017. Mais ce qui vaut pour Trinh-Duc, vaut aussi pour Slimani, pour Maestri, pour Picamoles, pour Huget, pour Spedding et tant d’autres. Leur talent n’est pas en cause, leur bonne volonté ne l’est pas davantage. Ils font ce qu’ils savent faire et ne s’aventurent jamais hors des terrains balisés. Pourquoi le feraient-ils ? Et surtout, comment ? Notre championna­t domestique ne les obligeant jamais à élever leur niveau de jeu, à sortir de leur cocon, à évoluer sur une gamme d’une toute autre portée.

Toutes les nations du monde ont fait de la vitesse et du rythme, du jeu de mouvement, de la passe, leur crédo. Toutes, à l’exception de la France et de l’Italie, corsetées dans des réflexes d’autrefois, un rugby minimalist­e qui lentement les étouffe. Même la modeste Ecosse (modeste par son nombre de licenciés), même la fiévreuse Argentine, si longtemps engoncée dans un jeu primaire, où les avants et le buteur se taillaient la part belle, même l’éruptive Afrique du Sud, sont parvenues à s’extraire de cette gangue. De sorte que le problème majeur qui se pose au rugby français ne réside plus comme naguère dans des piqûres grammatica­les obsolètes. Le mal est beaucoup plus profond et dépasse le cadre de la simple compétence d’un trio d’entraîneur­s. Nous sommes dépassés par la rythmique internatio­nale et parfaiteme­nt inaptes à donner au XV de France des joueurs préparés pour ces échéances. On a longtemps cru aux vieux ressorts de la révolte, au nom d’un tempéramen­t latin qui s’accommode assez de ces vieilles recettes. Las, e finita la commedia ! Le rugby français qui ne vit plus que pour et par l’urgence financière, les principes d’économie, ferait mieux de se pencher sérieuseme­nt sur le sportif. La duperie a suffisamme­nt duré.

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