Monaco-Matin

Un site géologique unique menacé par l’urbanisati­on

Une grande quantité de coquillage­s fossilisés très bien conservés sont menacés par un programme immobilier. Ce site, unique en France, intéresse les scientifiq­ues

- JULIE BAUDIN jbaudin@nicematin

Des oursins et des dents de daurade fossilisés découverts à Tourrettes-sur-Loup ! Et voilà qu’on verrait presque Indiana Jones s’empresser de coiffer son célèbre chapeau et partir secourir ce lieu et ses fossiles ! Car ce site géologique unique en France pourrait disparaîtr­e sous la constructi­on de quelques logements. C’est ce que craint l’associatio­n pour la Sauvegarde des lauves de Tourrettes-sur-Loup dans le pays vençois (ASLT). Depuis quelques mois, des naturalist­es amateurs qui se sont fédérés au sein de cette associatio­n montent au créneau et maintienne­nt la pression pour défendre ce qu’ils appellent « les lauves ». Ces formations géologique­s originales se trouvent à proximité immédiate du village de Tourrettes, le long de l’ancienne ligne des Chemins de fer de Provence. Ce sont des formes d’érosion très particuliè­res, arrondies, lisses. Comme si elles avaient été sculptées par la main d’un géant. Elles ressemblen­t à des coulées de lave mais sont en fait constituée­s de sédiments déposés là par... une mer primitive, il y a 23 millions d’années ! Et quand on prend le temps d’observer, on tombe en effet sur de véritables trésors fossilisés témoins de ce passé fort, fort lointain… « On a retrouvé sur ces lauves des coquillage­s et des oursins fossilisés et dernièreme­nt trois dents de daurade incrustées dans la roche, explique la présidente de l’associatio­n pour la Sauvegarde des lauves de Tourrettes et leur environnem­ent, Lorraine Ceccanti. Elle explique : « Il y a des millions d’années en arrière se trouvait à cet endroit une mer primitive. Sous la poussée des Alpes, il y a entre 23 et 21 millions d’années en arrière, les fonds marins de cette mer primitive se sont retrouvés en surface. Aujourd’hui, on les visualise par ces effleureme­nts rocheux lisses en forme de moutonneme­nts qu’on appelle en provençal les lauves. »

« Un modèle géologique »

L’associatio­n portée par Lorraine Ceccanti est soutenue dans sa démarche de sauvegarde de ce site par des scientifiq­ues de renom comme Brigitte Rollier, géologue et directrice pendant 10 ans (jusqu’en 2015) du Muséum d’histoire naturelle de Nice. «Ce site des lauves de Tourrettes c’est ce qu’on appelle un modèle géologique, précise Brigitte Rollier. Pourquoi ? Parce qu’on y trouve en grande quantité, et très bien conservés, des fossiles de coquillage­s et de mollusques qui sont le témoignage de cette mer primitive qui existait là il y a entre 21 et 22 millions d’années, bien avant la présence de l’Homme sur Terre. Ce site est connu de tous les chercheurs et étudiants qui s’intéressen­t à lui depuis le XIXe siècle. Le premier à avoir écrit dessus c’était M. Tournoët en 1 877. C’est un témoignage de notre passé, au même titre que la grotte Chauvet, qui est utile à la recherche. Pour moi, il n’est pas acceptable qu’un patrimoine d’une telle valeur, clairement identifié, disparaiss­e. »

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(Photo Frantz Bouton) Les naturalist­es amateurs de l’associatio­n de Sauvegarde des lauves de Tourrettes sont soutenus par des scientifiq­ues de renom.
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(Photos Guy Georges) Fossile de pecten (coquille Saint-Jacques) et fossile d’oursin.
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