Le chanteur et poète canadien s’est éteint à ans
Le chanteur et poète canadien s’est éteint la nuit dernière à Los Angeles à l’âge de 82 ans
Pour beaucoup, ses chansons évoquent la tristesse et le chagrin, mais aussi l’espoir et la spiritualité. Hallelujah, l’une de ses plus connues (elle a fait l’objet de nombreuses reprises, dont une par Jeff Buckley qui l’a rendue célèbre) est un des titres les plus joués dans les enterrements… Et dans lesmariages! Elle passait hier en boucle, sur les radios, après l’annonce de la mort de son créateur, LeonardCohen, dans lanuit de jeudi à vendredi, à Los Angeles (Californie). Il était âgé de 82 ans et laisse une oeuvre musicale et littéraire formidable qui aurait pu (dû?) lui valoir la même reconnaissance qu’à Bob Dylan. Commentant ces jours derniers le Prix Nobel de littérature décerné à son vieil alter ego, Cohen avait déclaré avec humour que c’était « comme de dire de l’Everest que c’est une grande montagne ». On pourrait facilement lui retourner le compliment devant l’avalanche d’honneurs posthumes dont il est déjà l’objet.
Héritier de la beat génération
Né le 21 septembre 1934 dans une famille juive aisée et anglophone de Montréal, LeonardCohenapprend la guitare à l’adolescence et publie ses premiers poèmes à l’université, en 1956. En 1960, sous l’influence de la beat génération, il s’installe en précurseur du mouvement hippie dans une île grecque (Hydra), où il écrit ses premiers romans ( The Favorite Game et Beautiful Losers). Mais c’est à son retour aux États-Unis, en 1966, qu’il connaît le succès avec sa premièrechanson Suzanne, populariséepar Judy Collins. Il enregistre son premier album Songs of LeonardCohen en 1967 , qui contient Suzanne et So long Marianne, et perce véritablement deux ans plus tard avec Songs From a Room, dans lequel figurent deux autres de ses grands classiques Bird on the Wire et The Partisan. Engagé seulement sur le terrain de la spiritualité (à la différence du Dylan contestataire des débuts), Cohen traverse les années soixante sans abandonner le costume noir qui a constitué durant toute sa carrière son unique tenue de scène. Sa musique n’évoluerapas beaucoupnon plus, passant seulement d’un folk minimaliste (guitare-voix) à des influences yiddish et tziganes d’Europe de l’Est, avec violonset choeurs féminins de plus en plus présents pour contrebalancer la voix de basse profonde qui a toujours fait sa signature.
Un pic de créativité dans ses dernières années
En cinquante années de carrière, Leonard Cohen ne produira d’ailleurs qu’une quinzaine d’albums (tous excellents et fidèles à la formule originelle), avec un pic de créativité étonnant dans les dernières années, motivé autant par le besoin financier (comme beaucoup d’artistes Cohen, s’est fait dépouiller par un agent), que par celui d’écrire et de chanter jusqu’au bout. D’une qualité musicale épatante, ses dernières tournées, passées par Monaco en 2009 et Toulon en 2012, ont été des moments de communion particulièrement intenses avec son public. En septembredernier, le chanteur, déjà bien diminué physiquement, a fêté son 82e anniversaire avec un nouvel albummagnifique – l’un de ses meilleurs –, au titreprémonitoire, YouWant It Darker, dans lequel rode l’idée d’une mort prochaine. Il sonne aujourd’hui comme un adieu : « I’m ready my Lord » chante dans le morceau-titre ce juif converti au bouddhisme qui a passé une partie des années quatre-vingt-dix dans un monastère, où il a été fait moine. Quelques semaines plus tôt, Cohen avait fait ses adieux à sa muse, Marianne Ihlen (LA « Marianne »), qui l’a précédé dans la mort, avec un texte déchirant où il écrivait :« Marianne, le temps où nous sommes si vieux et où nos corps s’effondrent est venu et je pense que je vais te suivre très bientôt. Sache que je suis si près derrière toi que si tu tends la main, je pense que tu pourras atteindre la mienne ». Pour atténuer la peine immense que provoque sa disparition dans le monde entier (les drapeaux de sa villenatale Montréal ont été mis en berne à l’annonce de sa mort), on les imaginera réunis pour l’éternité, flottant maindans lamain, dans les palais dorés où chante le choeur des Patriarches…