«La Terre des hommes», MeToo part en campagne
Le film de Naël Marandin, porté par une remarquable Diane Rouxel, explore les violences sexuelles en milieu agricole avec une application scolaire.
Après #MeToo, c’était écrit, la dénonciation des violences sexuelles faites aux femmes forcerait la porte des récits au cinéma. Le film de Naël Marandin examine, à l’échelle du milieu agricole, ce que Slalom de Charlène Favier (sorti plus tôt cette année) étudiait dans le milieu du sport de compétition. Film-sujet attendu au tournant de la dignité du traitement, de la finesse de la description des mécanismes représentés (rapport d’emprise, machisme endémique), la Terre des hommes ne se vautre sur aucun de ces terrains, et aspire aussi à montrer la vérité du quotidien professionnel des agriculteurs – s’il s’épargne la traditionnelle séquence «sans fard» de bête qui met bas, il ne déroge pas à la scène subjective de cauchemar dans l’étable, avec bétail menaçant et oeil de bovin révulsé.
Impeccablement incarné par Diane Rouxel, dans le rôle d’une jeune éleveuse qui cherche à sauver la ferme paternelle de la liquidation judiciaire, le film veille à distribuer toutes ses nuances de sensibilité et de galère, dosant tantôt l’opiniâtreté aux sourcils froncés d’Olivier Gourmet, le fermier endetté, tantôt l’onctuosité alarmante de Jalil Lespert, en notable local et agresseur sexuel «de tous les jours». Il débouche sur un récit bouclé tout propre dans une durée d’une heure trentesix, proportionné de telle sorte à ce que tous les corps de métier concernés et rescapés de violences similaires pourraient probablement confirmer qu’il est dans le vrai. Ce n’est pas du tout que ce programme nous laisse froid, mais il fait du spectateur son obligé, tenu en respect devant tant de juste justesse.
La Terre des hommes de Naël Marandin avec Diane Rouxel, Finnegan Oldfield, Jalil Lespert, 1 h 36.