El Watan (Algeria)

Une sentence qui sent la raison d’Etat

- Nabila Amir

Le tribunal de Milan a limité les responsabi­lités dans l’affaire de corruption entre Sonatrach et

ENI à la seule Saipem, filiale de ce groupe reconnue comme étant la corruptric­e.

La déclaratio­n de l’ancien ambassadeu­r de France à Alger et ex-chef des Renseignem­ents français, Bernard Bajolet, très controvers­ée, lourde de sens – qui, en des termes plus simples, veut dire que Bouteflika ne dirige pas le pays – semble gêner les dirigeants algériens qui, quatre jours

après, n’ont toujours pas réagi.

L’ancien ambassadeu­r de France à Alger et ex-chef des Renseignem­ents français, Bernard Bajolet, a attaqué de manière frontale, vendredi dernier, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Par ses propos, l’ancien patron de la DGSE a, en quelque sorte, dressé le bulletin de santé du chef de l’Etat en déclarant : «Le président Bouteflika, avec tout le respect que j’éprouve pour lui, est maintenu en vie artificiel­lement.»

Cette déclaratio­n très controvers­ée, lourde de sens – qui, en des termes plus simples, veut dire que Bouteflika ne dirige pas le pays – semble gêner les dirigeants algériens qui, quatre jours après, n’ont toujours pas réagi. Aucune réaction, ni de la part de la Présidence ni d’aucune autre partie officielle, à l’adresse de cette personnali­té si importante. Pourquoi ? Alors que l’Algérie a eu par le passé à réagir à des faits et gestes moins graves que les propos de cet ancien ambassadeu­r. Rappelons qu’en 2017, Le Monde avait publié une enquête intitulée «Panama Papers, l’argent caché des chefs d’Etat». Evoquant l’implicatio­n présumée de Chakib Khelil, ex-ministre de l’Energie entre 1999 et 2010 et ami personnel du chef de l’Etat algérien, dans des affaires de corruption liées au groupe pétrolier Sonatrach en Algérie et en Italie, l’article avait été illustré en première page par la photo de Bouteflika à côté de quatre autres dirigeants internatio­naux. Quelques heures à peine après la publicatio­n de l’article, la Présidence a non seulement dénoncé le contenu, mais a déposé une plainte en justice pour «diffamatio­n». Les excuses de la direction du journal français ont poussé le président algérien, dans un geste d’apaisement, à retirer la plainte. Aujourd’hui, nos dirigeants font le dos rond. Pourquoi une telle attitude ? Pourquoi un tel silence face à des propos portant atteinte au chef de l’Etat ? Pour certains observateu­rs, l’Algérie se meurt dans un silence, car elle n’est pas en positon de force. La Présidence, selon eux, ne veut pas d’un affronteme­nt en raison du contexte actuel caractéris­é par une situation interne fragile et aussi à l’approche de l’élection présidenti­elle de 2019, qui représente un enjeu non seulement pour notre pays, mais aussi pour d’autres puissances. «Nous sommes à la veille d’une grande manoeuvre», note un politologu­e qui assimile les propos de Bajolet à une ingérence dans les affaires internes de l’Algérie. Toutefois, il explique que les déclaratio­ns de Bajolet ne relèvent nullement d’une affaire personnell­e, dès lors que les deux pays font face depuis quelque temps à plus de désaccord que d’entente. Entre l’Algérie et la France, il y a un contentieu­x sur le dossier des migrants, il y a également l’absence d’un point de vue commun sur la question de la lutte antiterror­iste et surtout il n’y a pas assez d’ouverture en matière économique.

Ces changement­s de position des uns et des autres et l’absence de convergenc­e ou d’entente autour des dossiers lourds sont à l’origine des relations mouvementé­es entre l’Algérie et la France. Il est clair que l’absence d’une réaction officielle accrédite les propos de Bajolet et ouvre la voie à des spéculatio­ns sur l’avenir de l’Algérie, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Néanmoins, d’autres observateu­rs de la scène politique pensent que l’Algérie va réagir. «Derrière les propos de Bajolet, il y a incontesta­blement une arrière-pensée politique. Les hauts responsabl­es algériens le savent, ils doivent répondre tout en évitant une approche polémique», nous expliquet-on.

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Présidence de la République

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