Le Temps

Singapour se profile comme une ville de paix

- SIMON PETITE @SimonPetit­e

La cité-Etat, qui accueille le sommet entre Donald Trump et Kim Jong-un, a de nombreux atouts à faire valoir

Donald Trump et Kim Jong-un n’auront pas à craindre les manifestat­ions en marge de leur faceà-face historique. A Singapour, le moindre rassemblem­ent est sévèrement réglementé. Toute demande d’autorisati­on doit être déposée un mois à l’avance et les contrevena­nts s’exposent à de fortes amendes, voire jusqu’à un an de prison, dénonçait Amnesty Internatio­nal dans son dernier rapport annuel.

La télévision nord-coréenne n’aura donc pas à éluder les protestati­ons qu’aurait pu générer la visite d’un des pires dictateurs de la planète.

Singapour entretient à la fois de bonnes relations avec les Etats-Unis, qui y ont une base militaire, et la Corée du Nord. Singapour a toutefois été contraint de se rallier aux sanctions commercial­es et financière­s contre Pyongyang. Avec sa neutralité et sa prospérité, Singapour, et ses 5 millions d’habitants, est souvent comparé à la Suisse. Jusqu’à se profiler comme une ville de paix, à l’image de Genève?

En 2015, Singapour avait déjà été le théâtre d’une poignée de main historique, mais sans lendemain, entre le président chinois Xi Jinping et son homologue taïwanais. Le maître de Pékin a-t-il vanté les mérites de la ville à son allié nord-coréen? Singapour accueille aussi chaque

«Singapour veut être considéré comme un courtier discret et honnête»

LOUIS MARGOLIN, CHERCHEUR

année la réunion informelle du Shangri-La, du nom de l’hôtel qui héberge cet événement. Des officiels américains assistent régulièrem­ent à cette réunion, centrée sur la sécurité en Asie.

«Nous ne pouvions refuser»

«Quand les Etats-Unis et la Corée du Nord nous ont demandé d’accueillir leur sommet, nous ne pouvions pas refuser», a tranché dimanche le premier ministre de Singapour, Lee Hsien Loong, coupant court aux critiques sur le coût de ce sommet hors normes estimé à 20 millions de dollars. Un investisse­ment à relativise­r, selon le chef du gouverneme­nt, comparé aux 150 millions de dollars que coûte le Grand Prix de Formule 1 organisé dans la ville.

«C’est notre contributi­on à la stabilité de la région», a pour-

suivi, magnanime, l’homme fort de Singapour, à la tête du gouverneme­nt depuis 2004. Dans la cité, le pouvoir est une affaire de famille, puisque le premier ministre est le fils du fondateur de Singapour, Lee Kwan Yee, qui avait négocié la séparation avec la Malaisie en 1965. «Déjà pendant la guerre du Vietnam, Singapour servait de base arrière pour le ravitaille­ment des troupes américaine­s, tout en maintenant des relations avec le Nord Vietnam», rappelle Jean-Louis Margolin, chercheur à l’Institut de recherche sur le Sud-Est asiatique à l’Université de Provence.

Depuis, le port stratégiqu­e entre la Chine et l’Occident est devenu l’une des plus grandes places financière­s mondiales. Aussi ouvert aux investisse­ments étrangers que son système politique est verrouillé, Singapour attend des retombées en termes d’image. «C’est une bonne publicité», plaide le chef du gouverneme­nt, Lee Hsien Loong. «Singapour a beaucoup d’atouts. Je ne crois pas que le pays court après les événements aussi médiatique­s et périlleux que le sommet entre Trump et Kim. Singapour veut plutôt être considéré comme un courtier discret et honnête, ce qui renforce la confiance envers sa place économique», conclut Jean-Louis Margolin. t

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