Discographie
Si le Voodoo Child n’a publié que quatre opus lors de sa courte course terrestre, les bacs
— physiques comme virtuels — fourmillent aujourd’hui de très nombreuses parutions posthumes. Exploration. “Are You Experienced”
(Mai 1967) Ramenée de New York par Chas Chandler, la météorite Jimi Hendrix ravage bien vite Londres, accompagnée par le tempétueux Mitch Mitchell aux fûts, ainsi que le métronomique Noel Redding à la basse. Après trois simples fondateurs (“Hey Joe”, “Purple Haze” et “The Wind Cries Mary”), “Are You Experienced” enfonce le clou. Dans un vertige sonique dopé par de foisonnants effets stéréo, les premiers classiques s’enchaînent : la tension sexuelle de “Foxy Lady”, l’urgence de “Fire”, le blues enfumé de “Red House”, sans oublier la trippante “Third Stone From The Sun” ou l’exquise “May This Be Love”.
“Axis: Bold As Love”
(Décembre 1967)
Coincé entre deux mastodontes de la discographie hendrixienne, “Axis: Bold As Love” n’est pas le plus célébré, mais possède un charme secret, R&B aérien teinté de psychédélisme (“One Rainy Wish”, “Wait Until Tomorrow”). On y apprécie la quasi hard rock “Spanish Castle Magic”, la beauté majestueuse de “Little Wing”, la dylanienne “Castles Made Of Sand”, la très Cream “She’s So Fine” (chantée par Redding) et la magnifique “Bold As Love”, dotée d’un solo absolument fantastique.
par Jonathan Witt “Electric Ladyland”
(Octobre 1968)
Le magnum opus. Double album réalisé avec un soin maniaque par Hendrix, il propose une odyssée à la gloire de la sixcordes, mystique, jonglant entre les styles. Du magistral blues “Voodoo Chile” (avec Stevie Winwood et Jack Casady) au voyage spatio-temporel de “1983... (A Merman I Should Turn To Be)”, en passant par la reprise transfigurée de “All Along The Watchtower” et l’introduction à la wah wah de la terminale “Voodoo Child (Slight Return)”, on touche à la perfection musicale.
“Band Of Gypsys”
(Mars 1970) Rejoint par ses vieux copains Billy Cox et Buddy Miles, Jimi profite des concerts du nouvel an 1970 pour solder une vieille querelle contractuelle : il doit livrer un album à Capitol. C’est aussi le témoignage d’une refondation stylistique, le trio explorant une veine funk magnifiée par la voix soul de Miles (“Changes”, “Message To Love”) et propulsés par sa frappe puissante, métronomique. En prime, le manifeste anti-guerre du Vietnam, “Machine Gun”, sans doute le sommet personnel du sixcordiste, totalement virtuose.
“The Cry Of Love”
(Mars 1971)
Premier album posthume assemblé par Eddie Kramer et Mitch Mitchell suite au tragique décès du cosmique gaucher, “The Cry Of Love”, livré sous une magnifique pochette, réunit les morceaux les plus aboutis du projet “First Rays
Of The New Rising Sun”. Le résultat est un disque efficace, avec des merveilles comme “Angel” ou “Night Bird Flying”.
“Rainbow Bridge”
(Octobre 1971)
Comme son titre ne l’indique pas, “Rainbow Bridge” n’est pas la bande originale du long-métrage homonyme, mais plutôt une suite de “The Cry Of Love”. Globalement plus faible et hétéroclite que son prédécesseur, on y découvre néanmoins l’atmosphérique instrumental “Pali Gap” et la survoltée “Room Full Of Mirrors”.
“First Rays
Of The New Rising Sun”
(Avril 1997)
Peu avant sa mort, Hendrix, enfermé dans ses studios Electric Lady, travaillait intensément sur un projet de double album nommé “First Rays Of The New Rising Sun”. On ne saura jamais quel aurait été le résultat définitif, mais ses proches ont ici tenté de le reconstituer (malgré “My Friend”, hors sujet). Cette somme comporte ses derniers flamboyants coups d’éclat, entre rock’n’roll, funk et R&B : “Ezy Rider”, “Dolly Dagger” ou “Izabella”.
“South Saturn Delta”
(Octobre 1997)
Publié sous une pochette discutable, cet assemblage de titres de différentes périodes recèle de plaisantes surprises comme le morceau-titre, instrumental funk gorgé de cuivres, “Message To The Universe” et son final orientalisant (par le Gypsy Sun And Rainbow), et les reprises métamorphosées de “Bleeding Heart” ou “Drifter’s Escape”.
“BBC Sessions”
(Juin 1998)
Sous ces triomphantes coupes afro se cache une sélection de titres crépitants captés pour la vénérable radio britannique. Elle vaut surtout pour ceux qui furent peu souvent joués par le trio : “(I’m Your) Hoochie Coochie Man” (avec Alexis Korner à la slide), “Can You Please Crawl Out Your Window?” de Bob Dylan, “Day Tripper” et de frétillants instrumentaux comme
“I Was Made To Love Her” (avec un jeune Stevie Wonder à la batterie) et la fougueuse
“Driving South”.
“Live At Woodstock”
(Juillet 1999)
A neuf heures du matin, le Gypsy Sun And Rainbow (annoncé comme l’Experience…) monte sur la scène du festival de Woodstock. En face, quelques dizaines de milliers de hippies s’éveillant dans une mare de boue. Si le désormais sextette n’est pas complètement en place, Jimi brille de mille feux et se montre très inspiré, comme sur “Woodstock Improvisation” ou bien sûr sa légendaire version de “Star Spangled Banner”.
“The Jimi Hendrix Experience”
(Septembre 2000)
Enveloppé à l’origine sous une fine pellicule de velours mauve, ce plantureux coffret représentait alors pour les fans, autant que la découverte du tombeau de Toutânkhamon. Au programme : des extraits de concerts emblématiques (dont l’Olympia en première partie de Johnny Hallyday), des prises alternatives, des inédits délirants (“Gloria”, “Star Spangled Banner” avec Silver Apples, “Blue Suede Shoes”, “Come Down Hard On Me”).
“Blue Wild Angel: Jimi Hendrix Live At The Isle Of Wight”
(Novembre 2002) En pleine nuit, Jimi monte sur la scène du festival de l’île de Wight, pour ce qui sera l’une de ses dernières apparitions. Plutôt décriée, cette performance est certes parfois laborieuse (son grésillant de temps en temps, interférences...) mais mérite une sérieuse réévaluation, ne serait-ce que pour cet enchaînement inaugural entre “God Save The Queen” et “Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band”, la brillante version d’ “All Along The Watchtower” et une crépusculaire “Machine Gun” de vingt-deux minutes. La suite offre un excellent panaché de standards et de nouvelles compositions (“Midnight Lightning’) rarement captés en concert.
“Winterland”
(Septembre 2011)
Les trois soirs de concert au Winterland de San Francisco, en octobre 1968, sont considérés, à raison, comme l’apex scénique de l’Experience. Cette brillante synthèse le démontre amplement, avec la surpuissante “Tax Free”, la reprise instrumentale de “Sunshine Of Your Love” et d’autres pièces un peu moins courantes telles les sublimes “Little Wing”, “Manic Depression” et “Are You Experienced”. En prime, Jack Casady (Jefferson Airplane) s’invite à la basse sur “Killing Floor” et “Hey Joe”.
“People,
Hell And Angels”
(Mars 2013) Comme “Valleys Of Neptune”, mais beaucoup plus intéressante, cette collection de titres, souvent inédits, se focalise sur l’après Experience et l’année 1969. Y figure de véritables pépites funk sur lesquelles irradie le génie rythmique d’Hendrix, comme les démentes “Let Me Move You” et “Mojo Man”, respectivement chantées par le saxophoniste Lonnie Youngblood et Albert Allen, et enfin “Crash Landing”, dotée d’une performance herculéenne de Rocky Isaac aux fûts.