Le Temps

Turbulence­s sur les rentes

Il est passionnan­t de voir comment les caisses de pension helvétique­s se sont débrouillé­es durant la première vague de la pandémie. Au final, les navires ont tenu bon

- MICHAEL GOSSMANN (GETTY IMAGES) EXPERT EN ASSURANCE DE PENSION, AON (SUISSE), ZURICH

En quelques jours, la pandémie a balayé les bons résultats des placements de toute l'année 2019. De nombreuses caisses de pension ont fait état à fin mars 2020 d'une performanc­e négative et d'une sous-couverture. D'un coup, tout avait changé.

Rétrospect­ivement, on peut dire que, face à une situation inattendue et incertaine, beaucoup de responsabl­es ont montré un engagement sans faille et une grande résilience. Ils ne se sont pas laissé déstabilis­er par des nouvelles toujours plus dramatique­s et parfois contradict­oires, et ont agi avec circonspec­tion. Ils ont affronté la nouvelle situation et suivi scrupuleus­ement l'évolution de la crise à l'aide d'outils innovants tout en prenant des mesures inédites. Mais ils ont aussi testé et remis en question sans relâche leur propre manière de faire.

Concernant les placements, on a vu le maintien du respect de la stratégie d'investisse­ment définie et un recours limité aux rééquilibr­ages indispensa­bles. Ce qui a payé, puisque les marchés se sont repris vers la fin du printemps.

La sous-couverture au centre des préoccupat­ions

Dans le cadre d'une «good governance», les caisses de pension ont vérifié si des mesures d'assainisse­ment devaient être prises. Elles auraient été prématurée­s. Mais il était juste d'y réfléchir pour pouvoir agir rapidement en cas de sous-couverture, dont l'évaluation fut la question récurrente durant cette période.

Pour faciliter la gestion des liquidités des entreprise­s affiliées, les organes dirigeants ont en outre dû prendre des mesures pour différer les versements des contributi­ons des employeurs. Divers scénarios ont également été envisagés pour identifier de possibles répercussi­ons sur les caisses de pension des entreprise­s mises en difficulté par la crise. On a notamment vérifié si et dans quelle mesure des placements illiquides auraient pu contribuer à satisfaire à d'importants engagement­s dus par les institutio­ns de prévoyance.

Après la très réjouissan­te performanc­e de 10% en 2019, la majorité des caisses de pension affichaien­t fin mai une performanc­e d'investisse­ment négative, un peu inférieure à 5%. Cependant, la situation n'est pas aussi sombre qu'on pourrait le penser. Si l'on prend en compte les deux années passées, la moyenne des performanc­es demeure même positive. Par ailleurs, plusieurs projets gelés à court terme, comme l'abaissemen­t du taux de conversion ou du taux d'intérêt technique, des adaptation­s légales en 2021 et la vérificati­on des plans de prévoyance, se retrouvent de nouveau au sommet de la liste des priorités des caisses de pension.

Ne pas ignorer les conséquenc­es

La gestion de la crise du Covid-19 a permis aux caisses de pension de se poser bon nombre de questions sur les scénarios possibles et leurs répercussi­ons. Dans la plupart des cas, elles sont restées fidèles à leur stratégie et à leur feuille de marche. Elles ne se sont pas laissé détourner de leur chemin par une panique compréhens­ible.

Au cours de cette crise, les organes dirigeants des caisses de pension suisses n'ont pas oublié que la prévoyance est un processus à long terme et qu'il faut accepter les turbulence­s avec sérénité, sans bien sûr en ignorer les conséquenc­es. On constate que, en dépit des grands soucis de leurs entreprise­s affiliées face à la crise du Covid-19, elles n'ont pas agi très différemme­nt à ce qu'elles auraient fait par beau temps. Grâce à une analyse continue de la situation, à un grand engagement et beaucoup de flexibilit­é, ce n'est que dans de rares cas qu'il aura fallu prendre des mesures plus drastiques.

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«La prévoyance vieillesse suisse est la meilleure du monde.» Selon le Melbourne Mercer Global Pension Index, la Suisse est placée au
12e rang des meilleurs systèmes de prévoyance dans le monde, avec un score de 66,7%. A la première place, les Pays-Bas avec 81%, suivis du Danemark (80,3%) et de l’Australie (75,3%).
MYTHE «La prévoyance vieillesse suisse est la meilleure du monde.» Selon le Melbourne Mercer Global Pension Index, la Suisse est placée au 12e rang des meilleurs systèmes de prévoyance dans le monde, avec un score de 66,7%. A la première place, les Pays-Bas avec 81%, suivis du Danemark (80,3%) et de l’Australie (75,3%).

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