Didier Le Fur : « La loi du talion poursuit les derniers Valois »
Quand apparaît l’idée d’une malédiction et qui la propage ? Toute mort accidentelle devant être justifiée, la propagande était déjà à l’oeuvre lors de la disparition d’Henri II. Le parti catholique en a fait un martyr, et les protestants, qui espéraient que son successeur, François II, adopte une politique plus tolérante, attendaient pour voir. Mais l’exécution d’Anne du Bourg, la répression après la crise d’Amboise puis la mort de François II relancent l’idée qu’une volonté divine s’exprime. Laquelle ? C’est la loi – et la malédiction – du talion. Henri II meurt d’une atteinte à l’oeil parce qu’il a voulu voir mourir Anne de Bourg ; François II, d’une affection à l’oreille parce qu’il n’a pas écouté la vérité du protestantisme ; Charles IX s’étouffe dans son sang parce qu’il a versé celui des protestants à la Saint-Barthélemy. Bien sûr, la propagande catholique a une autre interprétation et loue ce roi qui a lavé la France de la tache hérétique. Et pour Henri III ? Les catholiques célèbrent son assassinat par Jacques Clément. Ce dernier est considéré comme un saint pour avoir débarrassé le royaume du tyran qui a éliminé les frères de Guise. Dès lors, ce sont les catholiques, qui vont propager l’idée d’une malédiction et d’une vengeance divine. Les protestants, quant à eux, considèrent que Dieu a supprimé peu à peu les méchants rois pour permettre à un prince de tolérance de monter sur le Trône : Henri IV. Malédiction ou décadence, tous conviennent que les Valois devaient disparaître.
tiqué par la Ligue pour ses positions jugées trop conciliantes à l’égard du camp adverse et son autorité est menacée par les Guise. Sous la pression, en 1585, il signera l’Édit de Nemours qui chasse les huguenots de France et ouvre les hostilités avec le Béarnais. C’est le début de la huitième guerre de Religion. Néanmoins, le roi supporte mal l’hégémonie des Guise. Comme il se sent lui-même physiquement menacé, il a ordonné l’exécution, les 23 et 24 décembre 1584 à Blois, du duc de Guise et de son frère le cardinal. Ce faisant, il a mis le feu aux poudres : la France catholique se révolte de plus en plus contre celui qu’elle considère comme un tyran. Une campagne de calomnies sans précédent achève de l’affaiblir. Henri III s’allie à son héritier, Henri de Navarre, et aux protestants pour rétablir l’ordre. Le 1er août 1589, il est tué par un moine, Jacques Clément, sous les applaudissements catholiques. Certes, à présent, « les protestants se méfient d’Henri IV mais, grâce à l’Édit de Nantes, il est regardé comme un libérateur, note Didier Le Fur. Ils vont se réapproprier la propagande catholique : Henri III était un mauvais roi. Ses prédécesseurs étaient faibles et dégénérés. Ils propagent l’idée d’une malédiction, d’un châtiment divin contre les derniers Valois ; cette fois, pour installer une nouvelle dynastie plus tolérante à l’égard du protestantisme et porteuse d’un renouveau, d’une reconstruction du royaume. »
La France catholique se révolte contre Henri III, considéré comme un tyran. Une campagne de calomnies sans précédent achève de l’affaiblir.