syndicalisme de développement
le devenir de l’entreprise, son essor, son déclin ou son incapacité à résister à la concurrence ne sont plus la responsabilité exclusive de ceux qui en possèdent la patente
DANS la foulée des indiscrétions médiatiques sur les dispositions que comprendra le projet de loi de finances 2018 et des analyses savantes produites par les experts ès prospection et maîtrise de l’avenir sur ce que les Tunisiens vont endurer au cours de l’année prochaine, apparaît une petite phrase chargée de signification prononcée par Noureddine Taboubi, secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt), lors de sa visite à la Régie nationale des tabacs et des allumettes (Rnta).
Le patron de la place Mohamed-Ali et le soutien n°1 du gouvernement d’union nationale déclare en effet : «Il est temps que les syndicalistes comprennent qu’il est de leur devoir d’augmenter leur production et d’améliorer leur productivité. Se cantonner dans la logique des revendications n’est plus productif car, aujourd’hui, les travailleurs ont le devoir d’abord de sauver leurs entreprises et de préserver leurs postes d’emploi».
Le discours est nouveau. Il dénote une évolution certaine de la mentalité syndicaliste.
De nos jours, un syndicaliste ne doit plus se contenter de défendre exclusivement les intérêts et les droits des adhérents à son organisation. Il a le devoir aussi de préserver la pérennité de l’entreprise où il exerce et d’avoir conscience que cette entreprise, qu’elle soit privée ou publique, est bel et bien «la priorité» ou «le bien» des travailleurs qui y sont employés.
Le devenir de l’entreprise, son essor, son déclin ou son incapacité à résister à la concurrence ne sont plus la responsabilité exclusive de ceux qui en possèdent la patente.
Dans la nouvelle culture économique, une entreprise nationale ou une entreprise privée qui créent de la richesse et des valeurs font partie du patrimoine national, leur préservation et leur développement sont à considérer comme un devoir national que tout le monde est obligé d’accomplir, y compris les demandeurs d’emploi. D’ailleurs, ces derniers devraient saisir qu’ils sont, en réalité, les premiers bénéficiaires de la pérennité et de la prospérité du tissu entrepreneurial tunisien. Car une entreprise qui produit, qui gagne est une entreprise qui recrute, qui ouvre la voie à l’intégration des jeunes.
Noureddine Taboubi balise, avec son discours à la fois réaliste et audacieux, la voie à un nouveau type de syndicalisme : le syndicalisme du développement partagé.