Rock & Folk

Jim Scott

Le producteur, ingénieur, mixeur star de la crème du rock US (Tom Petty, Lucinda Williams, Wilco), revient sur l’enregistre­ment de “Fade Away Diamond Time” et sa relation avec Neal Casal, qu’il a lancé et suivi tout au long de sa carrière. Interview.

- RECUEILLI PAR LéONARD HADDAD

Rock&Folk : Neal Casal parlait de vous comme de son mentor. Comment l’aviez-vous découvert ? Jim Scott : Je produisais un groupe de metal pour Megaforce, un label du New Jersey pour lequel son ami Gary Waldman bossait. C’est lui qui m’a passé la cassette avec les premières démos de Neal.

R&F : Vous le voyiez alors plus comme un songwriter ou comme un guitariste ?

Jim Scott : Oh, un songwriter, sans hésiter. Guitariste, bien sûr qu’il était bon ! Mais un type qui veut juste jouer des solos de guitare n’écrit pas des textes pareils. Les lire maintenant, avec le recul, est déchirant.

Un disque frontal

R&F : Aux USA, pourtant, les gens ignorent souvent qu’il a fait des disques sous son propre nom… Jim Scott : C’est vrai. Après “Fade Away Diamond Time”, le label l’a lâché. Neal s’est installé en Californie et je l’ai pris comme session man sur les disques que je produisais. Une bonne vingtaine. C’est ainsi qu’il s’est rapproché de gens comme James Iha ou Ryan Adams, et qu’il a développé son style.

R&F : Pour “Fade Away Diamond Time”, vous aviez une “vision” de la façon dont ça devait sonner ? Jim Scott : Franchemen­t, non. On était en mode guérilla, on trimbalait le matériel dans mon van, l’orgue Hammond, les consoles… On s’est retrouvé dans une maison pas loin de Los Angeles, on a branché les instrument­s, et c’était parti. De manière générale, j’aime les disques où tout est clair, bien délimité. “Fade Away…” est un disque frontal. “Maybe California”, “These Days With You”... quand Neal les jouait seul à l’acoustique, elles sonnaient presque comme sur l’album.

R&F : Vous considérez “Fade Away Diamond Time” comme un album de country-rock ? Jim Scott : Disons qu’il appartient à l’univers étendu de ce qu’on appelle l’Americana. Pour moi, entre la guitare et la voix de Neal, le Hammond et le son sec qu’on a obtenu sur la batterie et la basse, “Fade Away...” est surtout un sacré disque de rock. Ce qui m’a toujours frappé avec ses albums, c’est que même sur enceintes, tu as l’impression de les écouter au casque. Ils ont une présence et une clarté extraordin­aires.

R&F : Vous aviez l’impression de faire un disque important ?

Jim Scott : Je pensais que ça allait être énorme ! Et ce n’est pas quelque chose que l’on ressent souvent. Neal faisait le lien avec le songwritin­g classique de l’âge d’or, qui avait été englouti par le disco, le punk ou la new wave. C’est cette simplicité imparable qui faisait qu’on y croyait aussi fort.

R&F : Quelle a été votre réaction quand les choses ont déraillé ?

Jim Scott : J’étais très mal. On avait tant d’ambitions... J’ai vu ça pour pas mal de groupes, ils enregistre­nt, partent en tournée et à leur retour, pschiitt, tout part en fumée. C’est terrible, dévastateu­r. Beaucoup ne s’en remettent jamais. Mais Neal, lui, a refait un album tout seul presque dans la foulée.

R&F : Mais celui-là, comme les suivants, n’est jamais sorti aux USA. C’est tout de même insensé… Jim Scott : Je n’ai jamais rien compris à cette industrie... Chez nous, on dit : “It’s not show friends, it’s show business...” Heureuseme­nt qu’il y avait l’Europe et vous, les Français. Même maintenant, pour cette interview, ça me touche beaucoup que vous portiez le flambeau. Il le mérite.

“Je pensais qu’il serait énorme”

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