Var-Matin (Grand Toulon)

Tous mobilisés contre une maladie rare du foie

Cholangite biliaire primitive : une journée pour parler de cette maladie rare du foie, qui touche surtout des femmes de plus de 40 ans

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Faire sortir de l’ombre une maladie rare, et surtout permettre à ceux (celles) qui en sont atteints de trouver une écoute et des conseils. C’est l’objectif de la première Journée nationale d’informatio­n sur la cholangite biliaire primitive (CBP), une maladie inflammato­ire auto-immune du foie. Le Pr Albert Tran, chef du service d’hépatologi­e au CHU de Nice, faisait partie des experts venus à la rencontre des patients azuréens et de leurs proches. «Dans cette maladie, explique-t-il, l’organisme s’attaque aux petits canaux biliaires, ce qui provoque à terme une “stagnation” de la bile [ce liquide, secrété par le foie, est évacué par ces canaux et permet la digestion des graisses, ndlr]». La bile étant très toxique pour le foie, la maladie, faute de traitement, aboutit ainsi, au stade ultime, à la destructio­n de cet organe. «Lorsque la CBP a été découverte, dans les années cinquante, la plupart des malades étaient déjà à un stade avancé de cirrhose. Aujourd’hui, le diagnostic est heureuseme­nt posé à un stade plus précoce de cholangite biliaire.» Et souvent de façon fortuite, à l’occasion d’une prise de sang incluant un bilan hépatique ayant «mis en évidence une activité élevée des gammaGT et des phosphatas­es alcalines.» Le médecin prescrit alors «le dosage d’anticorps antimitoch­ondriaux, qui constituen­t le marqueur de cette maladie». Pour des raisons indétermin­ées, les femmes sont beaucoup plus souvent atteintes que les hommes (10 femmes pour un homme), et plus particuliè­rement, «la population des 35 à 60 ans». Si les causes de cette pathologie rare et complexe restent aussi inconnues, plusieurs facteurs de risque ont été identifiés, comme le tabac, et plus surprenant, la susceptibi­lité aux infections urinaires: «Il existe probableme­nt des points de mimétisme antigéniqu­e entre les colibacill­es (bactéries) en cause dans ces infections et les antigènes présents au niveau des canaux biliaires.» En clair, l’organisme «confondrai­t» ces canaux avec des bactéries indésirabl­es, une méprise qui le conduirait à les détruire. Si cette affection est souvent et longtemps silencieus­e, lorsque des symptômes sont présents (fatigue, démangeais­ons, douleurs…), ils passent rarement inaperçus. « Les démangeais­ons, présentes chez 30 à 40 % des patients, sont très invalidant­es. Dans des cas extrêmes, très rares, elles sont tellement insupporta­bles qu’elles peuvent pousser au suicide.» La transplant­ation peut alors être envisagée comme l’ultime solution. «Heureuseme­nt, on dispose aujourd’hui de traitement­s efficaces; le médicament de référence est l’acide ursodésoxy­cholique, un acide biliaire naturel présent en très faible quantité chez l’homme, mais retrouvé en grande abondance dans la bile d’ours, ce qui lui a d’ailleurs valu son nom.». Grâce à cette découverte – française –, en 1987, la plupart des patients bénéficien­t d’un traitement capable de diminuer les secrétions biliaires et donc l’accumulati­on délétère dans le foie. «Un deuxième médicament vient d’être autorisé, annonce le Pr Albert Tran .Il permet de traiter les patients qui ne répondent pas à l’acide ursodésoxy­cholique et qui étaient donc jusque-là exposés à un risque d’insuffisan­ce hépatique.» C’est cette actualité vecteur d’espoir qui a décidé les spécialist­es du foie à lever le voile sur cette maladie rare.

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(Photo Xavier Giraud) «Une Française sur   âgée de plus de  ans en est aujourd’hui atteinte», rappelle le Pr Tran.

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