Le Temps (Tunisia)

L’âge de Trump

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Depuis un mois, je suis quotidienn­ement la campagne présidenti­elle américaine. Un rallye terrifiant qui donne un sens à ce populisme effarant qui met en danger les progrès majeurs de notre civilisati­on depuis la Seconde Guerre mondiale!

Au tout début de notre histoire, l’humain chassait pour manger. Par instinct de survie, il a tué, envahi les habitation­s d’autrui, violé les femmes et asservi les enfants. Avec le temps, cet humain s’est sédentaris­é pour fonder, tour à tour, une tribu, un village, une ville fortifiée, une nation. Tout au long de ce périple, l’humain a fini par dompter sa nature sauvage pour épargner les siens. En même temps, pour mieux les exploiter, le prédateur en l’humain a continué à déshumanis­er les autres, les étrangers.

Il a fallu des siècles de guerre, de barbarie, d’inquisitio­n et de colonisati­on pour qu’enfin l’humain dompte sa sauvagerie envers l’étranger qui vivait au-delà de ses frontières. Il a embrassé une ère de paix. Ç’a été l’avènement du monde civilisé en Occident.

Sous l’impulsion d’idées progressis­tes, cet Occident déchiré par deux guerres mondiales a fini par imposer l’égalité et la justice pour tous. Les droits de l’homme. Grâce à son humanisme grandissan­t, petit à petit, le monde civilisé a mené l’humanité à son stade le plus évolué en reconnaiss­ant l’égalité entre les humains sans égard à leur origine, à la couleur de leur peau, à leur sexe, à leur orientatio­n sexuelle, à leurs croyances. Il a aussi entamé le sauvetage de notre planète, menacée par les changement­s climatique­s.

Un demi-siècle après, l’occident vit mal le basculemen­t de la richesse mondiale vers d’autres contrées, comme la Chine, l’inde, la Russie, le Mexique, l’indonésie, l’afrique du Sud, la Turquie et les monarchies arabes du Golfe. Certes, notre époque impose à l’occident des défis majeurs. Mais, au lieu d’embrasser ce siècle de la diversité avec ses risques incommensu­rables en imaginant une prospérité solidaire, responsabl­e et équitable pour tous, une frange grandissan­te d’intellectu­els occidentau­x vante de plus en plus les replis identitair­e et économique. La confrontat­ion! Sous l’impulsion de cette nouvelle pensée, défendre en Occident aujourd’hui l’humanisme, l’ouverture, la solidarité mondiale ou le climat est une hérésie imputée à une «élite gauchiste béate» qu’une partie croissante de la population occidental­e fragilisée rejette avec dégoût. Ce samedi 22 octobre 2016, quand Donald Trump a énuméré le programme de ses 100 premiers jours au Bureau ovale, il n’a fait que vanter un retour accéléré de l’amérique à la case de la prédation.

Au lieu d’inviter les siens à ne plus penser le monde uniquement dans une perspectiv­e mercantile nationale, mais dans sa totalité, Donald Trump les encourage à se retrancher derrière une muraille, comme les peuplades de jadis qui se protégeaie­nt contre les invasions barbares, et à être allergique­s à tous ceux qui ne sont pas Américains. Bienvenue à l’âge de Trump!

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