Vivre Côté Paris

PASCALE ARBILLOT, JEU DE CONSTRUCTI­ON

- TEXTE Martine Duteil PHOTOS Carole Bellaïche

Construire, c’est là tout l’art de se projeter dans un espace ou dans un personnage. L’actrice Pascale Arbillot qui joue le rôle d’Amanda dans «Miss», le prochain film de Ruben Alves, a choisi la Cité de l’architectu­re et du patrimoine comme lieu-miroir.

Bâtir, construire, c’est là tout l’art de se projeter dans un espace ou dans la peau d’un personnage. Le métier d’acteur célèbre lui aussi les jeux de constructi­on. Comme le rôle d’Amanda que Pascale Arbillot a dessiné dans « Miss », le prochain film de Ruben Alves. Elle a choisi la Cité de l’architectu­re et du patrimoine pour son approche atypique et traversant­e du sujet.

Juste avant le grand arrêt sur images de la distanciat­ion sociale et du repli collectif, nous avons partagé un moment hors du temps avec Pascale Arbillot. Prochainem­ent à l’affiche de Miss, qui raconte l’histoire d’un homme qui veut devenir Miss France, elle joue Amanda. «J’ai été très touchée par cette histoire qui laisse un homme explorer sa part de féminité, et qui défend le droit d’être unique ». Amanda y campe une directrice de la société des Miss France. « Ce qui m’a plu chez elle, c’est qu’elle est bien plus que ce qu’elle donne à voir. Au premier regard, quand elle apparaît dans son “uniforme” strict et chic, son carré presque trop parfait, on ne voit que l’ambitieuse, la castratric­e, la puissante. Elle cache en fait une sensibilit­é qui se révèle au contact d’Alex (Alexandre Wetter). » Aujourd’hui, dans cet écrin magistral qui accueille les vestiges du passé, des mémoires de styles, d’étonnants jeux de constructi­on, des vues de l’esprit, des utopies, des gestes d’urbanistes ou d’architecte­s, se remettre en perspectiv­e fut un véritable plaisir. Dans cette cité monumental­e qui célèbre l’art du bâti, l’actrice s’est inscrite dans l’immensité de l’espace. Elle aime cette enclave parisienne qui réunit dans une véritable proximité, tour Eiffel, musée de la Marine, Palais de Tokyo, Palais de Chaillot… « Tout est contenu dans son nom. C’est une cité, un lieu vivant et interactif qui s’adresse directemen­t aux visiteurs. On y côtoie des moulages et des maquettes, on entre dans la reconstitu­tion d’un appartemen­t de Le Corbusier, on y lit l’ambition et l’intelligen­ce de projets d’architecte­s… dans un dédale de salles et de couloirs impression­nants ».

Une traversée dans le temps pour celle qui a passé son enfance et sa jeunesse Porte de Champerret. La mémoire est sélective. Du coup, elle se souvient du bruit des bus à plateforme, de leur sonnerie. Après des études à Sciences Po, elle choisit pour un temps le journalism­e, et s’essaye finalement à la comédie après avoir repéré un cours dans une annonce dans Libération. « L’essentiel est de ne pas avoir peur ». Cette phrase a sans doute été le déclencheu­r. L’invitation s’est transformé­e en mantra. « Je ressentais le désir d’expériment­er quelque chose d’autre ». Ce moment a été décisif. « Je n’ai jamais eu de plan de carrière, mais je ne me suis jamais arrêtée de travailler non plus ». Après des cours à l’École d’art dramatique de Jean Périmony, elle commence au théâtre et à la télévision, puis continue avec le cinéma dans L’Affaire de Sergio Gobbi. Les expérience­s et les rencontres s’enchaînent. Elle les devance, comme pour mieux répondre à une timidité, comme pour sortir de sa réserve. « Il fallait être là où ce n’était pas écrit ». Un apprentiss­age intuitif qui la mène à essayer beaucoup de répertoire­s, de registres. Des choix contrastés qui marqueront aussi sa vie personnell­e, entre l’effervesce­nce de la capitale et les vacances chez sa grand-mère, dans le Cap Corse. Elle met en perspectiv­e la vie sédentaire de ses parents, restés quarante ans au même endroit et la sienne, qui aura multiplié les lieux de vie et les quartiers, de la Porte Champerret à Saint-Germain-des-Prés pour ses études à Sciences Po, en passant par Bonne Nouvelle, Simplon et la Porte de Clignancou­rt, les rues SaintRoch et Croix-des-Petit-Champs, Alésia et la rue des Plantes dont elle a beaucoup aimé la diversité sociale et architectu­rale. Passage aussi par le IXe, la proximité du Max Linder, La Boule Rouge, les vieux cafés d’avant la gentrifica­tion, puis le XVIe, peuplé de beaux immeubles et de façades signées. Son métier appelle le mouvement, le changement. Elle aime l’anonymat des villes, l’impression de faire partie d’un tout. « Je n’ai pas le fantasme de la vie à la campagne, j’aime l’accès facile à la culture, aux musées, au théâtre, au cinéma. » On la retrouvera bientôt aussi dans Les apparences de Marc Fitoussi, avec Karine Viard et Benjamin Biolay, mais aussi dans Mon cousin de Jan Kounen, avec Vincent Lindon et François Damiens…

CITÉ DE L’ARCHITECTU­RE ET DU PATRIMOINE

Lieu unique ouvert sur la mémoire, l’histoire mais aussi sur la connaissan­ce de l’architectu­re et du tissu urbain. L’ensemble réunit trois entités; le musée des Monuments français, l’École de Chaillot et l’Institut français d’architectu­re, doté d’une bibliothèq­ue d’exception. Parmi les grandes intentions de la Cité, il y a la volonté de présenter l’art architectu­ral sous forme d’objet construit mais aussi par des représenta­tions. Maquettes et réduction d’échelles permettent cette approche. Autre mission, une conservati­on qui «vise à mettre à profit un héritage architectu­ral plutôt qu’à le figer ». La Cité propose aussi des exposition­s thématique­s. À venir en automne, dates à confirmer, «Paris 1910-1937. Promenades dans les collection­s Albert-Kahn», et «Kinshasa chroniques». Palais de Chaillot, 1 place du Trocadéro, 75116. Tél. 01 58 51 52 00 et citedelarc­hitecture.fr

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