La CFDT en porte-à-faux
Certes, Laurent Berger a été reçu plusieurs fois par le Président mais il n’a jamais été écouté et entendu.
Au lendemain de l’élection présidentielle, l’an dernier, Laurent Berger, le patron de la CFDT, n’imaginait sans doute pas que le e congrès de son syndicat, qui a débuté hier à Rennes, serait aussi délicat à gérer. Certes, patron depuis de son organisation, il sera reconduit à sa tête sans difficulté, mais c’est son approche du dialogue social qui est aujourd’hui en panne. Depuis toujours, CFDT se conjugue avec concertation dans une approche socialdémocrate de la vie publique. Cette attitude, qui s’oppose au syndicalisme contestataire de la CGT notamment, a permis à la CFDT de devenir le premier syndicat de France dans le secteur privé en , recueillant , % des suffrages, contre , % à la CGT en recul de deux points, Force ouvrière obtenant , %, la CFE-CGC , % et la CFTC , % . Elle affichait alors plus de adhérents, un chiffre qu’elle a ramené à en début d’année dans une opération vérité. Laurent Berger pouvait aussi se flatter d’avoir été l’interlocuteur privilégié de François Hollande tout au long de son quinquennat. Avec l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée, nul doute qu’il espérait poursuivre sur cette lancée et être entendu sur les questions sociales. Très vite, il a dû déchanter devant un chef de l’État qui entend bien à la fois enjamber et affaiblir les corps intermédiaires, à commencer par les syndicats. Certes, Laurent Berger a été reçu plusieurs fois par le Président mais il n’a jamais été écouté et entendu. Emmanuel Macron renvoie les organisations syndicales vers les entreprises et considère qu’elles n’ont aucune légitimité pour s’immiscer dans le processus politique. Il affirme le primat de l’élection sur tout le reste et détruit tout ce qui fonde la social-démocratie, c’est-àdire un réformisme qui privilégie la concertation avec les partenaires sociaux. C’est donc l’identité même de la CFDT qui est mise à mal par cette suprématie revendiquée et non négociable du pouvoir élyséen. L’enjeu pour Laurent Berger est donc de redonner du sens à son action et de retrouver un positionnement pour son organisation, sans trahir sa nature profonde. L’exercice est difficile car, malgré l’expression régulière de son mécontentement, il ne réussit pas, pour l’heure, à entrouvir la porte du pouvoir et à se positionner dans un dispositif macronien verrouillé.