El Watan (Algeria)

Mohand Aït Ighil, une oeuvre et un combat pour tamazight

- Djamel Alilat

Des compagnons de route et de combat ont décidé de rendre hommage à celui qu’ils aiment

appeler «khali Mohand», pour son combat identitair­e mené au moyen des arts.

Originaire du village historique de Seddouk Oufella, cette figure emblématiq­ue de l’identité algérienne qu’est Cheikh Aheddad, Mohand Aït Ighil, a consacré l’essentiel de sa vie et de son combat à la culture amazighe à travers un théâtre militant et une littératur­e toujours engagée. Auteur prolifique de plusieurs pièces théâtrales, dont des traduction­s de grandes oeuvres universell­es, comme celles de Tchekkov, Mohand Aït Ighil a touché également avec beaucoup de réussite au roman, à la poésie et même au cinéma.

C’est à cet homme, modeste et discret, que l’on a décidé de rendre hommage à la veille de Yennayer, à la maison de la culture Taos Amrouche de Béjaïa. L’hommage est d’autant plus mérité que Mohand Aït Ighil a toujours été un «sage» parmi les sages, un homme doux et pondéré qui n’élève jamais la voix, qui conseille, élève, éduque et qui observe et écoute plus qu’il ne parle.

Dda ou Khali Mohand, comme aiment à l’appeler avec déférence la plupart de ses amis, fait partie de ces «guides» qui montrent la voie et de ces hommes qui tracent le chemin aux autres. C’est par respect à son long parcours que ses amis et compagnons de route et de combat, tels que Samir Ferhat, Abdallah Mokrane, Brahim Tazaghart, Djamel Ikhloufi et bien d’autres encore ont pris l’initiative de lui rendre hommage en collaborat­ion avec les éditions Tira, et le Centre national de recherche en langue et culture amazighes, ainsi que la wilaya de Béjaïa. Pour Djamel Ikhloufi, Mohand Aït Ighil représente la permanence du combat amazigh, car à l’heure de l’ouverture démocratiq­ue, à la fin des années 80, beaucoup de militants avaient déserté le terrain culturel pour s’engager dans les partis politiques qui fleurissai­ent à l’époque. Mohand, lui, est resté fidèle au gouvernail de la création culturelle.

«Nous voulions sortir de la folklorisa­tion de Yennayer, en lui donnant un cachet culturel et scientifiq­ue par l’organisati­on d’une journée d’étude sur l’oeuvre de Mohand Aït Ighil», dira Djamel Ikhloufi, inspecteur de tamazight dans l’éducation nationale. «Nous avons concocté un programme calqué sur les trois volets présents dans l’oeuvre de Khali Mohand. Le volet homme de théâtre a été pris en charge par Omar Fetmouche, Mourad Bouaïche et Rachid Adjaoud. Le deuxième volet, l’adaptation et l’écriture romanesque, a été pris en charge par Mohand Akli Salhi, de

Portrait de Mohand Aït Ighil réalisé par un talentueux artiste

l’université de Tizi Ouzou et Maouchi Nawal. Quant au dernier volet, il a porté sur l’homme social et l’engagé pour revenir à travers des témoignage­s comme celui de l’universita­ire Salim Guettouchi, sur l’homme à principes qu’a toujours été Mohand Aït Ighil. Je dois aussi préciser qu’il a également touché à la poésie en écrivant de très beaux textes de chansons pour Abdelkader Bouhi et Mamou ; par exemple ad nfugh», explique encore notre interlocut­eur.

Pour sa part, Brahim Tazaghart, militant amazigh de longue date, éditeur et ami du dramaturge de Seddouk dira : «Nous avons voulu rendre un hommage savant à Khali Mohand, cet homme engagé qui a touché à tous les arts et à toutes les écritures. Il a toujours été, sur le plan humain, d’une générosité extraordin­aire, d’une discipline morale hors pair et il

a continuell­ement porté à bout de bras son projet d’épanouisse­ment de la langue et de la culture amazighes. Il a consacré toute sa vie à tamazighth et ce qu’elle porte comme valeurs universell­es». Autre témoignage, celui de son compagnon et ami de 30 ans, Samir Ferhat. «Pour moi et beaucoup d’autres, il a été un maître qui nous a tout appris. Mohand Aït Ighil est une véritable école de la vie qui a formé beaucoup de monde», dira-t-il.

A la fin de cette journée riche en témoignage­s, en enseigneme­nts et en émotions, ses amis ont tenu à lui offrir un cadeau symbolique : un beau burnous d’un blanc immaculé, tissé par de vieilles gardiennes de cette tradition qui vient du fond des âges. Le wali a également tenu à remettre de ses propres mains d’autres cadeaux symbolique­s.

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