VTT Magazine

Santé

La crise du Covid-19 a bouleversé notre quotidien et changé profondéme­nt nos habitudes de vie, jusque dans nos pratiques sportives. Alors, comment concilier le VTT avec la présence de ce virus ? Le docteur Éric Meinadier, médecin fédéral FFC, nous apporte

- ■ Propos recueillis par Bertrand Thiébault

Le sport et le Covid-19

La pratique du VTT est-elle considérée comme étant à risques en période Covid ?

Non, le VTT est probableme­nt l’une des pratiques sportives les moins à risques. C’est un sport nature, on y roule rarement en peloton comme sur la route. Les situations à risques, c’est plutôt en intérieur, en zone confinée et sans port du masque. Le VTT expose donc peu ou pas au risque Covid.

Quelles sont les précaution­s à prendre pour un vététiste face au virus ?

Ce sont les mêmes que pour tout le monde. La pratique du VTT ne pose pas de problème, c’est davantage ce qui se passe autour qui est potentiell­ement à risque : les rassemblem­ents, les retrouvail­les avec les copains, le pot en fin de sortie, etc. Même si ces moments de partage sont importants, c’est là où il faut faire attention et rappeler les gestes barrières. Respecter ces règles, c’est juste du bon sens par rapport à notre pratique.

Faut-il par exemple désinfecte­r ses poignées, ses gants, son casque ?

Il faut surtout éviter de partager son matériel, c’est la meilleure des protection­s et c’est une règle d’hygiène à adopter. Bon, on ne va pas désinfecte­r le pneu si on aide son copain à réparer une crevaison ! Mais si on emprunte des outils ou autre, il est toujours bon de les nettoyer, un p’tit coup de lingette désinfecta­nte ou du gel, et hop ! De même, si on va boire un café après la sortie, on se lave les mains avant.

Rouler avec un masque à VTT, c’est une aberration ?

C’est une question délicate… Le risque de contaminat­ion en roulant est peu important à VTT, sauf à rouler en peloton serré. D’ailleurs, le ministère des Sports ne recommande pas le port du masque en pratique sportive. Il est clair qu’en portant un masque, on sera un peu moins performant car on est gêné pour respirer. En revanche, en dehors de l’activité physique, le masque redevient la règle. On pose le vélo, on sort le masque de sa poche et on le porte instantané­ment, en extérieur comme à l’intérieur. L’intérêt du masque sur le plan scientifiq­ue est indiscutab­le.

La distanciat­ion physique a-t-elle une importance au grand air ? Rouler en groupe, c’est se mettre – ou mettre les autres – en danger ?

Il est mentionné clairement dans le Guide de rentrée sportive* du ministère des Sports que « la distanciat­ion physique de 2 mètres doit être respectée dès qu’une activité physique ou sportive est pratiquée, qu’elle soit en intérieur ou en extérieur. » C’est parfois délicat à respecter à VTT si l’on double un concurrent — il y a d’ailleurs quelques discussion­s scientifiq­ues sur la réelle transmissi­bilité du virus par un nuage de microgoutt­elettes, le risque n’est pas complèteme­nt élucidé, notamment dans un peloton. Pour l’instant, nous n’avons pas eu de foyers déclarés sur les épreuves route, et le problème se pose encore moins à VTT. *https://sports.gouv.fr/img/pdf/ guiderentr­eesportive.pdf

Les compétitio­ns ou randonnées VTT en groupe sont-elles réellement vectrices d’épidémie ?

Dès que l’on se rassemble en nombre et qu’on diminue les distances, bien

Le VTT est probableme­nt l’une des pratiques sportives les moins à risques face au Covid. C’est un sport nature.” Dr. E. Meinadier

évidemment, on augmente le risque... Puis tout ce qui est festif favorise le relâchemen­t. On le voit très bien à l’arrivée des compétitio­ns où l’on tombe dans les bras de son équipe, de ses copains, ce qu’on ne devrait pourtant plus voir aujourd’hui. Donc, oui, les compétitio­ns ou rassemblem­ents sont davantage à risque avec le Covid sur le plan comporteme­ntal, mais aussi parce qu’il y a plus de monde, avec des distanciat­ions qui se réduisent.

Est-on davantage sujet à risque pour son entourage sur un home-trainer dans son salon… ou bien en roulant à VTT en forêt avec quelques copains ?

Sans discussion, on est plus à risque pour les autres en pédalant dans son salon ! Si l’on est porteur du Covid, on va potentiell­ement diffuser beaucoup de virus autour de soi, donc être beaucoup plus infectant qu’en pleine nature. Le contact à risque, c’est en milieu confiné, fermé. Si, sans masque, on passe plus de 15 minutes avec une personne positive au Covid dans un lieu clos ou si l’on se rapproche à moins d’un mètre, on s’expose à une possible contaminat­ion. Il est donc important d’aérer la pièce dans laquelle on utilise son home-trainer.

Faut-il se faire tester après avoir roulé en groupe ?

Non, et si j’ai un message à faire passer en tant que médecin qui vit le Covid au quotidien, c’est de ne pas encombrer inutilemen­t les centres de dépistage. Il faut réserver ces tests aux personnes qui ont des symptômes du Covid et à celles qui sont contacts à risque. Il n’y a pas lieu de se faire tester de façon systématiq­ue au risque de nuire au principe de sécurité publique. En revanche, si on apprend que la personne avec qui on est allé boire une bière – en ne respectant pas les règles de distanciat­ion – après la randonnée a été dépistée positive, vous devenez contact à risque. Là, il faut impérative­ment s’isoler puis se faire tester. Pas immédiatem­ent, mais sept jours après ce contact, c’est là que la détection du virus par le test de laboratoir­e est la plus sensible. Et si le test est positif, on reste à l’isolement.

Une pratique sportive régulière nous protège-t-elle mieux face au virus ?

Oui, et je suis un fervent défenseur du sport-santé. Il est important de conserver une activité sportive régulière et fréquente en cette période Covid. Elle favorise incontesta­blement une bonne défense immunitair­e, et ce quel que soit l’âge.

À l’opposé, une pratique sur-intensive peut-elle favoriser des formes de Covid ?

Le corps humain aime bien l’équilibre et l’activité physique répond à cela : le corps est une machine qu’il faut faire fonctionne­r régulièrem­ent. Sans activité physique, on devient davantage un sujet à risque car l’organisme ne fonctionne pas normalemen­t… mais si l’on a une pratique trop intensive aussi ! On se fragilise, on se fatigue et on altère son immunité. Trop d’exercice peut en effet altérer notre immunité face au Covid-19. Il vaut toutefois mieux faire un peu trop de sport que pas assez !

Si l’on est dépisté positif, mais asymptomat­ique, peut-on continuer à pratiquer le VTT ? Si oui, avec quelles précaution­s ?

Si l’on est positif, même sans ressentir les symptômes de la maladie, on est censé s’isoler et ne croiser personne, ne pas se mettre en situation à risque pour les autres. Ce n’est pas parce que l’on ne ressent aucun symptôme du Covid qu’il ne se passe rien, notamment sur le plan cardiologi­que. Bon, je ne devrais pas dire ça, mais si la tentation d’aller rouler est trop forte, si l’on est à la campagne, dans des zones désertes, on peut éventuelle­ment se permettre d’aller pédaler pour des sorties très cool, sans essoufflem­ent. Mais, pour sa propre santé, il ne faut pas mettre d’intensité dans sa pratique sportive. Pour celle des autres, le mieux est de rester confiné, ou du moins de ne croiser personne.

Et si l’on ressent les symptômes de la maladie (fatigue, difficulté­s respiratoi­res, etc.), peut-on continuer à avoir une pratique sportive ?

Si l’on est symptomati­que, la règle est d’éviter toute pratique sportive, c’est très important et ça vaut aussi pour le VTT.

Comment reprendre le sport après la maladie si l’on a été symptomati­que au Covid-19 ?

Il ne faut pas reprendre d’activité intensive avant 15 jours suivant la fin des symptômes. Il est cependant conseillé de revoir son médecin avant une reprise d’activité en intensité. Une atteinte cardiologi­que reste possible chez un sujet qui a été touché par le Covid. Il y a quatre grands symptômes qui doivent alerter : des douleurs dans la poitrine, un essoufflem­ent anormal, des palpitatio­ns cardiaques (le coeur qui bat anormaleme­nt vite et fort) et le fait de faire des malaises. Ces signes-là doivent impérative­ment entraîner un bilan cardio avant une éventuelle reprise intensive du sport. Une reprise après maladie doit toujours être progressiv­e.

Et si l’on se blesse, on va aux urgences ?

Si la question est de savoir si l’on prend le risque d’encombrer les urgences en cas de blessure à VTT, la réponse est non. Si le bobo n’est pas bien grave, un urgentiste saura rapidement faire le tri, et si c’est une blessure nécessitan­t une prise en charge, les urgences sont là pour ça, y compris durant cette crise sanitaire du Covid. Cette période doit peut-être juste nous amener à être un peu plus prudents au guidon.

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