Var-Matin (Grand Toulon)

Inquiétude et fatalisme chez les restaurate­urs varois

Bien sûr, ils n’ont aucune envie que les mesures marseillai­ses et niçoises deviennent aussi les leurs. Mais ils s’y préparent

- VIRGINIE RABISSE vrabisse@varmatin.com

On est dans la tenaille ! » Coincé entre Marseille et Nice. Entre les mesures prises de part et d’autre. À Toulon, les patrons de bar ou de restaurant sont dans l’expectativ­e. À l’instar de Denis Grail. À la tête de deux pubs, au Mourillon et en centre-ville, ainsi que d’un restaurant, il considère la situation des établissem­ents phocéens comme « une grande injustice ». Particuliè­rement pour les restaurant­s. « Dans les bars, on peut accepter d’entendre dire qu’à certaines heures, c’est difficile de gérer les gestes barrières. Ainsi, les “bons” payent pour les “mauvais”, même si ceux-ci représente­nt moins d’un tiers des établissem­ents. Mais dans les restaurant­s c’est différent : la plupart sont très attentifs. »

« Ça va nous arriver dessus »

Denis Grail prend l’exemple du sien, Le Maz, place Mazarin. Ici, Claire Amari, la gérante, a tout fait pour que les protocoles soient respectés, les distances observées. En attestent l’immanquabl­e pancarte à ruban qui pend à hauteur de visage à l’entrée, rappelant l’obligation de porter un masque. « Ona du volume, donc on a pu organiser l’espace », souligne Claire. Pourtant la patronne est convaincue que « ça va nous arriver dessus d’ici à quinze jours ». Et elle craint pour les événements qu’elle a d’ores et déjà programmés. Pas sûr, appréhende-t-elle, que le concert-raclette du 15 octobre puisse se tenir. Le propriétai­re, lui, ne regarde pas la situation niçoise avec plus d’envie. « Fermer mes pubs à 22 heures, c’est préjudicia­ble. »À peine le temps de finir l’happy hour que déjà il faut baisser le rideau… « Ça nous coûterait de l’argent d’ouvrir comme ça : dans ce cas, autant fermer ! »

« Ici, on veille aux gestes barrières »

Place de l’Équerre, Franck Lefeuvre, le patron du Street Bar, est du même avis. « Fermer à 22 heures, ce serait la même condamnati­on que fermer totalement. Ici, on commence vraiment à travailler vers 20 h 30, 21 heures ! »Il n’est toutefois pas surpris des mesures annoncées hier. Et ne le sera pas plus si, dans quelques jours, quelques semaines, il apprend qu’elles s’appliquent aussi à Toulon. « On le sent arriver : on nous a laissé passer l’été pour nous donner une bouffée d’oxygène. » Alors Franck Lefeuvre a pris les devants. Il n’a par exemple embauché personne récemment, tablant plutôt sur des intérimair­es. N’empêche qu’« une fermeture serait catastroph­ique ! » Pour le Street Bar, si elle devait durer. Mais aussi pour la circulatio­n du virus estime le patron. Il assure en effet qu’« on ne peut pas empêcher les jeunes de se retrouver, de se rassembler ». Or, explique-t-il encore, « ici, on veille au respect des gestes barrières, alors que s’ils se retrouvent quelque part… » C’est aussi à une augmentati­on des contaminat­ions dans le Var que Charlotte Cottel, propriétai­re du glacier Le Chamo sur le port, pense. « Les Marseillai­s vont venir par ici et accélérer la progressio­n du virus. C’est ce que craignent des collègues bandolais, notamment », assure-t-elle. Son inquiétude principale. Car, indique-telle, son établissem­ent fermera, comme à chaque automne, dans un peu moins de deux mois. Un brin fataliste, elle ajoute : « La première fois, c’était un coup de poignard ; cette fois, on s’y attend, alors on subira. » Et si elle se soucie plus pour ses voisins ouverts à l’année sur le port, certains d’entre eux, au moins, n’ont pas l’air de se faire trop de mouron. Au Grand Café de la rade, les serveurs Fred et David sont plutôt détendus. « Ona encore du temps », lance le premier, tandis que le second note tout de même que « ça peut aller très vite ». Autrement dit : « Jusqu’ici tout va bien. » Et puis de toute façon, comme élude cet employé d’un restaurant de la place Puget : « Qu’est-ce que vous voulez qu’on y fasse ? »

 ?? (Photos V. R.) ?? Denis Grail et Claire Amari gardent le sourire. Avec un certain fatalisme, ils redoutent le moment où les mêmes mesures qu’à Marseille seront imposées à Toulon.
(Photos V. R.) Denis Grail et Claire Amari gardent le sourire. Avec un certain fatalisme, ils redoutent le moment où les mêmes mesures qu’à Marseille seront imposées à Toulon.
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Franck Lefeuvre comme Charlotte Cottel tentent tant bien que mal, eux aussi, de garder le sourire.
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