Var-Matin (Grand Toulon)

Barguil : « Un frisson spécial »

Fondu de sports mécaniques, le cycliste breton, meilleur grimpeur et double vainqueur d’étape du Tour de France 2017, a découvert la glisse sur quatre roues en mode électrique. Contact !

- Textes : Gil LÉON

Briser aussi la glace à coups de volant, ce fervent passionné de sport auto en mourait d’envie. Sur les traces de Romain Bardet et Thibaut Pinot, ses voisins de peloton venus se frotter aux pilotes survoltés de l’Enedis Trophée électrique par le passé, Warren Barguil a enfin pu mettre le vélo un instant entre parenthèse­s pour explorer un autre monde. Invité d’honneur de la manche d’Isola , vendredi et hier, le Breton ne s’attendait pas à tutoyer les sommets comme lors du dernier Tour de France. Ni victoire d’étape, ni maillot du meilleur grimpeur, même si sa voiture arborait un splendide pare-soleil blanc à pois rouges. Rencontre avec un « rookie » qui n’a pas froid aux yeux...

Warren, ce baptême de la glace derrière un volant, vous l’attendiez depuis longtemps, non ? On peut le dire, en effet... Jusqu’à maintenant, je n’avais jamais pu répondre à l’invitation de l’organisate­ur. Voilà, nous avons enfin trouvé une date compatible avec mon planning. Je suis très content, parce que l’automobile en général et le sport auto en particulie­r ont bercé mon enfance.

En piste, qu’est-ce qui surprend le plus au premier contact ? La glisse, bien sûr (large sourire). Rouler sur une telle patinoire, c’est vraiment un frisson spécial. On a beau connaître les trajectoir­es sentir le ‘‘grip’’, comme en vélo, il y a une technique de pilotage bien particuliè­re à acquérir. Il faut trouver le juste équilibre, balancer la voiture au bon moment. Tout un art ! Seule une pratique régulière permet de progresser. Bon, moi, sans aucun vécu en compétitio­n jusque-là, je

suis derrière. Normal. Regardez Timo Scheider (l’autre invité vedette du Trophée électrique à Isola , ndlr) : un super pilote comme lui, double champion DTM, en bave aussi pour s’adapter...

Les sensations à bord, quelque part, ça ressemble à une descente de col ? Difficile de comparer. Quand je dévale une route, je maîtrise mon vélo de A à Z. Là, je suis loin de réunir tous les paramètres. Il s’agit d’une découverte. Un saut dans l’inconnu. En plus, le terrain évolue sans cesse au fil des passages des différente­s catégories.

Justement, si on vous proposait de faire un bout d’essai avec une voiture thermique, vous sauteriez sur l’occasion? (Du tac au tac) Ah oui ! Mais d’abord côté passager... Pour exploiter  chevaux sur un fil et sans filet, mieux vaut connaître le mode d’emploi de ces autos sur le bout des doigts. Par rapport à nous, il y a le bruit, les quatre roues motrices et directrice­s. Pilotage différent, j’imagine. Peutêtre plus facile... (rires)

Votre passion des sports mécaniques, elle est venue quand, comment ? Gamin, chez moi, en Bretagne, j’ai baigné dans cette ambiance. L’étincelle s’est produite très tôt. Ma mère a sept frères. Tous, sans exception, adorent l’automobile. Une famille de mordus, quoi ! Alors, voilà...

Bientôt, on pourrait donc vous voir courir régulièrem­ent sur quatre roues ? J’espère, oui. Lorsque j’aurai tourné la page du cyclisme profession­nel, pourquoi pas ? Entamer une autre trajectoir­e, en sport auto, pour le plaisir, ça me tente. Si ce rêve se réalise, nul doute qu’on commencera par des circuits moins glissants que celui-ci. Priorité à l’asphalte. Y a-t-il une course qui vous attire en particulie­r ? Le Dakar. Quand j’étais môme, je regardais ces images à la télé avec des étoiles dans les yeux. Et aujourd’hui, encore, voir les concurrent­s amateurs galérer dans le désert péruvien, ça ne me fait pas peur. Au contraire, ça me donne envie. J’aimerais bien tenter l’aventure un jour. Côté vélo, le courant passe bien avec votre nouvelle formation ? Super bien. Intégratio­n parfaite. L’équipe FortuneoSa­msic répond à mes attentes. C’est une structure familiale, comme je voulais. Et bretonne, ce qui ne gâche rien ! Sa philosophi­e privilégia­nt l’attaque me correspond tout à fait. Tout à l’heure, sitôt cette récréation terminée, je vais redécoller illico afin de rejoindre mes coéquipier­s. Direction le sud de l’Espagne, près d’Alicante, où notre premier stage de préparatio­n de l’année débutera dès demain (aujourd’hui). Le Tour de France  a-t-il changé votre vie ? Oui et non. En course, je suis plus regardé, soutenu, attendu. Mais ma vie personnell­e ne change pas. J’ai conservé la même copine. On vient de se marier, d’ailleurs...

Le Tour , aujourd’hui, vous y pensez un peu, beaucoup ou pas du tout ? Beaucoup, forcément. ASO a officialis­é la sélection de notre équipe cette semaine. J’ai hâte de revoir la Grande Boucle. Avec une ambition : faire au moins aussi bien que l’an dernier.

Au fait, avez-vous profité de votre passage ici pour aller repérer l’ascension de La Colmiane, juge de paix du prochain Paris-Nice ? En montant, j’ai vu l’embranchem­ent à droite et le panneau indicateur. Pas de reconnaiss­ance, non. C’est prévu juste après le Tour de La Provence, en compagnie de plusieurs coéquipier­s. On avait parcouru la route dans l’autre sens lors de l’édition précédente, donc je vois à quoi ça ressemble. Pour tout dire, je ne suis pas sûr que cette avant-dernière étape désigne le vainqueur. À mon avis, ça se jouera plutôt dans le final le lendemain.

J’ai hâte de revoir la Grande Boucle ”

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(Photo J.-M. Farina) (Photo G. L.) Warren Barguil : « On a beau connaître les trajectoir­es, il faut trouver le juste équilibre, balancer la voiture au bon moment. Tout un art ! »

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