« Moi, je sais que Star Wars, CE N’EST PAS VRAI.
le monde, répond- il. Avant et après le procès, une frange de supergeeks a sérieusement crié au scandale et s’indignait qu’on instrumentalise l’histoire, qu’on ne respectait pas la vérité de la ction. C’était fou ! »
Le pénaliste s’est chargé de distribuer les rôles. Président de la cour : Me Hervé Temime. Avocat général : Me Kami Haeri. À la défense : Mes Antoine Vey, Patrice Spinosi, Éric Dupond-Moretti. Dark Vador est présent, cape et casque noirs comme il se doit. Parmi les témoins : les frères Bogdanov, qui revenaient de l’espace où ils avaient côtoyé le prévenu. « C’était vachement marrant », se souvient Me Dupond- Moretti. Bien que né en 1961, le ténor a totalement échappé à Star Wars et n’a vu aucun des épisodes. « À l’énoncé des chefs d’accusation, j’ai découvert qu’on reprochait à mon client les pires horreurs, poursuit-il : trahison, génocide à l’encontre des habitants de la planète Alderaan, abus de biens sociaux contre la ligue des Jedi et abus de con ance contre la Force. » À la n, Dark Vador est acquitté. Enfance dicile, pas de père, prise en main par de mauvaises personnes, amour impossible pour une femme qui le fait tomber dans le côté obscur de la Force, autant de circonstances atténuantes. Et puis il reconnaît son ls, le sauve, tue l’empereur... Bref, un homme bien qui verse du côté du mal et se repent. Mais, à l’issue de l’audience, Dark Vador n’éprouve aucune gratitude. Ses avocats ont été commis d’oce. « Si j’avais eu le choix de ma défense, je n’aurais pas pris ces trois tocards », déclare- t-il en annonçant qu’il continuera à faire le mal.
« Le lm pose en réalité les deux questions fondamentales du système pénal, note MeVey avec le recul. Pourquoi on verse dans le crime ? Est- ce que le criminel a la possibilité de se racheter ? » Me Dupond-Moretti, lui, reste perplexe : « J’y suis allé pour me marrer. Je n’ai toujours rien compris à Star Wars ni aux raisons d’un pareil engouement, mais le culte, ça oui, je l’ai constaté. »
Au procès du Grand Rex, Ollivier Pourriol a été témoin de Dark Vador, dont il connaît toute la vie autant que l’oeuvre de Deleuze, Foucault ou Alain, ses penseurs fétiches. Ce normalien et agrégé de philosophie s’est plongé avec la même passion méticuleuse dans les forums sur Star Wars pour en tirer un livre passionnant, Ainsi parlait Yoda (Michel Lafon, 2015). Pourquoi un tel culte ? Parce que Star Wars est unique, répond le philosophe : « C’est un lm de science- ction qui n’est pas un lm d’anticipation. Il est le seul de son époque à apporter ce mélange inédit de technologie poussée, d’éléments grotesques et d’univers onirique dans une logique de conte de fées, avec des valeurs chevaleresques, un temps et un espace mythique. C’est enfantin,