L’épreuve catalane
Le sommet de l’Union européenne, réuni jusqu’à hier à Tallinn, la capitale de l’Estonie, a certes été marqué par le discours sur la refondation de l’Europe prononcé mardi dernier à la Sorbonne par Emannuel Macron mais, dans l’histoire, cette rencontre risque fort de passer inaperçue. Car c’est à Barcelone que pourrait se jouer le destin de l’Europe ce dimanche avec le référendum d’autodétermination organisé par le président régional de Catalogne, Carles Puigdemont, tenant de l’indépendance catalane. « Il n’y aura pas de référendum », proclame-t-on à Madrid où le chef du gouvernement, Mariano Rajoy, réaffirme « la force de l’état de droit ». En clair, le pouvoir espagnol ne veut pas de ce scrutin. Il est résolu à en empêcher le déroulement. N’a-t-il pas envoyé dans la région gardes civils en renfort ! « Ne sous-estimez pas la capacité du peuple catalan », réplique Puigdemont, laissant supposer qu’il n’a pas peur des affrontements. Bref, ce dimanche est placé sous haute tension.
« Le pire serait, en outre, terrible pour l’UE. Le mouvement catalan prend la construction européenne à contre-pied. Elle tend à rapprocher les nations et les peuples et voilà que resurgit leur volonté d’autonomie. »
Nul doute que les garanties démocratiques de ce scrutin, s’il se déroule, seront contestées a posteriori. Par Madrid si l’autodétermination l’emporte dans les urnes. Si ce n’est pas le cas, Barcelone dénoncera le déploiement de la force espagnole. Reste que cette journée est doublement inquiétante. Pour l’Espagne, d’abord, qui voit son unité contestée. Le pays serait déstabilisé par un succès des indépendantistes et entrerait dans une très forte zone de turbulence. Nul doute que Madrid et Barcelone perdraient beaucoup dans une séparation. Un suicide économique. La Catalogne représente, en effet, % de la population de l’Espagne et % de son PIB, un poids considérable dans l’économie de la péninsule mais, sans doute, insuffisant pour vivre bien tout seul. À tout point de vue, l’indépendance apparaît donc comme un contresens : pour l’Espagne mais aussi pour la Catalogne. Il est sidérant, d’ailleurs, que Madrid ait laissé s’installer les conditions d’une séparation. Nul doute qu’il faudra revoir bien des choses si le pire n’advient pas. Le pire serait, en outre, terrible pour l’Union européenne. Le mouvement catalan prend la construction européenne à contre-pied. Elle tend à rapprocher les nations et les peuples et voilà que resurgit leur volonté d’autonomie. Si la Catalogne basculait, d’autres régions espagnoles pourraient se manifester. Dans d’autre pays, aussi. En Italie, des tendances centrifuges sont à l’oeuvre. Des référendums consultatifs seront organisés en Lombardie et Vénétie, le octobre prochain, pour obtenir plus d’autonomie. Que serait une Europe qui verrait ses États nations se détricoter ? Il est urgent que l’Union redonne aux peuples qui la composent une très forte envie de vivre ensemble...