La villa Picasso à M€, c’est tout ?
Le mas Notre-Dame-de-Vie, à Mougins, a été adjugé 20,196 M€, hier matin lors d’une audience éclair au palais de justice de Grasse. Son précédent propriétaire avait tenté d’en obtenir 170 M€…
Fin de l’histoire ? Pas tout à fait. L’homme d’affaires Rayo Withanage, adjudicataire de la dernière maison de Picasso à Mougins, a deux mois pour rassembler les fonds. Ce Néo-Zélandais d’origine sri-lankaise, qui vit entre New York et Londres, vient de déposer au tribunal de grande instance de Grasse un chèque de consignation de 2,019600 euros. Soit 10 % du montant de son acquisition. Il est fort peu probable que cette transaction achoppe sur une nouvelle difficulté. Mais une précédente opération de gré à gré, conclue en décembre 2016, n’était jamais allée à son terme, faute pour M. Withanage d’avoir bouclé le financement. Une minute et demie. C’est le temps qu’il a fallu à la chambre de l’exécution immobilière pour examiner le dossier, hier matin. L’audience s’est déroulée « calmement, dans un silence de cathédrale », selon Me Maxime Van Rolleghem, avocat grassois de la banque néerlandaise Achmea. Il espérait un meilleur résultat, Notre-Dame-de-Vie méritant selon lui une offre autour de 30 millions d’euros. « Je pensais que les super-riches de notre planète s’intéresseraient aux enchères, comme ils le font pour les tableaux.» Les traces de l’artiste justifiaient à ses yeux une surcote : « C’est lui qui a conçu et agrandi la maison, dont il a aussi dessiné les jardins. »
La bonne affaire ?
La somme obtenue hier risque de ne pas couvrir les dettes de l’investisseur néerlandais qui s’était offert le mas en décembre 2007 auprès de Catherine Hutin, la fille de Jacqueline Roque, seconde épouse de Picasso. Grand amateur du peintre, celui-ci avait contracté un prêt in fine sans parvenir à rembourser le capital ni même les intérêts. «Sur la base de
‘‘ rapports d’experts privés évaluant le mas à plus de 50 millions d’euros, il a emprunté auprès de plusieurs banques pour un total de près de 40 millions », indique Me Van Rolleghem. Ses tentatives de cession à des montants astronomiques (jusqu’à 170 millions d’euros) ayant échoué, la plus-value escomptée ne s’est jamais concrétisée. Le nouveau propriétaire faitil une bonne affaire ? « J’ai eu son épouse au téléphone, il est satisfait», commente sobrement son représentant Me Marc Provenzani, avocat au barreau de Grasse. « M. Withanage obtient le bien qu’il voulait. Quant au prix, il sera assorti de frais très importants. Il n’est pas sûr qu’une vente de gré à gré se soit révélée moins avantageuse. » De leur côté, les spécialistes du groupe Michael Zingraf avaient estimé le bien proprement dit à 15 millions d’euros. Sans compter la charge affective, difficilement chiffrable, liée à la présence de Picasso de 1961 jusqu’à son dernier souffle, le 8 avril 1973. Il reste sur place une sorte de masque sculpté dans la pierre d’un pilier, ainsi que des traces de peinture et un peu de mobilier d’atelier. On ignore les projets de Rayo Withanage à Mougins. «Il se peut que ce soit une résidence secondaire », glisse Me Provenzani. Une résidence secondaire de grand luxe : 2 400 m2 habitables, quinze chambres, douze salles de bains, des terrasses et une superbe piscine, le tout sur un domaine de 3,3 hectares.
C’est Picasso qui a conçu et agrandi la maison, dont il a aussi dessiné les jardins. ”