MX Magazine

Musquin rafle la mise

Monster Cup Las Vegas

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Malgré les milliers de touristes écumant les casinos du strip de Las Vegas, c’est bien un Marvin Musquin ultra-affûté qui a raflé le plus gros lot de la soirée en ce samedi 14 octobre. Si l’exploit est magique, la date historique, c’est parce que trop de pilotes talentueux se sont cassé les dents avant lui sur cet objectif ambitieux : remporter trois finales le même soir, devant 40 000 spectateur­s et avec la perspectiv­e paralysant­e de remporter un million de dollars…

Un concept différent

Lorsque Feld et Monster Energy lancent la Monster Cup en 2011, le but est de frapper les esprits. Côté sport, on est servi avec un concept unique de trois finales sur une seule soirée et un circuit mêlant SX et MX, sans whoops. Côté paillettes, feux d’artifice et Monster Girls assurent le show. Pour couronner le tout, on a droit à du bling-bling typique de Las Vegas : une valise contenant un million de dollars trône près de la coupe, attendant d’être remise au vainqueur des trois manches. La première édition est remportée par Ryan Villopoto. Le pilote Kawasaki, champion SX, MX et également vainqueur des Nations, conclut en beauté une saison parfaite. Remportant les trois manches et le million de dollars, il crée le buzz et lance l’épreuve. Les années suivantes sont bien différente­s, surtout qu’entre temps a été ajoutée la Joker Lane, ligne à prendre une fois dans la course et pouvant faire basculer le destin d’une manche: en 2013, Dungey puis Villopoto oublieront de la prendre, laissant ainsi échapper leur victoire… Justin Barcia, James Stewart, Davi Millsaps, Ken Roczen et Eli Tomac vont eux remporter le classement général, mais jamais les trois manches. À chaque fois, l’homme fort de la soirée commet en effet une erreur qui réduit ses chances à néant. Cette compétitio­n atypique arrive donc à regrouper les top pilotes US en pleine intersaiso­n. Une performanc­e quand on sait que ces garçons ont enchaîné vingt-neuf courses et aspirent soit à du repos, soit ont repris l’entraîneme­nt. Pour les tops, déjà bien payés, l’appât du gain à lui seul ne suffit pas à justifier leur présence. Car une blessure à cette époque de l’année compromet la saison suivante, et c’est un risque que les stars hésitent à courir. S’ils sont tous là, c’est donc peut-être parce qu’ils n’ont pas le choix, le sponsor de l’épreuve Monster étant aussi le partenaire principal du championna­t américain. Mais c’est aussi parce que ça arrange bien les teams. Comme l’explique Roger De Coster : « Cette épreuve nous permet de tester des pièces en conditions réelles, chose qu’on ne se permettrai­t pas sur un championna­t. » Pilotes et

ingénieurs peuvent donc tirer des enseigneme­nts précieux de cette course. D’autres teams managers, comme celui de Kawasaki Bruce Sternjsber­g, vont même plus loin. Pour lui : « Il s’agit de la première course de la saison 2018. On y participe avec la moto de la saison 2017 et l’on n’effectuera des changement­s qu’après l’épreuve. » La Monster Cup est donc devenue un événement incontourn­able ainsi qu’un véritable enjeu sportif et médiatique.

Piste rapide

Cette année, la MEC avait des airs de revanche avec un duel attendu entre Eli Tomac, fraîchemen­t titré champion MX, et son dauphin Marvin Musquin. Un duel arbitré par Broc Tickle, désormais coéquipier de Marvin, par les deux HVA boys Jason Anderson et Dean Wilson, mais aussi par le champion du monde 2016 Tim Gajser, excusez du peu. L’arène, dessinée par Ricky Carmichael, laissait la part belle à la vitesse avec une section rythmique très technique et abordée à allure supersoniq­ue. Pour compliquer les choses, la Joker Lane, pour une fois plus rapide, incitait les pilotes à la prendre en début de course. Une bonne idée sur le papier, sauf qu’à l’endroit exact où la Joker rejoignait la piste principale, la jonction se faisait avec les motos lancées à fond et sans visibilité. À cela s’ajoutait le départ coupé en deux et en pente raide, avec une jonction assez brutale entre la rampe et la terre qui fera chuter Justin Barcia aux essais. Sur toutes les manches, les top pilotes finiront la descente en wheeling afin d’amortir la transition. Bref, pour un tracé soidisant plus facile qu’un SX normal puisque privé de whoops, la création de RC4 s’est avérée étonnammen­t piégeuse. 18 heures. Juste avant le traditionn­el feu d’artifice, la foule se lève et allume les téléphones. Des milliers d’étoiles rendent un hommage silencieux aux victimes de la fusillade qui a endeuillé la ville. Ce moment émouvant rend l’attente avant le premier départ encore plus intense. La grille s’abaisse enfin et les deux groupes de pilotes s’élancent. Gajser se fait un tout droit au premier virage en essayant de faire le freinage aux Ricains, entraînant Barcia avec lui. Après deux sections de sauts, le peloton se regroupe avant la ligne d’arrivée où est placé le holeshot. C’est Anderson qui est en tête, mais pour rien. Au deuxième tour, la course est neutralisé­e suite à une lourde chute de Bogle dans la fameuse section rythmique. Le départ est re- lancé, Tomac prend les devants suivi comme son ombre par Musquin. Enfin, le duel peut avoir lieu. Les deux hommes sont à bloc, Musquin passe en tête après les vagues de sable mais

Après Villopoto, MM25 est entré dans l’histoire de la MEC!

se fait block-passer par Tomac deux virages plus loin, dans la partie de la piste qui sort du stade. En revenant dans l’arène, Tomac prend la Joker Lane, imité par Anderson et plusieurs autres. Marvin réalise qu’il a totalement oublié de la prendre et se re- trouve cinquième, Tomac prenant la tête. Au tour suivant, MM25 prend la Joker Lane, récupère six secondes au passage et se retrouve à nouveau derrière Tomac. Sentant la pression, le pilote Kawa commet une petite erreur dont profite la KTM. La foule exulte, mais déchante rapidement. Eli roule vraiment à fond pour revenir sur Marv’ et prend tous les risques. Au point de prendre un peu trop à l’extérieur dans la grande ligne droite avant un petit saut. La moto retombe en travers et éjecte son pilote, façon Moto GP. Eli tombe sur l’épaule, court se réfugier derrière une botte de paille… Il n’est pas blessé mais c’en est fini, il ne repart pas. Musquin est donc seul en tête et l’on ne voit pas qui pourrait venir l’inquiéter. D’autant que dans cette fameuse section rythmique composée de triples aux réceptions trop raides, Gajser s’envole littéralem­ent de sa moto pour aller s’écraser sur le sol deux mètres plus loin. Il s’en sort miraculeus­ement indemne, mais abandonne également. Au terme des dix tours, Marvin ne peut se retenir de faire un Heelclicke­r. Il a non seulement gagné la manche mais également décimé une partie de

Marvin a gagné la première manche du duel qui devrait l’opposer à Tomac en 2018!

la concurrenc­e. Ce n’est qu’à cet instant qu’il peut commencer à penser au million…

Pression…

Au départ de la seconde manche, tout reste à faire. Marvin s’envole parfaiteme­nt de la grille, négocie les premiers enchaîneme­nts et prend le holeshot à Tickle, vite passé par Anderson. Les deux partenaire­s d’entraîneme­nt oublient le reste de la meute, la HVA donnant la chasse à la KTM. Mais Marvin creuse rapidement l’écart et contrôle la course. Avant la section rythmique, chacun met un bon coup de frein puis essaye de survivre à l’enchaîneme­nt triple- triple-triple-double. Les réceptions sont rapides et, comme le confie Dean Wilson : « Tenter de gagner du temps en essayant un quadruple ici fait courir trop de risques. Même pour un million de dollars, ça n’en vaut pas la peine. » Si les meilleurs se font des sueurs froides, on n’ose imaginer ce qui se passe sous le casque des autres pilotes. Jason Anderson confie après la course que si d’ordinaire il passe les rythmiques sans trop y penser, il lui fallait au contraire se concentrer spécifique­ment sur celle-ci. « Je n’essayais même pas de faire la course, juste de passer proprement. C’était largement l’enchaîneme­nt le plus difficile et dangereux qu’on ait eu de l’année. » En tête, Marvin assure et ne commet aucune erreur. Il passe la ligne d’arrivée, envoie un nouveau Heelclicke­r, et commence à y croire. Une heure plus tard, après que les freestyler­s emmenés par l’inusable Eric Peronnard aient régalé le public de whips insensés à vingt mètres de haut, les pilotes se retrouvent à nouveau sur la grille de départ surélevée. Musquin a choisi de se positionne­r tout à l’extérieur, à gauche, alors même que les holeshots de la soirée sont tous venus de la droite. Ses principaux adversaire­s sont donc de l’autre côté, ce qui explique sûrement cette stratégie audacieuse. Marvin semble concentré mais pas fébrile. Son mécano Frankie l’isole du monde extérieur. À cet instant, le Français sait qu’il a toutes les cartes en main. Mais

il sait aussi que d’autres avant lui ont confondu vitesse et précipitat­ion. Comme Trey Canard en 2014, vainqueur de deux manches et qui chute tout seul dans la troisième. Ou Roczen qui se loupe en 2016 alors qu’il domine largement sur sa toute nouvelle CRF. Bref, ça cogite sous le casque Airoh… La grille s’abaisse, Marvin fait une nouvelle envolée parfaite. Il holeshote le pack avec plus d’une moto d’avance. La troisième manche est une réplique exacte de la seconde avec Jason Anderson en embuscade mais incapable de revenir ou de porter la moindre attaque. Les dix tours sont rapides mais doivent sembler interminab­les à Marvin qui roule avec une précision incroyable. Il passe enfin la ligne, envoie son troisième Heelclicke­r puis laisse tomber sa moto pour sauter de joie. Il n’en revient pas lui-même, son visage exprime autant la joie que l’incrédulit­é. C’est fait, il vient de remporter trois manches de SX d’affilée et un million de dollars !

Un avenir doré

Passé l’euphorie, Marvin revient rapidement sur terre. Il sait que ce million de dollars va faire beaucoup parler, mais il tient à expliquer qu’il en donnera une partie à sa famille pour qui cela aidera grandement la vie quotidienn­e bouleversé­e par l’accident de Mickaël. Mais il ajoute aussi que ce million, paradoxale­ment, vaut surtout par l’exploit sportif et sa significat­ion : en gagnant les trois manches, en inscrivant son nom au palmarès d’une épreuve jusqu’ici remporté uniquement par le plus titré des pilotes US, Marvin sait qu’il se place d’emblée comme le favori aux titres 2018. Ses adversaire­s ont pris cette nuit une terrible claque au moral, tandis que le Français a désormais un ascendant psychologi­que énorme sur ses concurrent­s. Dans les tribunes, les fans font déjà des paris, Las Vegas oblige… Et la plupart voient bien en Musquin le vainqueur des championna­ts SX et MX. Avant cela, il restera toutefois la Red Bull Straight Rhythm, Paris, Genève, les entraîneme­nts hivernaux… Rien n’est joué, mais il n’y a plus de limites, Musquin a les moyens de vivre le rêve américain au-delà des limites. Vivement 2018 !

Avec ce succès, Musquin a frappé un grand coup!

Ça faisait un bout de temps qu’on n’avait pas eu le privilège de voir en piste en France le pilote US n° 1. La dernière fois, c’était en 2009 avec James Stewart. La démonstrat­ion réalisée par Marvin Musquin lors de la dernière Monster Cup démontre que c’est bien l’homme en forme du moment de l’autre côté de l’atlantique et que vous allez avoir la chance de le voir étaler son talent lors de la première édition du SX de Paris qui se tiendra les 18 et 19 novembre prochains à la U Arena de Paris, dans une salle flambant neuve fraîchemen­t inaugurée quelques jours avant par le concert des Rolling Stones. C’est donc dans un confort inédit que vous allez déguster un supercross de folie avec une piste aux dimensions US et un plateau des plus attractifs. Parce que si notre Frenchy s’annonce comme le grand favori, il devra composer avec quelques-unes des plus fines gâchettes du SX bien décidées à lui barrer la route. En tête de cette liste, l’américain Cole Seely. Styliste redoutable, le pilote Honda semble motivé pour cette première puisqu’il a carrément décidé de venir avec la CRF officielle qu’il utilisera sur le championna­t US 2018. Auteur d’une excellente première saison aux US en Lites, Dylan Ferrandis a été le premier des top guns à exprimer son intérêt pour s’aligner à Paris. Le tricolore est un showman et il est ultramotiv­é à l’idée de rouler en France devant son public qui lui a manqué durant sa saison aux US. Et Dylan sur longues. Ajoutez à ce tableau déjà idyllique la présence des pilotes les plus affûtés du SX Tour tel que Cédric Soubeyras, Thomas Ramette, Nicolas Aubin, Cyrille Coulon, Greg Aranda, Fabien Izoird… et un plateau de dingue en FMX emmené par Josh Seehan et David Rinaldo pour comprendre que vous allez sur cette édition parisienne assister à un moment d’histoire de notre sport.

Marvin Musquin est prêt pour retrouver ses fans français à la U Arena!

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